ferrés Sc détenus dans les corps, ne perdent
pas leur mobilité, mais ils font inceflam-
merit effort les uns vers un endroit, les autres
vers un au trecomme pour s’échapper
& fe mettre en liberté ; d’où il arrive
que le mouvement du tout fe fait du côté
que tend le plus grand nombre. Ainfi la
vertu motrice qui eff dans chaque com-
pofé, doit fon origine aux atomes. E t comme
dans les compofitions les plus fpiri-
tueufes les atomes font plus libres qu’en
aucun autre, la vertu motrice eff cenfée
réfider principalement dans les elprits qui
par leur impétuofité emportent toute la
maffe vers l’endroit où ils font le plus d’effort.
Les atomes compofent donc le monde,
forment les corps, leur donnent leur a£ti-
vité ; Sc fuivant leur figure, leur grandeur
Sc leur mobilité, ils excitent dans les corps
la chaleur, la roideur, l’humidité & la fé-
chereffe, les rendent durs, élaftiques, fluides
ou liquides, &c. En un mot, c’eft de
la combinaifon différente des atomes, foit
en quantité ou en qualité, que viennent
les diflérens corps qui forment le monde Sc
leurs propriétés particulières.
I I . De la génération des Animaux.
L a caufe de la génération des animaux
n’eft que cette petite ame de la femence
même qui eff deftinée pour cela. Cette
petite ame eft une efpéce demain me entretenue
d’un humide particulier, & de telle
forte répandue Sc retenue dans la matière
féminale, que tendant de fe déployer par
mille conduits infenfibles, elle eft diver-
fement modifiée par ces conduits, Sc ne
peut que félon cette modification fe mouvoir
, diftinguer Sc arranger les particules
de la matière, les former Sc les tourner
diverfement, diftribuer l ’aliment aux unes
Sc aux autres, Sc ainfi donner l’accroiffe-
ment à tout le corps qui en eft formé.
Comme la tiffure intérieure de toutes les
femences n’eft pas la même, Sc qu’ainfi ces
conduits par où l ’ame eft refferrée, fait
effort Sc eft déterminée, ne font pas les
mêmes, elles forment des corps félon la
variété de ces mouvemens. •
Cette femence générale a été formée
dès le commencement du monde, & répandue
dans la terre Sc dans les eaux. C e
font des atômes qui par leur figure particulière
& par leur mouvement continuel,
fe mêlent entr’eux, s’arrangent & fedif-
pofent d’une telle manière qu’ils deviennent
telles ou telles .femences. Quand la
femence eft fomentée par qü'elqu’agënt,
elle fe développe Si forme un animal.
C ’eft l ’accouplement des deux fexes qui
produit cette fomentation. L e mâle la ré-,
pand dans le fein de la femelle. Les femmes
en donnent aufli, Sc leur femence étant
mêlée avec celle de l’homme, concourt
au développement Sc à l’accroiffement du
foetus. L ’une & l ’autre découlent de tout le
corps. Cet écoulement fe fait par les veines
, les artères Sc les nerfs > qui aboutiflènt
aux tefticules. I l vient peu à peu, la matière
s’affemblant, fe cuifant 6c fe préparant
à la longue pour être féparée lors de
la copulation. Dans ce temps tout le corps
eft dans l’agitation, Sc il fort quelque chofe
de fpiritueux qui eft excité dans les diver-
fes parties du corps, Sc qui en étant expri-.
mé, tend Sc eft pouffé aux parties génitales
pour produire la tenfion Sc aider à faire
l ’éjeétion.
L a femence eft donc un écoulement fpi-
ritueux que toutes les parties du corps
font fortir par un effort Sc un renverfement
commun Sc général, Sc pouffent toutes en
même temps à un même endroit, en forte
que gardant encore quelque liaifon , lorf-
qu’elle fe détache Sc qu’elle coule le long
des membres Sc des vaifleaux, elle a quelque
reffemblance avec l’animal dont elle
eft détachée, c’eft-à-dire qu’elle eft comme
une efpéce d’abrégé ou d’animal en ra-
courci. Ainfi il arrive que toutes les parties
de cet écoulement, qui appartenoient
à la tê te , en fe ^tournant Sc fe retournant,
fe tirent à part Sc fe diftinguent d’une telle
maniéré , qu’elles s’affemblent Sc fe joignent
enfemble pour faire la tête ; que celles
qui appartiennent à la poitrine font la
même chofe de leur côté, Sc en général
que chaque portion de cet écoulement
forme la même partie dont elle émane.
