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B E R N O U L L I ■
HA l l e ÿ nef contribua pas feulement
aux progrès de la Philofo-
phie par fés propres decouvertes : il concourut
encore à fa perfection en mettant
en crédit la doctrine dé Newton, & en
confacrant à la gloire de ce grand homme
une partie de fes veilles 6c de fés
travaux. C ’étoit un parti pris en Angleterre
par tous les Savans, d’adopter cette
doétrine , & de le reconnoître pour le
premier Philofophe du monde. On ne
penfoit pas de même néanmoins dans
toute l’Europe. Quoiqu’on rendît" là juf-
tice qu’on devoir rendre à fön mérite fu-
périeur , qu’on le regardât comme un
des plus puiffans génies qui eût paru, on
vouloit partager l’admiration qu’éxci-
toient fes fublimes ouvrages, avec celle
que ceux de Defcartes 6c de Leibnitf fai-
foient naître dans toutes les âmes juftes
6c éclairées. La France de l’Allemagne
n’ôublioient pas les obligations qu’on
avoit au Philofophe François ; & comme
Leibnitz avoit concouru avec Newton
dans plufieurs découvertes , les A lle mands
, à qui il appartenoit, fe faifoiént
un devoir de porter fort haut fâ capacité
en donnant dù corps & de l’étendue
a fes penfêes.Une noble & louable émulation
animoït les Nations Angloife &
Allemandè. Mais fi la première avoit
Halley , pour fâire valoir le mérite tranf-
cendant d eNewton., l’Allemagne , réunie
avec la Suifle, nommôit Jean Bernoulli
6c IVôlf, deux hommes extraordinaires,
qui répandoient dé fa manière' la plus
avantageufe les découvertes de Leibnit\ ,
& qui, créateurs eux-mêmes, perfeCHon-
noient à la fois, & les Sciences exaCles,
& la Pliilofophie proprement dite. L e
premier qui va nous occuper, développa
lès idées de Newton 6c de Leibnit^ ,.le s
reCtifîa, leur fît enfanter dés merveilles que
leurs Auteurs n’àvo'ient pas prévues,changea
la face de toutes les Mathématiques, ÔC
par l’étendue de fes connoiiïances & fa
profonde fagacité, épuifa lës Tujets lès
plus difficiles, SC y porta les lumières les
plus abondantes.
C e grand homme naquit à Bâle le 7
Août 16 6 7 de Nicolas Bernoulli, d’une
noble famille d’A n v e rs , 6c AfTeffeur de
la Chambre des Comptes de cette V ille ,
& de Marguerite Schonaver.il montra dès
fà plus tendre jeunette les difpofitions
les plus heureufes pour les études. I l
les commença à l’âge de fix ans, 6c lès
fît avec un applaudiffement univerfel.
Son père, qui ne vouloit point en faire
un S avant, ne lui laittà achever que le
Cours dé fés Humanités. 11 le retira du
C ollège, & l’envoya à-Neufchatef, pour
y apprendre & le Commerce 6t la Langue
Françoife. L e jeune B e r n o u l l i avoit
déjà l’efprit trop élevé pour goûter tous
les détails mercénaires de Négociant,
L ’attrait des Sciences le ramena bien-
rôt à Baie ; & il n’apprit pendant fon fé-
jourà Neufcfratel, qui fut d’une annéè,
que beaucoup de François", 6c fort peu -
clé Commerce.-M. Bernoulli ne jugea p'as
à propos de contraindre fbn inclination.
Son fils profita de cette complaifanée
pour fe faire recevoir Bachelier en Phi-
lofophie. Il foutint à ce fujet une Thèfe
de igné làbente, qu’il écrivit en vers là-
tins. L ’ânnéé fui van te' il fût reçu Maître-
ès-Arts , 6c prononça à cette occafion
un Difcours en vers grecs fur ce beau-
fujet : Les Princes font faits pour leurs Peuples
,* grande vérité qui exigeoit de la
part " de l’Orateur -Pôëte beaucoup de
connoiflànces, urr courage peu commun
6c une adreffe fort déliée; Sa famille ne
* Pinacothte* virorum illuftrtuMi- Dec. tt i Elo&ti dit Awdtmiim! d< ï Academie Royale desScicncts, gar M, d*
Touchy, $cs Lettres & fes Ouvrage*.