rent le soir même qui suivit l’opération. L’homme est
Kol-bi qui applique un poisson grillé contre la gencive
de son cousin Nanbarry qui a pins souffert qu’aucun
des antres.
Tout-à-coup, à un signal donné, les patiens se levèrent
et se précipitèrent vers la ville, chassant devant
eux les hommes, les femmes et les enfans qui se bâtaient
de s’écarter de leur chemin. A dater de ce moment ils
étaient admis au rang d’hommes ; ils avaient le droit
de se servir de la lance et du casse-tête, et de figurer
de leurs personnes dans les combats ; ils pouvaient
aussi enlever telles filles qu’ils voudraient pour en
faire leurs femmes. Pour mieux dire, il était entendu
que s’étant soumis à l’opération , ou ayant enduré la
douleur sans murmurer, et ayant perdu une dent de
devant, ils avaient acquis un titre qu’ils avaient le
droit d’exercer dès que leur âge et leur force leur permettraient
de le faire.
La soeur de Benilong et Daringha femme de Kol-bi,
apprenant que M. Collins témoignait un grand désir
de posséder quelques-unes de ces dents, s’en procurèrent
trois qu’elles lui remirent avec beaucoup de
mystère, et sous la promesse qu’il ne ferait pas connaître
qu’elles lui avaient fait un pareil présent; elles
tremblaient beaucoup d’être découvertes, à cause du
ressentiment inévitable de la tribu de Kemmiraï à laquelle
ces dents devaient être livrées.
Les médecins auxquels on montra ces dents déclarèrent
qu’elles n’auraient pas été mieux arrachées
par un dentiste pourvu des instrumens nécessaires,
qu’elles ne l’avaient été par ces sauvages au moyen
seulement d’une pierre et d’un moi-ceau de bois.
Un des garçons qui avaient subi l’opération avait
autrefois vécu chez le chirurgien principal de l’établissement
jusqu’à son départ pour l’Angleterre. Une
parente de ce garçon apporta sa dent à M. Collins,
avec prière de l’envoyer à M. White, témoignant
ainsi sa reconnaissance, après quelques années d’intervalle,
pour les soins qu’il avait eus de son parent. Les
femmes invitèrent ensuite M. Collins à s’éloigner de cet
endroit, car elles ne savaient pas ce qui allait se passer.
Ln effet, il avait observé que les naturels prenaient
leurs armes ; le tumulte et la confusion se déclarèrent
bientôt parmi eux, et ils parurent se livrer à tout
leur naturel sauvage. Comme l’Anglais se retirait, on
donna le signal qui devait inspirer aux jeunes gens
l’esprit belliqueux qui avait été le but de toute la cérémonie
du jour; ils s’élancèrent vers la ville delà
manière que nous venons de décrire, mettant le feu
aux broussailles partout où ils passaient.
Ln songeant à ces diverses circonstances nous
n’eussions considéré cette cérémonie que comme un
tribut dù à la peuplade de Kemmiraï; mais il nous
fallut suspendre ce jugement quand nous eûmes observé
que tous les hommes de cette tribu avaient eux-
mêmes subi cette opération, chacun d’eux ayant perdu
la dent de devant. Benilong, quand on le connut et
qu’on put comprendre son langage, dit d’abord à ses
amis qu’un homme du nom de Kemmira-Gal portait
toutes ces dentg autour de son cou. Mais par la suite on