fiter. A lle z verfé dans les Langues fa-
vantes , telles que le Latin , le Grec ,
l ’Hébreu , l ’Arabe , dec. Ton génie le
porta à l’étude des fciences. I l s’appliqua
aux Mathématiques, à la Phyfique de à
l ’Hiftoire naturelle. I l fît enfuite des recherches
fur les cultes idolâtres du pa-
ganifme, fur les opinions , les cérémonies,
la littérature des Juifs, fur l’hif-
toire de l ’établiffement du Chriftianifme,
dec. Son projet étoit de connoître toutes
les Religions, de de découvrir les. fon-
demens de la vraie.
En lifant les livres facrés, il conçut
l ’idée d’un poëme fur le but d’une partie
de l’Eccléfiaffe , ôc il s’amufa à fuivre
cette idée de à l’exécuter. I l en réfulta
un Ouvrage qu’il publia fous ce titre :
L e but d'une partie du Livre de VEcdé-
fia jîe , ou Poème fur les mouvemens- peu
raifonnables (pue les hommes> fe donnent pour
la pojfejfon des agrémens de la vie préfente,
C ’efi: une forte de recueil de penfées fur
le bonheur, oùW o l l a s t o n marque
tantôt ce à quoi l’on peut parvenir , ôc
tantôt ce à quoil’on peut atteindre. Dans
la partie négative, il cenfure principalement
l’ardëur & les foins immodérés des
hommes, à fe procurer les. avantages de
ee monde. Il parle de leur orgu eil, &
entre dans.le détail de ce qu’il y a de vain
dans leurs- travaux pour cette vie ,
de des inconvéniens qui les- accompagnent;
ôc il. prouve qu’ils n’en recueillent
aucun fruit, ou du moins, que des fruits
paffagers- & peu fatisfaifans. D ’où il conclut
, qu’il efl: déraifonnable dé rechercher
avec tant d’empreffement dès
Biens, de de s’attendre d’y trouver le
bonheur.
Quoique tout ce Poëme contienne une
Bonne morale , de que les vers ne foient
pas fans beauté , cependant ¥ ü l l a s -
t o n en fut dans la fuite fî, mécontent,
qu’il fit ce qu’il put pour en fupprimer
tes exemplaires. Son efprit occupé de
plus grands objets , regardoit comme
indigne de lui une production, dont l’ar-
mngement des mots, faifoit le principal;
mérite. I ln ’eftimoit plus que ce qui pou-
v o it rapprocher, fhonune. de. l’Ê tre fbprême,
de dédaignoit tout ce qui n’étoit
que fîmple amufement.
I l avoit compofé jadis une Grammaire
Latine. Cette Grammaire lui parut né -
ceflaire pour l’inftruétion de fa famille,
de il la fit imprimer en 170 3 . Cela fup-
pofe qu’il avoit des enfans. Ils étoient
même déjà en grand nombre ; car font
époufe lui en donna onze. Cette digne
compagne avec laquelle il vivo it dans la
plus parfaite union, de qui faifoit les douceurs
de fa v ie , n’eut pas la fatisfaélion
de voir élever fes enfans. Elle mourut le
2 1 Juillet de l’année 1720.
I l eft aile de juger de la douleur que
dut relfentir fou, époux à cette cruelle
féparation. I l appella la Philofophie à
fon fecours pour la tempérer. D ’ailleurs.
relpeétueux ôc fournis envers la Divinité ,
plein de réfîgnation à fa v o lo n té , il ne
murmura point fur fes décrets. Il fe dévoua
même pour le relie de fes jours à.
fon culte ; Ôc il conçut cet immortel O u vrage
, dans lequel il ànalyfe avec tant
de fublimité ôc de jullelfe fes droits fur
les coeurs des mortels : je veux dire fon
Ebauche de la Religion naturelle. Quoiqu’il
eût médité profondément fur le fi*«
jet qui èn étoit l’ob jet, & qu’il pût juger
du mérite de cette production ,..il n’ofa.
pas cependant la mettre au jour fans prêt-
fentir le fentiment des Savans. A cette
f in , il en publia en 17 2 2 une partie
dont il ne fît tirer qu’un très-petit nombre
9’exemplaires. L e fuccès de ce morceau
fûrpaffa fon attente. Il n’héfita plus
dès-loris à le finir. I l travailla pendant:
deux ans pour préparer une nouvelle^
édition ; mais il en avoit à peine revu &
corrigé les épreuves, qu’il eut le malheur
de fe ealTer un Bras. Cet accident-
lui occafionna une maladie , qui devint
d’autant plus dangereufé , que la foi-,
bleffe de fén tempérament né put eiv
fupporter les fuites. Ses infirmités augmentèrent,
ôc ilffuccomba le 25? Octobre
17 2 4 ., âgé de 65; ans. I l fit paroî—
tr e , dans les derniers momens de fa vie,,
la même fermeté , la même tranquillité^
d’è fp rit, Ôc la même foumiflïon aux ordres
de la Providence , qu’il avoit. eus-.
dans fa mauvalfè dedans là bonne fortune.
