mons qui rouloient tous fur des fujets in-
tereflans : c’étoit fur l’exifteneé & les attributs
de Dieu , fur les devoirs moraux
de la Religion naturelle , 6- fur la vérité
& la certitude de la Religion Chrétienne.
L e premier volume parut en, 170 5 ,
publia le fécond en 1706. Jamais O uvrage
n’a eu plus defuccès que celui-ci.
L e Doffeur Smalridge, depuis Evêque de
B r ifto l, difoit que c’eft le meilleur Livre
qui ait été écrit fur ces matières en quelque
Langue que ce foit. Le Doéteur Sykes,
dans l’éloge d e C l A S K E , inféré dans le
Journal qui a pour titre : Etat prèfent de la
République des Lettres (a), convient que
c ’eft l’Ouvrage de l’homme le plus pénétrant
qu’il y ait eu au mondé. Enfin l’E vêque
de Salisbury, en rendant compte de
ces Sermons, dont il eft l’Editeur, nous
apprend qu’ils ont furpaffé l’attente de
ceux-là même qui efpéroient les plus grandes
chofes de C lArke. C’eft un édifice,
d it - il, établi fur un fondement inébranlable
, & élevé d’étage en étage avec autant.
de force que de dignité.
Malgré ces éloges & un applaudifle-
ment univerfel, fa démonftration de l’e-
xiftence de D ie u , qui fait le füjet d’un de
fes Sermons, fut attaquée par un nommé
M. La«', dans des notes qu’il mit à l’EJfai
fu r l’origine du mal, duDofteur/Cmg, A r chevêque
de Dublin. Un homme d’efprit,
parent de notre Philofophe, nommé Jean
Clarke, répondit à cette Critique par un
Ecrit intitulé : Défenfe de la démonftration
de l'exi/lence &" des attributs de Dieu, du
Doéteur Clarke , où l’on examine particulièrement
la nature de l’efpace, d elà
durée & de l ’exiftence néceffaire , pour
fervir de répqnfeà un Livre intitulé : Tra-
iuâion de l’EJfai fur l!origine du mal, du
D ;éteur King. M. Law répondit dans une
fécondé Edition qu’il donna de fa Traduction.
On répliqua. Plufîeurs Ouvrages
parurent encore fur cette matière ;
& C L A R K E demeura toujours paifîble
' fpeflateur de cette guerre littéraire.
Notre Philofophe eut vers ce temps-là
la LeBure (b) fondée par M. Boite ; & cette
place le mit en état de fé livrer entièrement
à l’étude. I l s’attacha alors à une
matière qui de tu an doit un grand recueillement
& beaucoup dé loifir : ce fut d’examiner
fi la doétrine d’Athanafe fur la
Trinité étoit celle des premiers fiècles.
En lifant les Auteurs anciens, il avoit
cru s’appercevoir qu’elle ne l’étoit pas, &
il fe confirma dans cette idée. C e travail
n’eut pas d’autres fuites. I l l’abandonna
pour s’occuper de la nature de l’ame. Dans,
une lettre adrelfée à M. Henri Dodnrell,
qu'il publia en 1 7 0 6 , il établit que l’ame
eft immortelle de fa nature. Ce fentiment
fut attaqué par M. Dodwell même , lequel
prétendit prouver par l’Ecriture &
par les Pères de l ’E g life , que l’ame eft
mortelle de fa nature, & qu’elle eft immortelle
par la volonté de Dieu , pour
la punir ou la récompenfer. C l a r k e
répondit à cette lettre. I l ÿ preffa fon ad-
verfaire. Un despartifans de M. Dodirell,
M. Collins,fentit les coups qu’il lui portent,
& crut devoir entrer en lice. L a dif-
pute s’échauffa. Notre Philofophe fou-
tint ce qu’il avbit avancé : il publia même
coup fur coup quatre défenfes qui
réduifirent fes adversaires au filence.
Pendant le cours de cette difpute, le
halàrd lui fît faire avec fon père une découverte
à Norwich. Gommé ils obfer-
voient avec un T elelcope d’environ foi-
xante pieds l ’anneau, de Saturne, ils ap-
perçurent diftinétement une Etoile entre
l’anneau &.le corps'dé cette Planette :
d’où ils conclurent que l’ànneau'étoit fé-
paré de la Planette. Les Aftronomes le
croÿoient ; mais il falloit cette preuve
pour rendre la chofe certaine. Ceci le ramena
naturellémént à l’objet de fes premières
inclinations.; je veux direalaPhi-
lofophie de M. Newton. C l a r k e ne
ceffoit d’admirer ce grand homme ; & il
aimoit affez le Public pour lui procurer,1
autant qu’il étoit en lui , la même fatis-
(4) The prefent State ofReftublil^of Letrers. Juill. art.
1 1 , page (Si . .
\ h ) V n appelle aittû en Angleterre les Sermons extraordinaires
que l’on prêche hors des heures accoutumées
, Sc qu’on lit au lieu de les réciter de mémoire.
faction. Dans Cette vue , il traduifit
l’Optique de M. N e w t o n en beau Latin.