De -là il fuit que l’ame qui eft dans la
femence,
ffemence, en tant qu’ elle a aufli découlé de
toutes les parties, fait la maniéré dont il
faut nourrir, animer, arranger Sc difpo-
fer chacunè des parties ; en forte qu’étant
comme l ’abrégé Sc le racourci de
toute l’ame, elle continue de faire dans
la matière de la femence, qui eft aufli
un abrégé de tout le corps, ce qu’avec
toute l’ame elle faifoit dans tout le corps.
Or elle étoit premièrement occupée à dif-
pofer la nourriture de telle maniéré qu’elle
appliquoit des parties aux parties, Sc qu’ainfi
réparant continuellement tout le corps,
elle leformoitcontinuellement; c’eft pourquoi
elle s’attache aufli de même enfuite à
appliquer ces parties à des parties, Sc en
les remettant dans l’ordre Sc dans la fitua-
tion où elles étoient, elle forme un petit
corps entier,
C e petit corps devroit être toujours
celui d’un mâle, Sc la nature ne produit
une femelle que lorfqu’elle fe trouve trop
foible pour exécuter fon projet ; de forte
que la femme eft comme un mâle tronqué
Sc défe&ueux. Cette opinion eft fort ha-
fardée. C ar puifque la femelle eft nécef-
faire à la génération, elle a donc fon utilité
particulière autant que le mâle. L a quef-
tion de fa voir pourquoi il naît plutôt un
mâle qu’une femelle, refte toujours indé-
cife. I l eft plus facile d’expliquer pourquoi
un enfant reffemble non- feulement à fon
pere Sc à fa mere, ou à tous les deux, mais
aufli quelquefois à fon grand-pere ou à fon
aïeul, ou à un étranger, ou même quelquefois
à une ftatue ou à une image qu’une
femme aura fouvent regardée. Cet effet
provient de la force de l’imagination. L ’ef-
péee ou l’image de la chofe extérieure,
qui par l’entremife des fens a éré imprimée
dans le cerveau, Sc a ébranlé la faculté
imaginatrice qui y réfide, émeut de telle
maniéré l’appétit ou le fentiment Sc les efprits
qui le forment. que ces rfprits con-
fervent aufli leur modification ou le veftige
de l’impreflion qui a été faite, Sc le portent
avec eux par le corps en forte que
s’il arrive que la femence fe détache, Sc
que l’éjeélion ait lie u , les efprits modifias
qui affluent à la femence & qui la pénétrent
diverfement, affe&ent toute cette
maffe de femence & toutes Ces particules
d’une maniéré particulière, Sc leur communiquent
leur impreffion, tellement que
les particules s’arrangeant enfuite en formant
le foetus, Sc prenant chacune leur
propre lie u , retiennent le veftige de l’impreflion
, ou confervent la reffemblance
avec l’image.
Ainfi le foetus, foit mâle, foit femelle ,
pourra reffembler au pere, fi l’imagination
de la mere qui a en vue le pere, eft plus
forte, Si l ’emporte fur l ’imagination du
pere. I l reffemblera à la mere, fi l’imagination
du pere qui fe porte à la mere, eft
plus puiffante que celle de la mere. 11 reffemblera
confufément à l’un ou à l’autre,
fi les deux imaginations du pere Sc de la
mere font également affrétées. E t il ne reffemblera
ni à l ’un , ni à l’autre, fi l’imagination
du pere Sc celle de la mere font distraites
ailleurs, eh forte que dans le mâle
elle n’ait point la femelle pour objet, ni
dans la femelle le mâle. C ’eft par cette
force d’imagination que l’enfant reffemble
quelquefois à une ftatue ou à une image,
ou à un autre homme que l’époux, ou à
une autre femme que la mere.
De-là vient que les enfans portent quelquefois
des marques ou des envies des
meres, comme des cerifes, des framboifes,
Scc. ou des impreflions qu’elles ont reçues
dans quelque partie de leur corps par la
force de l’imagination. Comme de toutes
les parties de la mere il vient des efprits ,
q u i, paffant avec le fang par les vailîeaux
ombilicaux,pénétrent jufqu’au foetus, ceux
qui viennent particulièrement de cette partie
du corps, que la mere, échauffée par
une forte imagination, a frotés, emportent
avec eux leur modification particulière, Sc
impriment l’image de la chofe défirée à la
partie correfpondante du foetus.
A peine l’animal eft engendré, qu’il a la
faculté de fe nourrir; car la faculté nutritive
fuit immédiatement la faculté génératrice,
afin de l’entretenir , de réparer les pertes
qu’il fait, Sc de l’accroître. E t c’eft ce.be-
foin qui a déterminé la confti uftion propre
de l’animal. Premièrement, la nature a
donné à tous les animaux une bouche pour
prendre la nourriture & la tranfmettre au-
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