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de Ton difque. jjLe pafTage de Venus fur
le S o le il, qui eft arrivé le cinquième
Juin 1 7 6 1 , fixa ènfuite Ton attention.
Après bien des calculs , & par une application
d’une théorie qu’il avoit formée
des parallaxes de Venus ôc du S o le il,
il démontra que le paflage de cette Planète
devoit faire connoître la vraie d is tance
du Soleil à la Terre à un cinq centième
près. C ’eft en 1 7 1 6 qu’il publia
cette grande vérité 5 & comme il ne
comptait pas en être témoin , fon zèle
pour la perfeCtion de l’Aftronomie étoit
lî grand , qu’il exhorta en même-temps,
ôc en termes pathétiques ., les Agronomes
de ce temps, à employer toute leur
fagacité & leu r tavoir, pour bien déterminer
toutes les circonflances d’un phénomène
fi rare & fi décifif.
Les LeCteurs ont du remarquer dans
cette Hiftoire, que les Reftaurateurs des
Sciences ont pafTé d’une fcience à l’autre
avec une facilité admirable , fuivant
que leur génie leur a fourni quelque
nouvelle idée ; que fans d’autres préparatifs
, ils ont fuivi le point principal de
la difficulté qu’ils fe propofoient de vaincre
; & que par la force feule de leur imagination
, ils ont approfondi les divers
fujets qu’il leur a plu de traiter. Auffi
celui qui nous occupe actuellement ,
n’eut pas plutôt fini fes calculs aftro-
nomiques, que le voilà tout-à- coup livré
à l’étude la plus profonde de la Phyfique.
I l lui vint en penfée de chercher la caufe de
la falure de l’Océan,& des lacs où les rivières
fe perdent, & tout de fuite fon génie
fécond en idées fingulières, lui fuggéra
qu’il étoit poffible de découvrir par ce
moyen l’antiquité du monde. Il recueillit
dans cette vue les obfervations qu’on
avoit faites pendant plufieurs fiècles fur
la falure de la Mer , & il découvrit que
cette falure va toujours en augmentant ,
à caufè des nouveaux fels que les fleuves
détachent des terres , ôc qu’ils y portent
fans cefie. Dans la naiffance du
monde, la Mer ne devoit pas être talée,
félon lui ; & fi on pouvoit connoître ce
temps, en deffalant toujours la Mer en
rétrogradant , on auroit l’époque de la
création de l’Univers.
L E Y.
Une idée plus utile Ôc auffi ingénieufe
fuccéda bientôt à celle-ci ; ce fut de trouver
un art de vivre fous Veau. On avoit
déjà imaginé une cloche par le moyen de
laquelle un homme pouvoit refier quelque
temps au fond de l’eau ; mais il n’ y
pouvoit demeurer que quelques minutes,
parce que l’air delà cloche s’échauffoit fort
v î t e , ou fe corrompoit, & ne fourniffoit
point par conféquent l’aliment nécelfaire à
une longue refpiration. Notre Philofophe
fe faifît pourtant de cette invention , ÔC
en faifant difparoître toutes les difficultés
, il forma véritablement un art de
vivre dans la Mer ; ôc voici en quoi con-
lifient ôc fes changemens ôc fes augmentations..
I l veut qu’on fafle defcendre à côté
de la cloche un tonneau défoncé , au fond
duquel il adapte un tuyau que le plongeur
dçit tenir dans la main. I l perce
après cela la cloche à fa partie fupé-
rieure, ôc met un robinet à ce trou. Par
ces deux additions le plongeur a de l’air
frais pendant long-temps , en ouvrant
le robinet lorfque l’air eft trop chaud.
L a troifième augmentation que fait notre
Philofophe à cette cloche , eft un verre
épais concave en deflus, Ôc convexe en
defîous, par lequel la lumière entre a v e c .
tant de force , qu’on y lit aifément les
earaétères les plus petits. Le plongeur
peut fortir de fa cloche pour aller travailler
à quelque diftance d’elle ; & comme
il manque d’air alors, Halley attache
un tuyau à la choche pour y recevoir
l’air. C e tuyau qui eft flexible, après^
avoir environné le bras du plongeur y
parvient à un cafque de plomb attaché
fur fa tête. Ce cafque eft ouvert parle
bas, ôc fait l’effet d’une petite cloche
d’a ir ; ce qui l’aide à refpirer loin de ta.
cloche. On peut donc par ce moyen faire
defcendre un plongeur auffi bas que l’on
veut , fans le moindre inconvénient ,.
pourvu qu’on ne fafle pas defcendre ta:
cloche trop vîte, ôç qu’on l’enlève doucement.
