P RE L I M I NA I R E
SUR LA RENAISSANCE
DE LA PHI LOSOPHIE.
mérite une diftin&ion réelle. Lui
porter alors une nouvelle lumière ,
c’eft s’attirer fa haine, parce que
c’eft un avantage que de fe montrer
plus éclairé qu’autrui, en quelque
matière que ce foit. Aulli l’amour
propre a mis bon ordre contre cette
efpèce d’humiliation. Il a inventé
une manoeuvre, qui en affermiffant
l’erreur, maintient avec unè forte
de gloire l'imperfection & l’igno^
rance : c’eft d’établir d’abord pour
axiome & pour principe , qu’off a
raifon; & de regarder enfuite comme
une véfité confiante /que l’intd-
L ne faut pas elpérer que la
Philofophie falfe de grands
progrès, & que les hommes
deviennent par conféquent plus fa-
vans & plus fages, tant qu’on foU-
tiendra la vanité par des diftinc-
tîons arbitraires, ou des prérogatives
frivoles. L ’efprit humain n’eft
pas feulement amoureux de lui-
même : il eft aufli naturellement
jaloux , envieux & malin à l’égard
des autres. Son but eft prefque toujours
de dominer;&dès qu’il trouve
une voie aifée d’y parvenir, il néglige
les moyens qui donnent par le