Trois ou quatre mois plus tard, tandis qu’il était
endormi, quelques naturels de la tribu ennemie de
la sienne lui donnèrent la mort.
Voici une exécution du même genre que je vis moi-
même, lors de mon passage à Port-Jackson en 1824,
et qui fut accompagnée d’accidens remarquables ; '
Le 28 février 1824, au soir, j’étais allé voir, avec
M. Lfniacke (employé de la colonie) et le major
Marlay, le camp de Boungari, sur la péninsule au
nord du canal de Sydney. Plusieurs autres tribus
se trouvaient réunies avec la sienne, et il nous apprit
que le lendemain une grande assemblée aurait
lieu près de Sydney, à l’effet de punir plusieurs
naturels accusés de divers crimes. Je bii promis de
l’eau-de-vie qu’il aimait à la folie, et il s’engagea à me
prévenir le lendemain en passant le long du bord
pour se rendre au cbamp de bataille.
Ln effet, le 29 dès six beures du matin, les deux
canots qui portaient la tribu de Boungari et ses alliés
passèrent près de la corvette ; je m’acquittai de
ma promesse, et, suivi de quelques autres personnes
du bord, je me dirigeai cbez M. üniacke. Nous
fîmes un tour dans la ville, et quelques naturels que
nous vîmes errans dans les rues nous apprirent que
la séance n’aurait lieu qu’à dix beures. Boungari
nous ayant encore promis de nous avertir avant son
départ, nous déjeunâmes cbez M. Uniacke. A peine
avions-nous fini, que ce chef, suivi de sa femme et
d’un de ses amis, vint nous dire qu’il était temps
de partir. En effet, en sortant de la ville , nous le
vîmes à la tète des guerriers de sa tribu défiler en
sautant et caracollant au travers des broussailles et
suivant différentes directions obliques. Il en résultait
un coup-d’oeil très-bizarre et vraiment pittoresque,
ressemblant assez bien à celui qu’offrent parfois
nos troupes de diablotins dans nos opéras. Nous le
suivîmes de loin et arrivâmes ainsi sur une hauteur à
deux milles environ de la mer, d’où l’oeil peutembrasseï'
tour à tour les rades immenses de Port-Jackson et
de Botany-Bay. Sans doute les combattans avaient
choisi cette position parce qu’elle offrait une vaste
étendue de terrain très-uniforme et dégagé de buissons.
Plusieurs tribus se trouvaient déjà campées à
l’entour dans les broussailles ; celle de Boungari arriva
sur le champ de bataille en exécutant certaines
danses guerrières et certaines parades menaçantes,
comme pour défier leurs ennemis et s’exciter au
combat. D’autres qui la suivirent en firent autant à
leur arrivée. A un signal général, toutes les tribus
se levèrent et se rendirent à l’arène par groupes de
quinze à vingt hommes chaque, tous armés de lances
, de boucliers, de casse-têtes et de womerangs.
Là se trouvaient les peuples de Parramatta, Kissing-
Point, Sydney, Liverpool, Windsor, Emu, Bro-
ken-Bay, Five-Islands, Botany-Bay, et même dc
Hunter’s River, etc., etc. Tous étalent distingués
par la forme de leurs dessins , noirs, rouges ou
blancs ; mais cinq ou six tribus seules étaient complètes
, les autres n’avaient envoyé que des députés
qui s’étaient réunis sous les chefs de leurs alliés. Au