& la Phyfique: mais il adopta déformais
le nouveau Journal, Ôc promit d’y dépo-
fer fes nouvelles idées fur ces fciences.
Le premier écrit qu’il inféra dans ce
Journal, fut l’expreflïon en nombres rationnels
du rapport du cercle au quarré
circonfcrit. I l donnoit cette expreflion
comme une chofe nouvelle, parce qu’il
en a voit fait véritablement la découverte;
mais on lui écrivit d’Angleterre,
queiVeu'torc avoit déjà publié unepareille
expreflion, non-feulement pour le cercle',
mais encore pour toutes fortes de
figures.On lui en envoya même des efiais.
Le fécond Mémoire qui parut dans les
Aêla eruditorum, ne fut revendiqué par
perfonne : c’étoit la découverte d’un
principe unique pour l’optique, la diop-
trique ôc la catoptrique. Ce principe eft
que la lumière va toujours d’un point à
un autre par le chemin le plus aifé; &
ce chemin doit fe mefurer par rapport
aux plans tangents des furfaces courbes.
Dans ce Mémoire , notre Philofophe
n’oublie point qu’il s’étoit engagéàcen-
furer la Phyfique de Defcartes. Il faifit
donc cette occafion pour attaquer fon
explication de la réfraction de la lumière.
Sa cenfure porte en général fur
la caufe méchanique que le Philofophe
François employé dans cette explication,
au lieu de fe fervir d’une caulè
finale.
Cette cenfure étoit fort légère ; auflï
n’eut-elle pas beaucoup d’approbateurs r
mais il en forma bientôt une autre qui
mit tous lesefprits en feu. Defcartes avoit
avancé que, malgré les•mouvemensdif-
férens des corps, il devoit y avoirquel-
que chofe de confiant & de perpétuel ; ôc
iJ prétendoit que c’eft la quantité de mouvement,
dont la mefure eft leproduitde
la mafie par la vîtefiej, L e i b n i t z fubf-
titua la force à la quantité dë mouvement,
qu’il mefure par le produit de la
maffe, par le quarré de la vîtefle. Les
Cartéfiens jettèrent les hauts cris; ôc le
grand Newton dont le fiiffrage ne peut pas
être fufpeft, fe rangea de leur côté. Les
SavansAngloisfans exception, ôc particuliérement
les DoCteurs Clarcke ,
Pemberton ôc Defaguliers, fe déclarèrent
hautement pour Newton : mais notre
Philofophe eut auflï pour lui un parti
puiflant. Il étoit compofé de MM. Ber-
noulli, Herman, IPolf, s'Grave^andeôc le
Marquis de Poleni.
Tous les Mathématiciens de l’Europe
prirent part à cette difpute ; ôc comme
leurs calculs font infaillibles , ils ne pou-
voient manquer d’évaluer exactement les
effets. L ’erreur étoit dans les termes que
chaque parti prenoit dans un fens dif-;
férent (c).
Ce n’eft pas feulement comme grand
Philofophe , que L e i b n i t z s’annonça
dans les aCtes de Leipfick : il s’y fît auflï
connoître comme un très-profond Mathématicien
, par un écrit contenant une
méthode de trouver les plus grands ôc les
moindres effets, ainfi que les tangentes,
fans fraCtions ni quantitésirrationelles(d).
Cette production fingulière parut deux:
ans avant la difpute de la force vive, ôc de la'
force morte, c’eft-à-dire , de la force d’un
corps en mouvement, ôc de la force d’un
corps en repos ; ou , ce qui revient au
même,de l’eftimationgénérale de la force.
Elle étoit aflez piquante pour exciter
l ’attention desMathématiciensrmais peu
de Géomètres étoient en étatrd’en fentir
toute la finefle, d’autant mieux que l’A u teur
avoit fupprimé fes démonftrations.
Dans ce temps^là, les Princes de
Brunfwick l’ayant chargé d’écrire l’Hif-
toire de leur Maifon , notre Philofophe
ne fongea plus qu’à ramafler les matériaux
néceflaires pour la compofition-de
cet ouvrage. I l courut toute l’Allemagne,
vifita toutes les anciennes Abbayes ,
fouilla dans les archives .des villes *
examina les tombeaux ôc les monumens
de Pantiquité. Inftruit que les Marquis
de Tofcane, de Liturgie ôc d’Eft avoient
, ( e) Voyez le Dictionnaire Umvcrfel de Mathemat.
& de Phyfique , art. Fq âCE.
