H O B B E S . J3
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H O B B E S . *
LE fécond Métaphyficien qui ait
fleuri depuis la renaiflance des L e t tre
s , efl: Thomas H o b b e s , l’un des plus
forts efprits de fon fiècle. I l naquit
en Angleterre à Malmesburi le 5* A v r il
i r 88. Son père étoit Miniftre. I l montra
dès fa plus tendre jeunefleunefi grande envie
d’apprendre, qu’il excitoit en quelque
forte fes Maîtres à l’inflruire. A l’âge de
14. ans, il favoit les Langues favantes. I l
donna même alors une preuve de fa capacité
en ce genre, par une traduction qu’il fît
de la Médée d’Euripide de vers Grecs en
vers Latins. I l étoit toujours le premier
de fa Clafl'e, & le modèle qu’on propo-
foit fans cefîe aux autres Ecoliers. Après
qu’il eut appris les Belles-Lettres, on l’envo
y a à l’Univerfité d’Oxfor t, pour y étudier
la Philofophie. Son oncle, François
Hobbes, qui l’aimoit tendrement, fe chargea
de fon entretien ; mais une maladie
l’ayant mis au tombeau , il lui laifla en
mourant un petit bien qui fatisfit à fes
bonnes intentions. L e jeune H o b b e s
apprit dans cette Univerfité, en cinq ans,
la Logique 6c la Phyfîque d’Ariflote. I l
fe diftingua dans fes Etudes par différens
prix qu’il remporta. Son mérite le fit
connoître de Guillaume Cavendisch, Baron
de Hardwick , 6c depuis Comte de
Devonshire. Ce Seigneur lui propofa de
fe charger de l’éducation de fon fils ; 6c
H obbes ayant accepté cettepropofition,
il voyagea avec fon Difcipleen France &
en Italie. I l s’attacha pendant ce voyage
à vifîter les personnes les plus favantes ,
& à examiner les monumens de l’antiquité
qu’il tournoit du côté des Lettres 6c de la
Philofophie.
D e retour chez lu i , il voulut mettre à
profit les lumières qu’il avoit acquifes. Il
examina d’abord la Philolophie dtArijlo•
te , qu’il n’approuva pas. I l abandonna
cette Philofophie pour étudier les Philo-
fophes 6c les Poè'tes Grecs qu’il connoif*
foit, 6c il fit un extrait de leurs meilleures
penfées.
Dans ce temps - là vivoit le fameux
Chancelier Bacon, 6c H o b b e s en fit la
connoiffance. I l fe lia par là avec Edouard
Herbert de Cherbury. Ces deux favans
voulurent l’engager à s’appliquer à la Philofophie
Ecleftique : (a) mais fon génie le
portoit à une autre occupation ; 6c fon
goût fe manifefta dans une occafion qui
fe préfenta peu de temps après.
I l fe forma un parti en Angleterre, qui
vouloit favoriferla Démocratie : ce qui
annonçoit de grands troubles. Notre Phi-
lofophe, qui prenoit beaucoup de part au
Gouvernement ,■ voulut les prévenir. I l
falloit pour cela éclairer le Peuple 6c faire
cefler la rumeur ; & H o b b e s . crut que
rien n’étoit plus propre à cette fin que la
traduction de Thucydide en Anglois , qui
contient les défordres & les confufîons du
Gouvernement Démocratique. Cette traduction
qui parut en 1 6 2 8 , lui fit un honneur
infini.
L ’année fuivante, H o b b e s vint en
France pour y accompagner un jeune
Seigneur A nglo is , nommé Clifton. I l s’attacha
pendant ce voyage à l’étude des
Mathématiques ; 6c il comprit que cette
fcience étoit très-propre pour découvrir
la vé r ité , en accoutumant l’efprit à une
folide méthode de raifonner 6c de prouver.
I l avoit alors 40 ans. C ’étoit fans
doute s’appliquer un peu tard à une fcience
qui ne captive guère un elprit formé.
Cependant le plaifîr qu’il prenoit à l’étudier
, lui fit furmonter les dégoûts des
* Vît a Hobbefii. Relation Æ Angl tterre , par Sorbiere.
Visionnaire de Bayle. Mem. o f the family of Cavendisch.
Visionnaire de Chauffepié. Brukcri Hijly ia critica Ph il.'
i °v a Ptemier > Pars dttr*' ( Cet Hiftorien a rapporté
la lifte de tons les, Ecrivains de la vie de Hobbes ) Et
fes ouvrages.
(«) C’eft le nom qu’on donna dans la nailfance du
ChriftianÜme à la Philofophie de Potamon d’Alexandrie
, laquelie coniîfte à emprunter de chaque Phi-
lofophe ce qu’il a dit de plusraifonnable.