i8 N E W
eu ne lumière homogène ; & de ces pourpres
mêlés avec le jaune & le blanc on
peut faire d’autres nouvelles couleurs,
ô c c .(k ) .
Concluons donc que les couleurs proviennent
de ce que parmi les corps les
uns réfléchirent certaines efpéces de
rayons , les autres certaines efpéces différentes
j & que ces couleurs varient fui-
vant la quantité de rayons qu’ils réflé-
chiffent. Ainli l’écarlate réfléchit en plus
grande abondance les rayons les moins
réfrangibles ou rouges , de par cela même
elle paroît rouge. Les violettes réfléchirent
en plus grande abondance les
rayons les plus réfrangibles, ôc c’eft delà
que vient leur couleur. Il en eft de
même des autres corps : car chaque corps
réfléchit les rayons de fa propre coule
u r , en plus grande quantité', qu’il ne
fait ceux de toute autre efpéce , & tire
•fa couleur de l’excès & de la prédominance
de ces rayons dans la lumière réfléchie.
Toutes les couleurs de la Nature font
donc formées par fept couleurs primitives
; ôc ces couleurs dépendent de
leurs différentes réfrangibilités. Entre ces
réfrangibilités il y a une analogie bien
remarquable • c’eft d’être en proportion
avec les fept tons de la Mufique. La réfrangibilité
du rouge répond à Yut, celle
de l’orangé à J î , celle du jaune à la ,
celle du verd à f o l , celle du b le u à ^ ,
celle du pourpre à mi, ôc celle du violet
à ré. Il y a plus. Le ton le plus aigu répond
au rouge , ôc le plus grave au v io le t, qui
. font les deux tons ôc les deux couleurs
extrêmes. On remarque encore que les
couleurs viennent à nos yeux en même
proportion, que les fons parviennent à
nos oreilles. Cette remarque eft fans doute
très-fine ; car il eft difficile d’obferver
cette proportion , ôc fur ce rapport des
fons ôc des couleurs , il faut être très-
.circonlpeâ:, afin de ne pas palier les bornes
que l’expérience preferit,
T O N .
S y ft êm e d e P h y j îq u e d e N e w t o n , ou E x *
p lic a t io n g en e r a le des P h én om èn e s de la
N a tu r e ,
A u commencement Dieu forma la
matière en particules folides , maffives ,
dures , impénétrables, de telles grandeurs
ôc figures, avec telles autres propriétés,
en tel nombre , en telle quantité ôc en
telle proportion à l’efpace qui convenoit
le mieux à la fin pour laquelle il les for-
moit. Ces particules primitives font folides
ôc incomparablement plus dures
qu’aucun des corps poreux qui en font
compofés ; II dures même, qu’elles ne
s’ ufent ni ne fè rompent jamais , rien
n’étant capable, félon le cours ordinaire
de la Nature , de divifer en plufîeurs parties
ce qui a été fait originairement un,
par la difpofition de Dieu même. Tandis
que ces particules continuent dans
leur mouvement 7 elles conflituent des
corps d’une même nature ôc contexture ;
ôc fi elles venoient à s’ufer ou à être
brifées , la nature des chofes qui dépendent
de ces particules, changeroit infailliblement.
L ’eau ôc la terre , compo-
fées de vieilles particules ou de fragmens
de ces particules, ne feroient point de
la même nature que l’eau ôc la terre , qui
auroiênt été compo'fées au commencement
de particules entières. Afin donc
que la Nature puiffeêtre durable, l’altération
des êtres corporels ne doit con-
fifter qu’en différentes féparations, en
nouveaux affemblages Ôc mouvemens de
ces particules permanentes ; les corps
compofés étant fujets à fe rompre, non
par le milieu de ces particules folides,
mais dans les endroits où. ces particules
font jointes enfemble, ôc ne fe touchent
que par un petit nombre de points. Ces
particules ont une force d’inertie accompagnée
des loix paffives du mouvement,
qui réfultent de cette force. Elles font
auffi mues par certains principes aétifs ,
tels que celui de la gra vité, ôc celui qui
produit la fermentation ôc la cohéfion des
N EWT O N .
