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niverfité , dont 11 était Membre, il en
fut le plus zélé défenfeur. Audi PUni-
verfité le nomma pour être un des délégués
pardevant la Cpur de haute Com-
mijjion. Il fut encore élu en 1688 Membre
repréfentant dans l e Parlement de
Convention, & y tint féance jufqu’à ce
qu’on l’eût diffous.Quelques années après,
le Comte de Halifax , Chancelier de PE*
chiquier, qui cherçhoit toutes les occa-
fions de pouvoir lui donner des preuves
non équivoques de fon amitié , obtint
du Roi Guillaume de le créer Garde des
Monnayes , ôc trois ans après il devint par
fon crédit Maître de la Monnoye ; forte
de Charge qui .lui produifit un revenu
très -çonfidérable. L ’Académie Royale
des Sciences de Paris , lors de fon renouvellement
, qui arriva en 1 699 , le
mit au nombre des Alfociés étrangers ;
& à la convocation du Parlement en
17 0 1 , il y prit féance en qualité de
Député de l’Univerlïté de Cambridge.
En 1703 , la Société Royale l’élut Pré-
fident^de la Société. Enfin,pour qu’on
ne pût reprocher aux hommes de ne l’avoir
pas comblé de biens ôc d’honneurs,
la Reine Anne le fit Chevalier en 170 7 .
Cette marque de diftinêtion le mit en
grande faveur à la Cour ; mais il y fut
encore plus confidéré fous le Roi George.
L a Princelfe de Galles en faifoit un cas
particulier, & elle difoit tout haut qu’elle
fe tenoit heureufe de vivre de fon temps
ôc de le cqnnoître. Pour faire fa cour à
cette Princeffe, Newton lui communiqua
les idées qu’il avoit d’une Chronologie
ancienne. Son AlteiTe Royale les
trouva fi neuves ôc fi ingénieufes, quelle
délira avoir un précis de tout l’Ouvrage.
Notre Philofophe ne vouloit point qu’il
devînt public: mais laPrincelTe lui ayant
promis qu’il ne fortiroit pas de fes mains,
il lui communiqua fon manufcrit. Cela le
fut à la Cour , Ôc les Savans qui appro-
choient de Madame de Galles , mirent
tout en oeuvre pour en avoir une copie.
L ’Abbé Conti, noble & d’oéfce Vénitien ,
fut allez heureux pour s’en procurer une.
I l l’apporta en F ran ce, ou on la tra-
duifit ôc imprima fous ce titre : Abrégé
chronologique de M . le Chevalier N e w t o n ,
fait par lui-même, G traduit fur un manufcrit
Anglois, avec des obfervations.
Notre Philofophe n’approuva point ce
larcin. Quoiqu’il ne défavouât pas fon
Ouvrage, il trouvoit mauvais qu’on l ’eût
rendu public fans lui demander s’il ju-
geoit à propos qu’il le fût dans cet état.
I l y a une grande différence entre un
manufcrit compofé pour des amis, Ôc un
manufcrit qu’on veut mettre au jour. Le
Public eft un Juge févère qui ne fait grâce
fur rien, ôc qui examine un Livre avec
des yeux bien différens que des Particuliers
, quelqu’éclairés qu’ils foient. Notre
Philofophe crut donc devoir fuppléer à
fon manufcrit ce qu’il jugea nëceffaire ,
ôc il répondit en même-temps aux Obfervations.
Ce fuppîémént parut dans les
Tranfaftions Philofophîques , N°. 38^ ,
avec ce titre : Remarques fur les Obfervations
faites fur VIndex chronologique du
Chevalier N e w t o n , traduit en François,
G publiées à Paris par VAuteur des Obfervations.
Le P. Souciet attaqua aulfi l’A brégé
ou l’Index chronologique , ôc le
Doéteur Halley en prit la défenfe ( e ),.
Enfin , pour mettre le Public en état de
juger de ce différend, les amis de Newton
donnèrent fon Ouvrage en entier.
Il eft intitulé : La Chronologie des anciens
Royaumes corrigée , à laquelle on a joint
une Chronique abrégée, qui contient ce qui
s’efl paffé anciennement en Europe jufqVà
la conquête de la Perfe par Alexandre le
Grand. Par le Chevalier lfaac N e w t o n .
C ’eft un fyftême de chronologie qui
eft divîfé en deux Parties. I l s’agit dans
la première, qui eft aftronomïque, de la
manière dont Chiron plaça les conftella-
tions, lorfqu’il les inventa pour l’ufage des
Argonautes. Cet Aflronome fixa les
points folfticiaux ôc équinoxiaux aux 1 y
dégrés de leurs lignes. L ’an 3 1 6 de
l’Ere de Nabonafiar, Meton oblerva le
folftice d’été au huitième dégré du Cancer
; par conféquent les folftices avoient
( t ) Voyca les Tranfaélioni Phîlofophiquts, fl* }9 J .
reculç
feculé de fept dégrés. Ils reculent d’un
dégré en 72 ans, ôc de fept degrés en
yoq. ans. Comptez les 70 4 ans, en remontant
depuis l’an 3 16 de l’Ere de Na-
bonalfar, ôc vous trouverez l’expédition
des Argonautes 5)36 avant Jefus-Chrijl.