Celui-ci la lut & en fut fi charmé,
qu’il força notre Philofophe d’accepter
un préfent de fOO livres fterlings, diftri-
bués à chacun de fesenfans qui étoient au
nombre de cinq. Cela fuppofe que C l a r k
e étoit marié ; & fi à l’exemple de plu-
fieurs de fes Hiftoriens je n’ai pas parlé du
temps de cet engagement, c’eft que ce
trait ne forme pas un événement dans
l’Hiftoire de notre Philofophe , que les
Ouvrages d’efprit ont abforbé entièrement.
Difons feulement, puilque l’occa-
fîon s’en préfente , qu’il avoit époufé la
fille unique de M. L o k w o o d , Curé du P e t
i t M a J J in g h am , dans le Comté de Norfolk
, dont il eut fept enfans.
Dans ce temps-là une Cure confidéra>
Me vint à vaquer; & l’Evêque de Nor-
Vich, qui épioit avec foin toutes les oc-
cafïons où il pouvoit lui rendre fervice, la
lui procura. Ce Prélat, pour l’obliger plus
efficacement , le produifit enfuité à la
Cour ; Sc à fa recommandation , il fut
nommé Chapelain ordinaire de la Reine
Anne. L’eftime que cette Princefle conçut
pour notre Philofophe, le manifefta
peu de temps après cette nomination. La
Cure de Saint James de Weftminftervint
à vaquer. Le bienfaiteur de C l a r k e ,
l’Evêque deNorwich, toujours plus em-
prefle de l’enrichir, fit fentir à la Reine
que cétte Cure convenoit à fon nouveau
Chapelain ; & Sa Majefté le nomma fur
le champ. ( C ’étoit en 170p.)
Notre Philofophe pourvu de cette Cure,
crut qu’il ne pouvoit fe difpenfer de prendre
le degré de Doéteur en Théologie. Il
alla pour cela à l’Uni verfité de Cambridge;
& il foutint à cette occafion deux Thèfes
avec un applaudiITement fans exemple. Les
fujets de fesThèfes étoient, 1 °.Sans la liberté
des aidions humaines, il nefauroit v avoir de
Religion. 20. Nul article de la foi chrétienne
contenu dans la Sainte Ecriture, rHeftoppofèà
la droite raijon. Un des principaux Argu-
nientateurs fut leDoéteurJamej,Profefleur
en Théologie. Il poulFa Clarke très-
MÊê B M È Ê Ê B Ec“ ts qui parurent à ce
tujet dans le Ditltomaire Hijloriquc & Critique de
vigoureufement. D ’abord il examina toutes
les parties de fes T hèfes , & les difeuta
chacune en particulier avec beaucoup de
fubtiiite. I l argumenta enfui te avec force
pendant tout le cours de la difpute. I l
falloit un homme tel que Clarke pour
foutenir cet affaut que fa réputation lui
avoit fans doute procuré. I l parut ébranlé.
Son imagination s’échauffa ; & ce beau génie
enflamé de l’amour de la gloire, fit voir
qu’il étoit encore fupérieur à lui-même.
I l compofa fur le champ un difeours qui
dura près d’une demi-heure, & dans lequel
il démêla fi bien & avec tant d’aifan-
ce la foibleffe des argumens du Profefi-
feur, que ceux même qui étoient préfens,.
pénétrés de l’admiration la plus profonde
, doutoient s’ils dévoient croire ce
qu’ils venoient d’entendre, tant la chofe
leur paroiffoit extraordinaire. L ’argumen-
tateur plus jaloux encore de l’approuver,
que de foutenir fa réputation & fes fen-
timens , s’écria tout haut : Certes vous
m’aveq parfaitement endoBriné : ProfeBo me
probè exercuifti. Vous feul ( ajouta-t-il, en
s’adreffant toujours à C laeke ) êtes digne
de la place que je remplis, & j’en donne
dès l’inftant ma démiffion. L e Lefteur
jugera à qui cette déclaration fait le plus
d’honneur : mais que de grandeur d’ante
dans M. James !
Un aéte auflï éclatant mit le comble à
la réputation de C l a r k e . I l étoit sûr
déformais de l’immortalité, & il ne tenoit
qu’à lui de fe repofer fur fes lauriers. Mais
le travail eft l’aliment des grands génies,
comme la fatisfaélion d’avoir bién mérité
des humains eft leur récompenfe. I l eût
été même fâcheux qu’un homme fi éclairé
n’eût pas procuré toutes les inftruâions
qu’on pouvoit attendre de lui. D ’abord
pour fe délaffer, notre Philofophe publia
une nouvelle Edition des Commentaires
de C efar, qu’il dédia au Duc de Marlbo-
rough. Prefque dans le même temps il mit
au jour un Ouvrage fous le titre de la
DoBrine de l’Eglife fur la Trinité, qui édifia,
plufîeurs critiques auxquélles il répondit.*
Cette controverfc lui fit une affaire avec-
M. Chaufferie, article C l a r k e , noce Q. .
M ij