Corps. La force d’inertie eft un principe paf-
fif, par lequel les corps perfiftent dans leur
mouvement ou dans leur repos, reçoivent
du mouvement à proportion de la
force qui l’imprime, Sc réfiftent autant
que les autres corps leur réfiftent. Ce
principe feul n’auroit jamais pu introduire
aucun mouvement dans le monde. I l en
falloit néceffairement quelqu’autre pour
mettre les corps en mouvement. E t c’eft
à l’aide de ces principes que toutes chofes
ont été arrangées dans ce monde par la
direction d’un Agent intelligent j car c’eft
à celui qui créa ces particules qu’il apparte-
noit de les mettre en ordre. Il neconvien-
droit pas de rechercher une autre origine
du monde, ou de prétendre que les fimples
loix de la Nature ayent pu tirer le monde
du chaos , quoiqu’étant une fois fait,
il puiflè continuer plufieurs fiécles par le
fecours deces loix. Cette uniformité mer-
veilleufe dans le mouvement des corps
céleftes , doit être néceffairement regardée
comme l’effet d’ un choix. Celle qui
paroît dans le corps des animaux, doit
être confédérée de même. En effet, tous
les animaux ont deux côtés formés de la
même maniéré ; fur ces deux côtés deux
jambes par derrière, ôc deux bras ou deux
jambes ou deux aî'les par devant fur les
épaules. Entre les1 épaules eft un col qui
tient par en bas à l’épine du d o s , avec
une tête par deffus, où il y a deux oreilles,
deux y eu x , un nez , une bouche , une
langue dans une même fituation. Si après
cela on confidere à part la première formation
de ces mêmes parties dont la ftruéhtre
eft fi exquife , comme celle des y e u x ,
des oreilles, du cerveau, des mufcles,
du coeur, des poumons, du diaphragme,
des glandes, du larinx , des mains , des
aîles , de la veffie d’air qui fondent les
poumons dans l’eau , des membranes
pellucides, dont certains animaux fe couvrent
les yeux à leur gré, ÔC qui leur tiennent
lieu de lunettes naturelles, & la formation
des autres organes des fens & du
mouvement ; fi à ces confidérations on
joint celle de l’inftinél des brutes ôc des
infeétes , on fera convaincu que tout cet
artifice ne peut être que l’ouvrage de la
fageffe & de l’intelligence d’un Agent
puiffant ôc toujours v iv an t, préfent par
to u t, qui dans l’efpace infini, comme fi
c’étoit dans fon fenforium , voit intimement
les chofes en elies-mêmes , les ap*
perçoit ôc les comprend entièrement Ôc à
fond , parce qu’elles lui font immédiatement
préfentes. Comme l ’efpace eft
divifible à l’infini , ôc que la matière
n’eft pas néceffairement dans toutes les
parties de l’efpaee, il eft poffible que
Dieu crée dés particules de matière de
différentes groffeurs ôc figures, en diffé-
rens nombres, en différentes quantités,
par rapport à l’efpace qu’elles occupent,
Ôc peut-être même de différentes denfîtés
ôc de différentes forces , ôc qu’il diversif
ie par là les loix de la Nature , ôc faffe
des mondes de diverfes efpéces & en di-
verfes parties de l’Univers.
Gardons-nous de fonder les Vues ôi
la puiffance du Créateur. Elles font in fi-*
niment au-deffus de nos lumières. Nou3
ferions trop heureux, fi nous pouvions
connoître les loix par lefquelles il gouverne
le monde que nous habitons. G'eft
fans doute une curiofité très-raifbnnabld
que celle qui a pour objet la- connoif-
fance’de ces loix. Nous ne pouvons nous
former une idée du Tout-puiffant que par
fes oeuvres , & nous en avons allez fous
les yeux pour exercer nos facultés intel-
leétuelles. 11 n’y aura peut-être de notre
part que des conjectures, mais elles prouveront
au moins le défir que les hommes
ont de' s’unir au Créateur , par la découverte
de fes fecrets. On demande donc fi le S o k il Ôc îe3
Etoiles fixes ne font point de vaftes terres
violemment échauffées, dont la chaleur
fe conferve par la groffeur de ces corps,
ôc par i’aétion & la réaétion réciproque
entr’eux ôc la lumière qu’ils jettent ;leur3
parties ne pouvant d’ailleurs s’évaporer
en fumée, non-feulement par la fixité,
mais encore par le vafte poids ôc la
grande denfité des atmofpheres , qui pe-
fant fur eux de tou» côtés , les compriment
très-fortement ôc condenfent les
vapeurs ôc les exhalaifons qui s’élèvent
de ces corps-là. Le grand poids de l’atr
C i }
R&-4I