C e qui eft 300 ans plus tard que ne la
fixent les Grecs.
L a preuve de cela e f t , i ° . Que les
Anciens nous ont tranfmis qu’au temps
de Meton l’Equinoxe fut obfervé au hui-,
tiénïe dégré d’Aries. 2°. Qu’au temps
d’Hyparque il étoit au quatrième dégré
du même ligne. 30. Que cet Hyparqué
croyoit que la précelfion des équinoxes
étoit d’un dégré en cent ans , au lieu
qu’elle n’eft que de 72 ans ; Ôc la chronologie
des anciens étant fondée fur cette
faulïe fuppofition , ils reculoient par conséquent
beaucoup trop les événemens.
Mais tous ces points ont été conteftés
par le P. Souciet, qui prétend furtout que
les plus célèbres Aftronomes de l ’antiquité,
ôc Meton même, plaçoient les points
cardinaux au commencement des Signes
( ƒ ).
L a fécondé partie du fyftême eft hifto-
rique. Pour appuyer fon calcul aftrôno-
mique , Newton compte la longueur
des règnes des anciens Rois, Les E g yp tiens
y les Grecs ôt les Latins ont fup-
pofé ces règnes équivalens chacun à une
génération. Ils ont compté trois générations
pour cent ans ; ce qui donne un
peu plus de trente-trois ans pour chaque
règne, l’un portant l’autre. Mais notre
favant Auteur réduit ce calcul au cours
ordinaire de la nature, qui, félon lui, ne
donne que dix-huit à vingt ans de règne
à chaque R o i , l’un portant l ’autre. Par
cette réduction il rapproche les époques
des anciennes hiftoires. I l fuppofe ici que
les Chronologifies n’ont pas compté
d’après des Regiftres authentiques les
règnes des Rois dont ils font mention.
En étudiant l ’Hiftoire , N e w t o n
avoit lu les Prophéties de Daniel, &
l’Apocalypfe de Saint Jean , ôc en les
lifant, il lui étoit venu dans l’efprit plu-
fieurs idées qu’il mit par écrit. I l réunit
enfuite ces idées dont il forma un Ouv
rage , qu’il intitula : Remarques fur les
Prophéties de Daniel, G Jur ïApocalypfe
de Saint Jean ( g ) . I l explique d’abord
Daniel, ôc c’étoit la première Partie de
fon Ouvrage, ôc il donne dans la fe-,
conde des remarques fur l’Apocalypfe.
On a écrit que Newton avoit compofé
ce L iv r e , pour confoler les hommes de
la grande fupériorité qu’il avoit fur eux ;
Ôc il faut avouer que cette réflexion eft
affez jufte. On ne reconnoît point du
tout ce grand homme dans cette production.
Dans VExamen du Chapitre X IV des
Obfervations du Chevalier Newton fur les
Prophéties de Daniel, où Von examine G
réfute avec foin V opinion de cet Auteur fur
Vorigine G les caufes du culte des Saints dans
lès Eglifes Chrétiennes , le Doéteur Gray,
auteur de'cet Examen, traite .Newton
d’enfant, lorfqu’il parle de Religion ôc des
Peres, & prétend que fes raifonnemens
font pitié. L ’expreflion eft forte ; mais ,
fans vouloir juftifier notre Philofophe fur
cet article, je crois qu’on peut être grand
Philofophe, ôc n’être qu’un enfant en fait
de Religion ôc de Myfteres , ou exciter
même la pitié d’un Doéteur par fes raifonnemens.
A u refte, il faut regarder- ces Remarques
de Newton far l’Apocalypfe comme
un pur délaffement ; car il avoit renoncé
à toute entreprife confidérable,
foit de.Mathématique ou de Philofophie.
( f ) Voyez le Journal des Savans du mois de Juillet
Ï727. Voyez au.lïi la Préface du Tome I I de
YHiftoire dui Monde 'facrée & profane , par M. Schuckford , M& . la criti. du fyftême cuti.r de Newton , par danFs rlear ct. Il y a encore un écrit fur cette matière Cor.itinuatioh des Mit.noires.de Littérature & déHiftoire
, Tome V & fuiv. Il eft de M. la Naufe. C’eft
une réponfe au P. Souciet.
(g ) On trouve ces Remarques dans les Opufcules
de Newton , qui contiennent fa Chronologie , fon
Traite' de la quadrature des Courbes| fon 'Dénombrement
des Lignes du troifiémj^ ordre , fon Jlnalyfe par les Equations
infinies, & plufieurs autres morceaux de Geo-
rae'trie , qui font bien voir que la haute Mathématique
etoit principalement le genre de Newton.
Tous ces riiorceaux font écrits en Latin , & les
Opufcules formant trois volumes «»-4. font intitulés :
I/aaci NEWTONI, equitis aurfiti Opufeula Mathematica ,
thilofophica & Philo logica.
B