de la préparation évangélique d’Eufebe ,
avec une continuation de cette Hijloire, tirée
de la Table d’Eraftotene le Cyrenéen , accompagnée
de plujieurs remarques hijloriques
& chronologiques , par lefquelles il paroît
que ces deux Auteurs nous donnent une fuite
de la Chronologie Phénicienne & Egyptienne
, depuis le premier homme jufqu'à
la première olympiade , qui s1accordé avec
telle de VEcriture ; Dicearque nous ayant
marqué le temps qui s'ejl écoulé depuis Ni-
tuas jufqv?à cette première olympiade. Le fécond
Ouvrage pofthume de notre Phi-
lofophe eft intitulé : Origines gentium an-
tiqufjjîmoe , ou EJfai fur la première origine
des Nations, en plujieurs Traités.
C u mb e r l a n d avoit l ’humeur
douce , gaie ôc modefte. Sa candeur étoit
telle qu’il prenoit tout du bon côté. I l
n’avoit point de fie l, & étoit fur-tout
exempt d’ambition, de malveillance ôc
d’artifice. L a vaine gloire ne fe mêloit
jamais dans fes aétions. Jamais il ne fit
rien pour chercher l’applaudiffement des
hommes , ou pour s’attirer leurs louanges.
Jamais il n’ufa de déguifement. Sa
langue étoit toujours d’accord avec fon
coeur. I l exerçoit l 5hofpitalité avec ardeur.
Il tâchoit de rendre fervice à tout
le monde. Les pauvres trouvoient à fa
porte une afiiftance continuelle, & fes
amis ne fortoient jamais de chez lui que
comblés de politeftes ôc de bienfaits. I l
étoit dur à fon égard, mais toujours généreux
envers les autres. Son imagination
n’étoit pas v iv e ; mais fon efprit. é toit’fo-
lide, ôc retenoitbien ce qu’il avoit conçu.
Quelque fujet qu’il étudiât, il s’en ren-
doit maître ; ôc tout ee qu’il avoit lû lui
' étoit préfent. Enfin il jouit conftamment
■ d’une tranquillité d’ame, quine futguères
troublée que par un zèle mal entendu pour
la Religion.
Principes de C u m b e r l a ND fur les
Loix naturelles.
Les loix naturelles font le fondement
delà Morale ôc delà Politique. On entend
par loix naturelles , certaines propositions
d’une vérité, immuable', qui fer*
vent à diriger les àétes volontaires de
notre ame, dans la recherche des biens
ou dans la fuite des maux , ôc qui nous
impofent l’obligation de régler nos acr
tions externes d’une certaine maniéré,
indépendamment de toute loi civile, &
fans avoir égard aux conventions par
lefquelles le gouvernement eft établi. Ces
propofîtions ont cette maxime pour bafei
L a plus grande bienveillance que chaque
agent raifonnable témoigne envers tous ,
conftitue l’état le plus heureux de tous
en général, ôc de chacun en particulier ,
autant qu’il eft en leur pouvoir de fe le
procurer; ôc elle eft abfolument nécef-;
faire pour parvenir à l’état le plus heu-i
reux auquel ils peuvent afpirer. Par con-
féquent le bien commun de tous eft la loi
fuprême.
En examinant la difpofition des facultés
humaines, par rapport à la fociété ,
on voit que tous les hommes peuvent
connoître ôc pratiquer les loix naturelles
, ôc que l’obfervation de ces loix eft
agréable par elle-même.
Premièrement , nous pouvons nous
former des idées abftraites & univerfelles
de la nature humaine en général, ôc en-
fuite tirer de-là des jugemens touchant
les attributs qui conviennent ou ne conviennent
pas à ces idées : comme aufli il
eft en notre pouvoir de concevoir des
défîrs généraux ôc indéterminés, conformément
& en conféquence de ces jugemens.
Nous avons donc la faculté de
nous faire des régies générales , de bien
vivre ou de diriger nos aétions, en comparant
nos idées eonfidérées en général
avec l’idée de la.nature humaine, pour
voir fi elles y font conformes. Les jugemens
que nous portons alors reviennent
d’autant plus aifément dans la mémoire ,
qu’ils-font conçus en termes propres à le»
exprimer , ôc que la lignification de ces
termes eft accommodée aux idées d’un
grand nombre de perfonnes , par le contentement
defquelles elle eft établie.