C e n’étoîent pas la les feuls travaux qui
occupaflent notre Philofophe. I l étoit depuis
1713 Secrétaire de la Société Royale-
de Londres , ôc ta fonction de cette
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place exigeoit de lui qu’il colligeât avec
choix tous les ouvrages que préfentoient
à cette Compagnie les membres qui ta
eompofoient, ôc qu’il les publiât. I l 1a
garda jufqu’en 1720 , temps où ta place
d ’Aftronome Royal à l’Obfervatoire
de Greenwich vint à vaquer par 1a mort
de M. Flamfièed. Celle-ci fut plus conforme
à fes défirs. I l ta demanda , Ôc
l ’obtint fur le champ. L ’Aftronomie reprit
çlè§-lors tous fes droits fur lui. I l fe procura
de nouveaux inftrumens, ôc obferva
le Ciel à Greenwich jufqu’au commencement
de 1 7 4 0 , avec une ardeur affidue
qui faifoit , fclon le rapport de M. de
Mairan , une partie eflentielle de fon
caractère. I l avoit formé depuis longtemps
le projet de raflembler une fuite
d’obfervations fur les lieux de 1a Lune,
pour tâcher de réduire à quelque loi
confiante les mouvemens irréguliers de
cet aftre/Quoique Newton eût fait les
plus grands ôc même les plus heureux
efforts, afin d’en connoître 1a caufe, &
que Halley rendît 1a plus grande juftice
à fon trav a il, il comprenoit néanmoins
qu’il s’en falloit beaucoup que 1a théorie
de fes mouvemens fût complète. C e ne
pouvoit ê tre , fuivant- lu i , n ï l ’ouvrage
d’un feul homme, ni celui d’un fiècle.
Pour réduire ces inégalités au calcul, il
crut que le feul moyen qu’il y avoit à
prendre, étoit d’en trouver la période, de
manière qu’au bout de ce temps ces inégalités
dévoient fe renouveller comme
auparavant. Pline le Naturalifte avoit
déjà dit que dans l’intervalle de 223
lunaifons , les éclipfes de Soleil & de
Lune fe renouvellent dans le même
ordre. Notre Philolophe, qui lifoit beaucoup
, fe fouvint de ce trait. Il examina
cette période ; ôc par 1a comparaifon
de diverfes obfervations , il reconnut-
qu’effectivement après 223 lunaisons, les
phénomènes lunifolaires fe renouvellent
dans le même ordre, à une petite différence
près d’environ 20 à 25* minutes.
Son premier foin fut de chercher 1a caufe
de cette différence, qu’il trouva aifément.
Elle vient de ce que pendant que 1a période
de 2 2 3 lunaifons s’achève, ce qui
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arrive dans l’efpace de 18 ans ôc quel*
ques jours, l’apogée avance de 13 degrés
de plus qu’une révolution entière, ôc
les noeuds font deux révolutions moins
1 1 degrés. Mais cette différence influe
peu ôc fur le temps & fur le lieu réel de
la Lune , ôc n’apporte pas un changement
fenfible fur 1a grandeur des équations;
de forte qu’a'près 1a période , 1a
différence des lieux de la Lune calculés,
avec celle des lieux réels,font fenfiblement
les mêmes. Halley avoit déjà obfervé la
Lune pendant feizemois consécutifs dans
les années 1 6 8 2 ,8 3 & 8 4 , & il reprit 1a fuite de fes obfervations en 16 22. I I
publia en 1 7 3 1 le réfultat de Ion travail
dans les TranfaSlions philofophiques, N° .
4 2 1 . Dans fon Mémoire, qui eft intitulé
, Méthode pour trouver en Mer la longitude
, à un degré ou 20 lieues près, il fait
voir que par ta méthode il peut prédire,
à une erreur près de deux minutes, le
lieu de 1a Lune pour un inftant quelconque
; ôc il démontre en même-temps
que cette exactitude eft fuffifante pour
déterminer 1a longitude en Mer , à
un degré près , aux environs de l’Equateur
, ôc à moins dans les latitudes plus
grandes.
I l ne difcontinua pas d’obferver ta
Lune jufqu’en 17 4 2 ; ôc d’après cette
longue fuite d’obfervations , il avoit
dreiïe des Tables lunaires, qu’il différoit
toujours de publier,& qui n’ont paru qu’en
1 7 4 9 , c’eft - à - dire après fa mort ; . car
notre Philofophe paya le tribut à l’humanité
le 2 y de Janvier 17 4 2 . Sa fanté
fe foutint tans aucune altération fenfî-
ble jufqu’ en 17 3 p . I l avoit alors 83
ans ; mais il fut attaqué d’une efpèce de
paralyfie, qui ralentit un peu l’ardeur
de fes< travaux. Malgré fon incommodité^
il venoit cependant à Londres une
fois la femaine dîner avec fes amis. Son
mal augmenta par des degrés infenfibles,
& il cefla de vivre par 1a feule extinction
de fes forces, ôc prefque tans accident.
Halley étoit aflez maigre, mais d’un
bon tempérament, ôc d’une gaité qu’il
ne perdit qu’avec ta vie. Sa taille étoit
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