I l mourut comme il avoit v é cu , en Phi-
lofophe chrétien. Son corps fut inhumé à
Great-Finborough , l’une de fes Te r re s ,
-dans la Province de Suffolk. On lit fur
fa tombe une épitaphe latine compofée
par lui-même , dans laquelle il s’efl peint
avec la plus grande vérité, (a) J ’ai allez
fait connoître fon caraétere ; mais voici
quelques traits qui achèveront fon por-,
trait.
Quoique W o l l a s t o n fût affable
ôc communicatif, il n’aimoit point à fe répandre
dans le grand monde ; ôc il avoit
fur-tout beaucoup d’éloignement pour
les grandes fociétés. Afin de fatisfaire
fon goût pour la retraite ôc le recueillement
, il ne voyoit qu’un très-petit nombre
d’amis , avec lefquels il pouvoit fe
délafler agréablement, ôc goûter toutes
les douceurs d’ un commerce libre de fans
fard. L ’amour de la vérité qui le domi-
n oit, lui faifoit chérir la liberté depenfer
Ôc de dire naïvement fa penfée, perfuadé
que cela contribuent à découvrir l’erreur,
quoiqu’il n’ignorât pas que fa franchife
ne pouvoit manquer de lui faire des ennemis.
Audi étoit-ce par cette franchife
même de par fon grand fens qu’il fe dif-
tinguoit, plutôt que par des maniérés du
monde. Ami de la vérité dans la fpécu-
lation, il l’étoit aufli dans la pratique. I l
déteftoit toute efpece de diflïmulafion.
I l aimoit l’ordre de la régularité. Ses occupations
de fes divertiflemens avoient
chacun leur tou r; de fa famille de fes
amis étoient attentifs à ne point troubler
l ’arrangement qu’il avoit pris. En compagnie
, il étoit extrêmement gai de fe-
millant. I l fe faifoit un plaifir de faire
part de fes lumières aux autres , ce qui
rendoit fon commerce tout à la fois
utile ôc agréable. Les hommes favans
de vertueux le recherchoient avec em-
preffement, parce que les qualités de
fon efprit ôc de fon coeur fe répandoient
également fur ceux avec qui il étoit. I l
• (.*) Cette épitaphe cû un peu longue. On peut la
P*g- 7 Ji«
communiquoit fans réfervê fes connoif-
fànces, de il préfentoit en fa perfonnee
làns le vouloir , le modèle d’un véritable
homme de bien. L a douceur de la com-
paffion étoient chez lui des affeêlions naturelles.
I l fentoit vivement les miferes
du prochain, de il s’empreffoit à les fou-
lager. Souvent même il étoit plus touché
des maux d’autrui, que ceux même
qui fouffroient. C e caraélere d’humanité
le rendoit infiniment fenfible aux injuf-
tices, aux mauvais procédés, à l’indifférence
ou à l ’abandon de fes amis. Jamais
il ne fe permettoit de choquer perfonne.
I l n’étoit pourtant point fi doux ,
pour qu’il ne repouflat pas quelquefois
les paroles peu ménagées qu’on
pouvoit lui adrefier ; mais il falloit que le
cas fut grave , encore fe reprochoit-il
cette vivacité , quelque légitime ou né-
ceflaire qu’elle parût. Comme il s’étoit
accoutumé à méditer , il étoit plus
propre à la retraite qu’au commerce du
monde : ce n’étoit pas aufli ce qu’il re-
cherchoit. Peu jaloux de fe faire valoir
parmi les hommes, il évitoit toutes les
occafions de paroître. I l regardoit même
cette érudition apparente , qui procure
fouvent la réputation de doéle à fort bon
marché, comme une faufle fcience. Perfuadé
qu’on peut trop lire , il mettoit
une grande différence entre un homme
qui a beaucoup lu ( Helluo librorum ) de
un vrai favant. Enfin il travailla toute
fa vie à perfectionner fa raifon , en s’af-
franchiffant des préjugés , en tâchant
d’éclaircir fes idées, en obfervant l’étendue
de les ulàges des axiomes, la nature
de la force des conféquences, de la méthode
qu’on doit fuivre dans la recherche
de la vérité ; de il faifît avec em»
preflèment toutes les occafions d’établif
de de maintenir de la maniéré la plus fé-
rieufe Ôc la plus forte , l’exiftence de les
perfections de Dieu , fa providence tant
générale que particulière , l ’obligation
où nous fommes de l ’adorer, la confor-
>it dans le DiSicnmirt de M. Chuufepit, Tora. IV,
N ij