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.quelqu’un étoît capable d’y réufïîr, c’étoit
lui. En très-peu de temps il n’acquit pas
feulement la réputation de bon Philofo-
phe : il pafla encore pour homme de goût.
Ses lumières fe manifeftèrent à cet égard
lorfqu’il prit le degré de Bachelier. Il
prononça dans cette occafîon un Difcours
Latin,autant recommandable par la beauté
de la diébion, que par la folidité & la juf-
tefle du raifonnement. Le fujet étoit tiré
des principes mathématiques de M. N e w to
n , dont le jeune C l ar k e avoit pénétré
les profondeurs : effort d’efprit d’autant
plus extraordinaire , que ce Livre
étoit au-deffus de la portée même des
Savans. Auffi M. W i f th o n , qui en avoit
raifonné avec notre Ecolier , avoit dit
hautement, qu’il ne connoifloit que deux
perfonnes qui entendiffent ces principes
mathématiques auffi-bien que lui. Clarke
étoit donc l’homme qui pouvoit donner
une bonne traduction de la Phyfique
de R o h a u l t . On n’en douta point, 6c fon
Profeffeur l’engagea à s’occuper de ce
travail. Cl a r k e obéit. Il joignit à fa
tradu&ion des notes favantes , dans lesquelles
il tâcha d’infpirer à la jeunefïè le
goût de la nouvelle Philofophie, celle de
M. N ew t o n . Ce fruit de les veilles eut le
plus grand fuccès ; 6c Clark e à l’âge
de 22 ans jouit d’une fatisfa&ion qui n’ell
ordinairement la récompenfe que d’une
longue affiduité à l’étude : ce fut de fournir
aux jeunes gens un fyftême de Science,
que prefque toutes les Univerlités adoptèrent
(a).
Après avoir fait fes études, notre Phi-
lofophe longea à prendre un état ; & ayant
choifï l’état Eccléfiaftique , il ne s’occupa
plus que de la Théologie. Il s’attacha
d’abord à l’Ecriture Sainte. Il fe nourrit
pendant long-temps de la leéture de l’ancien
& du nouveau Teftament. Il les li-
foit la plume à la main , 6 c marquoit les
fautes des verlions ordinaires. Il étudia
après cela les Ouvrages des Ecrivains des
premiers liècles , tant pour y découvrir
* .(<*)■ Cet Ouvrage eft intitule : Jacobi Rohaulti Phy-
fit* : Latini vtrtit t ra.tnju.it, & uberitribas jam annota-
R K E. 89
les véritables fentïmens S c les pratiques de
l’antiquité, que pour appuyer l’autorité
& le vrai fens des Livres facrés. Les réflexions
que ce travail fît naître, formèrent
le fond de deux Traités qu’il publia
en 169 <?, l’ùn intitulé : T r o is E J fa is p r a t i ques
f u r le B a p t êm e , la C o n f irm a t io n Or la
R e p en ta n c e ; 6 c l’autre fous le titre de R é f
l e x i o n s f u r u n L i v r e q u i a p o u r t itr e Amyn-
tor , ( attribué à M. D o d w e l l , ) en ce
q u i r eg a rd e les E c r i t s d es P è r e s de la p r im i t i v
e E g l i f e , Or les C a n o n s d u n ou v ea u T e f ia -
m e n t . Ces deux Traités lui firent beaucoup
d’honneur ; & le dernier eft, fui van t
M. IV i f ih o n y l’Ouvrage le plus important
qu’il ait jamais fait. On y voit briller,
dit-il, fon jugement 6c fa pénétration
comme fa piété chrétienne.
Encouragé par ces fuccès , C l a r k e
publia peu de temps après des Paraphra-
fes fur les Evangiles de S. M a t h i e u , de
S. M a r c y de S. L u c 6c de S. J e a n , en
deux volumes in-8°, qui furent univer-
fellement goûtées. Le Clergé d’Angleterre
lui en témoigna en particulier fa fa-
tisfa&ion; & l’Evêque de Norwich, touché
de la beauté du génie de notre Phi-
lofophe, réfolut de lui procurer quelque
pofte également honorable & lucratif. En
attendant qu’il pût en trouver l’occalion,
il lui donna la Cure de Drayton proche
de Norwich, & un autre Bénéfice dans
cette Ville, tous les deux de peu de valeur.
C L a R K e les deffervit avec beaucoup
d’édification. Les Sermons qu’il prê-
choiî dans fa Cure , procuroient d’autant
plus de fruit , qu’ils étoient entièrement
Apoftoliques. Il les prononçoit fans s’échauffer
, 6 c avec ce ton qui perfuade. Ce
n’étoient point des difcours compôfés 6c
qu’il récitât de mémoire : il préparoit feulement
le fujet, & par une grande facilité
d’expreflïon , il trouvoit à point nommé
les termes dont il avoit befoin. Il gagna
ainfî l’eftime 6c le coeur du troupeau confié
à les foin$. Jaloux de mériter aufEi
ceux du Public , il fit imprimer ces Sertionibus
, ex illuflrijfimi Ifaaci Ncutoni , maximum par--
um haujlis, ampUfitavit & ernavit Samuel C l a rk e .
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