, (<£) Voici le titrtf de cetce produftion qui fo n -
t je ju i ’inyention du calcul différentiel ; Noyq Methodus
pro maximix- & mini mil, itemque langen'ibus qua
ntc fractas nec irrationales quantités moratur <:'? fin^uh
p’ o illis calculi tenus. Per G» G. L, Alla Eruditorum,
1Ö84'.
la même origine que les Princes de
Brunfwick, il alla en Italie. Dans ce
v o y a g e , il lui arriva une aventure qui
penfa lui coûter la vie. Pour pafler de
Venife à Mefola, il s’embarqua feul &
fans fuite dans une petite barque. A u
milieu de fon trajet, il s’éleva une fu-
rieufe tempête qui allarmatout le monde.
L e Pilote qui avoit obfervé long-temps
le Paffag er , jugea qu’il étoit hérétique.
I l fit part de cette importante oblerva-
tion aux Mariniers. Sur le champ ceux-
ci en conclurent qu’il étoit la caufe de
la tempête ; ôc comme ils ne croyoient
point être entendus par un Allemand , ils
réfolurent tout haut de le jetteràla mer.
L e i b n i t z entendit ce difeours; &fans
marquer aucun trouble, il tira un chapelet
de fa poche, qu’il avoit pris fans
doute par précaution, en voyageant dans
un pays où il y avoit alors beaucoup de
fuperfiitieux, ôc en fit ufàge avec un air
fort dévot. Cet artifice lui réuflït : on
penfa différemment fur fon compte, ôc
on attendit de la Providence la fin de
l ’orage.
Après avoir fait en Italie toutes les
recherches qu’il jugea convenables pour
fon ob jet, il retourna à Hannovre. Il y
arriva en iô ç o . Son premierfoinfut.de
mettre en ordre tous fes mémoires ; ôc il
les trouva beaucoup plus abondans qu’il
ne falloit pour compofer l’Hiftoire de la
Maifon de Brunfwick. I l forma du fu-
perflu un recueil qui compofa plufieurs
volumes. Tous ces morceaux conte-
noientdes aftes faits par les Nations ou
en leur nom, des déclarations de guerre,
des Traités de paix ou de trêv e, ôcc ; ôc
comme il penfoit que ces aétes font les
véritables fourcesde l’Hiftoire, il appela
cette coîle&ion le Code du Droit des gens ;
le premier volume parut (en 1053) fous-
le titre de Code x juris gemiurn diplomatie
eus. A la tête de ce volume' eft une belle
préface , dans laquelle , entr’autres réflexions
judicieufes , on remarque celle
qu’il fait fur les Traités de paixfifréquens
& fi peu folides. Elle ne fait pas honneur
a l’humanité j car elle feterniine àcette
conclufion , qu’il n’y a de véritable paix
que chez les morts. Ce ne fut pas feulement
l’étude de l’Hiftoire qui donna lieu
à cette réflexion : elle lui fut fuggérée
par un trait plus frappant. I l vit chez
un Marchand Hollandois une enfeigne ,
au bas de laquelle on lifoit cette infçrip-
tion , A la paix perpétuelle, &quirepré?
fentoit un cimetière.
Notre Philofo.phe penfoit à publier
la fuite de fon Code diplomatique: mais
le Comte d'OxenJiiern & plufieurs per-
fonnes de diftinétion lui ayant promis de
nouvelles pièces, il fufpenditfon travail.
En attendant, il fe livra à l’étude des
Mathématiques, de la Phyfique ôc de
la Métaphyfique, & continua de mettre
au jour fes découvertes fur ces fciences
dans les aétes de Leipfick. Pendant fon
voyage d’I ta lie , il avoit envoyé aux
Auteurs de ces ades des morceaux très-
eurieux, qu’ils n’avoient pas manqué de
faire imprimer. Dans la feule année
1 68p , il avoit paru de lui fix mémoires i
le premier, fur la nature de l ’angle du
contad ôc d’ofculation, ôc de fon ufage
dans les Mathématiques : le fécond, fur
l’analyfe des indivifibles ôc des infinis r
le troifième, fur les lignes optiques : un
quatrième, fur le mouvement des graves
projettés dans un milieu réfiftant : un
cinquième, fur la caufe du mouvement
des corps céleftes-: & le dernier, fur la
ligne ifôchrone, le long de laquelle un;
corps defeend fans accélération. On re-
eonnoît dans tous ces mémoires un Géomètre
également fubtil ôc profond. Auflï
tous les Mathématiciens de l’Europe leur-
firent beaucoup d’accueil. I l n’y eut peut-
être que fon eflai fur la caufe du mouvement
des corps céleftes, qui ne reçut
pas des éloges. En faifant ufage. de la;
matière fubtiie de Defcartes, ôc en admettant
le plein univerfel, L e i b n i t z prétend
que la- circulation- de l’éther ôc la
gravité des planètes, leur fait décrire
leur orbite. De cette circulation qu’il
appelle circulation harmonique , il déduit
que la vîteffe angulaire d’une pla;--
nète qui diminue du périhélie à- Paghé