* D I S C
confiftoit en maximes , dont voici
les plus importantes.
1 . Il eft facile de devenir vertueux
, lorfqu on étudie ôt qu’on
réfléchit.
2. Il n’y a rien dans la v ie , dont
on ne puiffe venir à bout par le travail
, & qu’on ne puifle fe procurer.
Et les hommes qui l’ont négligé,
ont toujours vécu malheureufe-
ment.
3. Le travail apprend à méprifer
la volupté, & l’habitude' de la méprifer
, rend ce mépris très-agréable
.4
. Il faut attribuer plus de choies.
à la nature qu’a l’art»
y. Sans, la loi il n y auroit point
de fociété ; & fans un plein exercice
de cette loi , il n’y auroit
point de Citoyens, Car fans un bon
gouvernement, il n’y auroit point
d’E tat, ôt tout feroit- diffolu.
6. Il faut méprifer les diftinc-
tions ôt la vaine gloire, qui font
les: inftrumens ôt les pièges du
vice.
7. Il n’y a qu’une fociété ou
qu’une patrie dans le monde , c’eft
celle qui eft jufte ou gouvernée
par de Cages loix.
" 8. L e but de la Philofophie
( c’eft-k-dire de la Morale ). eft de
fe mettre au-deffus des chagrins &
des plaifirs.
O U R S
9. L ’avantage qu’on retire de
la Philofophie , c’eft d’être prêt à
tout événement.
10. Ceux-là font infenfés, qui
eftiment la vertu , la prêchent, ôt
ne la pratiquent pas.
Les fucceffeurs de Diogene adoptèrent
bien fes principes , mais ils
ne furent pas curieux d’imiter fa
conduite. Moins Philofophes que
lui, ils crurent que la fageffe pou-
voit s’allier avec les douceurs de la
vie. Platon même , fumommé le
divin, aux fatisfaêtions de l’étude ,
joignit les plaifirs desfens. Démo-
crite , qui vint enfuite , prétendit
que ces. plaifirs ne pouvoient point
former la félicité de l’homme. Il
foutint que le fouverain bien con-
fifte dans la tranquillité de l’elprit
ôt dans, l’amour de l’étude, & il fe
moqua, de ceux qui le cherchoient
ailleurspi-i':'
Ce précepte étoit fort vague.
Car qui eft-ce qui peut donner cette
tranquillité de l’efprit, ôt que faut-
il faire pour fe la procurer ? C’eft
ce que ne difoit pas Démocrite. Le
fameux Epicure voulut le favoit ôt
l’apprendre aux hommes. Livré à
fes réflexions, il découvrit ces maximes..
i°. Fuyez le tumulte des affaires
, ôt préférez: une heure de vie
bien ménagée aux flatteufes chi-
& ce qui eft eiïentiel, n’ayant pas lefou ? que ce Philofopiie croit prefqua dccrcpi ,
D ’ailleurs M. Bruker a prouvé folidement ■ lorfqufc Lais v in t à Corynthe. *
* J*cabi Bmktri HijioriatriiienBhilofofhid,
P R E L I M I N A I R E • xj
meres de 1 ambition. reux , qui naquit en Chypre, Ze~
2 . Cachez votre v ie , c’eft-k- non , entreprit d’oppofer une digue
dire , mettez vos foibleffes a cou- a ce débordement. Il comprit qu’il
vert des yeux du vulgaire. n étoit pas néceffaire de recom-
3°. Eviteq la douleur ôt toutes mander aux hommes la jouiffance
les fortes de peines. des plaifirs du corps ; qu’ils n’y
4°. Aux plaifirs délicats .de l’é- étoient que trop portés , ôtque fi
tude, mêlez les plaifirs vifs des fens. on ne les profcrivoit pas abfolu-
y°. Coupez le férieux de la mé- ment ces plaifirs, ils abforberoient
ditation par une converfation agréable.
Cette doctrine eft fans doute
celle du vrai Sage. Mais parce
quelle fait confifter le bonheur
dans la jouiffance des plaifirs, on
pèhfa qu’elle conduifoit à la volupté.
On décria même Epicure
comme un libertin , quoiqu’il ait
vécu peut-être plus auftérement
qu’aucun Philofophe. Il fe conten-
toit de pain ôt d’eau dans fes repas.
Et on trouve dans une de fes
Epîtres , qu’il prie un de fes amis
de lui envoyer un peu de fromage
chyteredien pour augmenter fon
ordinaire. Audi Saint Auguftin dit
qu’il eût préféré ce Philofophe à
tous les autres , s’il avoit cru l’ame
immortelle , ôt des récompenfes
ainfi que des fupplices dans l’autre
vie. (a)
L ’abus qu’on fit de la Morale
d Epicure , dégénéra bientôt en licence.
Un génie ferme & vigou-
(à) Epicurism accepturum fuijfe palmam
in animo meo , nifi ego credïdijfem pojl
mortem rejlare animx vitam Gr tracius
meritorum , quod Epicurus credere noLuit.
tout-à-fait les fatisfactions de l’efprit
, ôt rendroient l’homme mal-«
heureux. Rappellant la morale ôc
la vie de Diogene , il voulut encore
enchérir fur fon àuftérité. Il
fe condamna d’abord à ne manger
que des légumes ôt à ne boire que
de l ’eau. Il établit enfuite que le
Sage pouvoit bien attendre de Dieu
les;richeffes, la fanté ôt lesprolpé-
rités de là vie ; mais que du relie
c’étoit à lui de fe rendre vertueux,’
équitable,humain ; parce que, félon
Zenon >h, vertu n’eft jamais un
don du Ciel, (è) Il ajoutoit qu’un
Philofophe devoit être au-deflus
des pallions , ôt méprifer également
le plaifir ôt la douleur. Au
milieu des plus cruels tourmens ôt
dans le taureau même de Pha-
laris , il prétendoit qu’il ne fouf-
froit rien, ou du moins qu’il devoit
dire, que cela eft agréable, que je
ne foufire point ! Quant fuave ejl
hoc, quant hoc non euro ! Cette force
Conf. C . V I I . C . 16 .
(b) Hortæe a dit : Det vitam, det opes,
æquum mi animum ipfi parabo. L iv . I .
Ep. 18.
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