Hi'
' l ' I
M A
ilX
qui, malgré mes crainlcs , n’essayèrenl point de me
faire dc mal, et se contentèrent de rire et de me
montrer du doigt, en passant à côté de moi, avec les
mêmes marques d’étonnement que les chefs avaient
données dans la matinée. Je regagnai alors les huttes
où nous avions couché les nuits précédentes ; mais je
n’y trouvai personne. Je m’assis près du feu. \ ers le
soir ils commencèrent à rallier , en petit nombre à la
fois. Précisément à l’entrée de la nuit, je vis approcher
un groupe considérable , qui me parut porter
les corps des deux hommes qui avaient été tués. Ils
les déposèrent à vingt verges environ des cabanes et
l’ecommencèrent là de grandes lamentations. Le premier
cadavre avait été entièrement dépouillé, mais ils
n’avaient pas encore eu le temps d’achever de dépouiller
l’autre. Je voulus m’en approcher, mais je
fus aussitôt repoussé j>ar la troupe entière et contraint
de retourner près de mon feu. Peu après notre chef
el sa femme revinrent et commencèrent à faire sur-
le-champ leurs paquets pour décamper. On alluma
deux grands feux , les cadavres y furent déposés, et
ne tardèrent pas à être consumés ainsi que j’en pus
juger par le bruit et l’odeur désagréable qui me frappèrent.
Celle opération terminée, toute notre ti-oupe
décampa; après avoir marché environ un demi-mille,
nous nous arrêtâmes pour la nuit. De très-bonne
heure le matin suivant, nous fûmes debout, et toute
la journée nous cheminâmes en grande hâte , sans
faire halte, ni rien manger. Dans notre troupe se trouvaient
quatre femmes et trois hommes blessés, le dernier
très-cruellement; néanmoins ils faisaienlLousleurs
efforts, malgré leurs souffrances, pour se maintenir
avec nous. J’avais aussi observé, durant la marche de
cette journée , deux hommes dont l’un appartenait à
notre tribu et l'autre à une ti'ibu amie , qui j)ortaienl
cbacun un fardeau sur leurs épaules ; ils ne suivaient
pas la même trace que nous , mais marcbaienl dans le
bois à une petite distance à l’écart. Curieux de connaître
ce qu’ils portaient, plusieurs fois je tentai de m’en
approcher, mais je fus constamment repoussé par les
autres qui observaient mes mouvemens et me criaient
de ne pas aller près de ces hommes. Durant ce jour
nous parcourûmes à peu près buit à dix milles ; le soir
nous arrivâmes sur le bord d’un grand marais, où
nous fîmes balte; les femmes dressèrent tout de suite
des huttes, puis elles s’occupèrent de ramasser de la
racine de fougère pour lout le monde; les hommes ne
se mêlent jamais que d’attraj)er le j)oisson et le gibier.
Je logeais comme de coutume avec le chef; à une petite
distance de sa cabane, j ’aperçus mes deux bommes
qui suspendaient leurs paquets à des branches d’arbre,
et je tentai encore d’approcher d’eux, mais je bis
repoussé comme à l’ordinaire. Nous demeurâmes
deux jours en cet endroit ; jiendani, ce temps un grand
feu resta constamment allumé au-dessous des arbres,
où étaient suspendus les fardeaux sacrés. Le seccmd
jour au soir, j’essayai encore une fois de reconnaître
en quoi ils consistaient, bien que je soupçonnasse
fort que c’étaient les peaux des deux hommes que
nous avions perdus. Le vieux chef, me voyant aller