En fécond lieu, nous connoiflbns las
nombres, les poids , ôc les mefures. Or
cette connoifiance renferme celle de rafi-
fembler en total plufieurs chofes, comme
les biens de diverfes efpeces, Ôc de les
comparer enfemble félon leurs différences
& leurs proportions refpeétives. Par-
là nous pouvons nous former l’idée du
fouverain b ien, qui eft un affemblage de
tous les biens. Nous fommes aufli en état
par la même raifon de comparer un bien
avec un autre ; de fouftraire les biens
particuliers les uns des autres , ôc d’efti-
mer la proportion qu’il y a entre ceux
qui font égaux ou inégaux : operations ,
qui étant appliquées a diriger les aétions
humaines pour l’avancement de la meilleure
fin , conftituent le fondement de
toutes les loix naturelles. ^
L a troifiéme faculté qui nous met en
état de pratiquer ces lo ix , c’eft la connoif-
fance de l’ordre , par laquelle nous ob-
fervons celui qui eft déjà établi, ou nous
en établiffons un dans ce que nous voulons
faire ; & nous jugeons de quelle importance
il eft de joindre les forces de
plufieurs, pour produire un certain effet
fur tout le bien commun. A la faveur de
-cette connoifiance, & en confiderant la
fuite des caufes fubordonnées que les
fens nous font appercevoir, notre efprit
découvre très-diftinélement une caufe
première qui eft Dieu , ce conduéteiir
fouverain du monde ; ôc il peut prévoir
ce qui arrivera par un effet des facultés de
tous les Etres raifonnables, rangés dans
une fubordination connue : deux chofes
qui engagent les hommes à fe reco’nnoître
membres de cette grande fociété, ou
tous les Etres raifonnables font compris
comme étant dans le Royaume de Dieu.
De cette reconnoiffance, fuit une forte
de faculté qu’a l ’ame d’exciter, de retenir
ôc de modérer les pallions , ôc de les
diriger à la recherche des plus, grands
biens & à la fuite des plus grands maux.
Car nous fentons que nous pouvons détourner
notre ame des penfées ôc des paf-
fions , qui regardent uniquement notre
intérêt particulier , ôc les déterminer au
bien public autant qu’il nous eft poflible :
en quoi confifte notre liberté.
L ’homme a encore la droite raifon, qui
le met en état de juger des chofes conformément
à ce qu’elles font. C ’eft elle
qui nous met devant les yeux toutes les
parties de notre bonheur ôc celui des autres
; qui prévoit de loin les caufes de ce
bonheur, qui dépendent de nous ; ôc qui
les repréfente tellement liées enfemble
que nous jugeons aifément que notre propre
félicité ne fauroit être féparée du foin
de celle des autres , c’eft-à-dire, de tous
les Etres raifonnables confidérés comme
formant une fociété. De -là nous concluons
qu’il faut obferver avec exactitude
les réglés de la juftice, ôc envers Dieu &r
envers les hommes , parce que de cette
obfèrvation dépend la paix. Une conduite
contraire produit des maux affreux. Telle
eft celle de ceux qui s’arrogent un droit
fur tou t, ou qui font quelque chofe d’approchant
, Ôc qui mettent ainfi par-tout le
défordre Ôc la confufion ; rempliffent le
monde de guerres ôc caufent les plus grandes
calamités. Pour éviter cesmalheurs ,
la raifon ordonne d’entretenir les amitiés ;
d’établir des gouvernemens civils où’ il
n’y en a point encore, ôc de maintenir
ceux qui font établis, afin que non-feulement
on puifte fe garantir des maux de:
la guerre, que la folie de quelques hommes
eft capable de produire ; mais encore
fe procurer de puiffans fecours pour parvenir
au plus haut point de vertu ôc de-
bonheur.
De-là naît la loi naturelle, qui unit
tous les Etres raifonnables, c’eft-à-dire,
tous les Etres fages ; car la fagefte n’eft
autre chofe que l’exercice de la raifon
dans toute fa vigueur. Cette loi eft
telle : Quiconque juge félon les lùmieres
de la droite îaifon , Ôc réglé fes défirs fur
un tel jugement, doit s’accorder là-def-
fus avec tous les autres qui font le même
ufage de la raifon fur tel ou tel fujet:
Enfin on peut mettre encore au rang
des facultés de l’entendement' humain ,
pour connoître ôc pratiquer les loix naturelles
, le pouvoir qu’il a de réfléchir
fur lui-même ; d’examiner lès habitudes
ou les difpofitions de l’ame, qui naiffent
de fes aétes ; de conferver le fouvenir des
vérités qu’il a une fois conçues', lesTaf-
fembler ôc les comparer avec les aétions
fur lefquelles il délibéré; de juger de quel