A raifon eft l’apanage de
l’homme ; mais il n’acquiert
la perfection de cette
faculté , qui le diftingue des bêtes
, qu’en apprenant la fcience
d’en faire ufage. C’eft ce qu’ont
compris ces Génies privilégiés
qu’on appelloit Sages autrefois ,
& qui fe font nommés plus mo-
dèftement eux - mêmes Philofo-
phes , c’eft-à-dire amateurs de la
îageffe. Scrupuleufement attentifs
aux mouvemens de leur ame , ils
les ont fuivîs , fit en ont fait une
première chaîne d’idées fimples.
Avec ce fecours, ils ont pafTé aux
idées eompofées. Aidés ainfi par
des lumières toujours plus abondantes
à proportion qu’ils ont plus
réfléchi , ils ont jetté les fon-
demens du grand art de former
l’homme. L ’entendement humain
a été analifé, ou même anatomifé.
On a développé fes opérations ;
fit après les avoir mûrement examinées,
on a donné des règles pour
être jufte fit fenfé ; pour fortifier
lbn jugement fie étendre fes con-
noiffances ; pour faifir l’efprit de
chaque chofe , démêler la vérité
de la vraifemblance , la certitude
des probabilités , l’évidence des
faufiles lueurs ; enfin pour être rai-
fonnable dans tous les événement
de la vie. li a fallu dans ce travail
dévoiler les pallions ; les faire
taire d’abord , afin de s’en rendre
maître , fit les diriger ènfuite conformément
aux vues actuelles. Parvenus
à cette efpèce de perfection,
les Philofophes ont fenti que:
ce qui pouvoit contribuer a la
félicité de l’homme , c’étoit d’occuper
fon efprit en l’éclairant, fie
de calmer les tempêtes qui agitent
fon coeur. L ’étiide de la nature
a paru la plus propre à ' cette
fin, fie parce quellefatisfait la cu-
riofité, qui eft un befoin de l’ame ,
fie parce quelle nous rapproche
fans ceffe de l’Etre fuprême , qui
nous occupe continuellement.
L ’Homme fit la Nature , voilà
l’étude des Philofophes. Elle fe
fubdivife cette étude en bien des
parties : car l’efprit humain fe modifie
en une infinité de manières ;
fit les détails de la nature font im-
menfes. On appelle Ethice , *
ou généralement Métaphyfique ,
L e mot Ethice fignifie Philofophie morale, laquelle renferme la Métaphyfi