aifé de conclure que le Soleil doit paroître
fe mouvoir, quoiqu’il fbit immobile, dès
que la terre fe meut autour de lui. C ’étoit
suffi la. penfée de-l’Auteur : mais le mal*-
heur de Galilée (a) a voit fait de fi fortes
împrelfions fur fon efprit, qu’il craignoit
de s’expliquer ouvertement. Je fa i, dit-il,
que ceux. qui. foutienmnt le fentiment de C o pernic.,
expliquent fort Joüdeinent les endroits
de UEcriture, touchant le. repos de la. terre &
le repos■ du Soleil; mais voyant que des gent
qui ont-une grande autorité dans• L’Eglife leur
donnent un fens différentje. ne rougis pas de
les fuivre &' de captiver mon■ entendement en
cette occafion -, non que je compte leur décijion
comme un. art icle de fo i , mais je. le regarde
tomme, un grand, préjugée
Pendant qu’il vivoit ainfi dans le fond
de la Provence, abforbé dans l’étude de la
Philofophie, les Prélats de la Province
d Embrun fongeoient à. le faire nommer
Agent du Clergéi. Un Seigneur qui l’ai-
moit beaucoup ( le Comte d Alais) en fut
infirme, & fe donna , fans en être prié,,
tous les-.mouvemens néceffaires pour faire
réuffir cette affaire. I l en éerivit.à tous les
Evêques .de la. Provence;, leurfaifant valoir
le mérite;de celui pour qui il sfintérefî
fbit. Frefque tous promirent leur voix lors
de la nomination.,Cequ’il y a-de finguiier>.
o:eft que l ’Evêque de Digne, qui étoit plus-
à portée que tousles autres d’eftimer.notre
Pbilofophe, forma les,plus fortes oppofi-
tions. I l eft vrai qu’il eut le chagrin-de n’ê-,
tre pas écouté. G a s s e n d i eut prefque tou-î
tes les v o ix , quoique le neveu duPréfident
de l’Affemblée fût en concurrence avee-iui.
I l falloir encore faire agréer-cette nomina*
tion parPAfTemblée-du Ulergé deFrance ,
qui étoit.convoquée à Paris ; & le Comte
d’Alais craignant, les - brigues du neveu
du Préfident pour faire refufer- cet-agrément
, força noi rePhilofophe à partir pous
cette V ille , afin de prévenir-l’effet de fea
follicitations. L ’ Affemblée-fut transférée
a;Mante. GAs.sENi;ry-,alla. Dès le premier
jour, fon affaire fut propoféè. On. nomma
des Commiffaires du premier ôc dû fécond,
ordres pour l’examiner. Cet appareil, qui:
annonçoit des intrigues & des cabales, déplut
fi fort à G a s s e n d i ; qu’il céda fon droitr
à fon compétiteur, moyennant la fomme
de huit mille livres qui lui fut premife,
qu’il ne toucha jamais.-
Après eet accommodement, il revint à>
Paris r Ôc ne fongea-plus qu’à voir fes amis..
L e P. Merfenne fut fur-tout charmé de le
revoir.. I l étoit venu juftement dans le
temps que ce Minime oherchoit des Savans-
qui vouluffent propofer k Defcartes des obsédions
fur fès Méditations Métaphyfié
ques (b). Notre Philofophe s’exeufa d’abord
de ne pouvoir le faire. 11 donna pout
raifon de ce refus, que Defcartes dans fon:
Traité des. Météores avoit parlé des^ pa-
rhéliesfans daigner le citer, quoiqu’il n’eûtî
eu communication de ce phénomène que*,
par fon. canal. Le Pere Merfenne fît con—
noître-à Defcartes la faute qu’il avoit faite
de ne pas parler de G a s s e n d i -dans fon1-.
O uvrage; Ôc ce grand homme en convenant
de fon to r t, ne put s’empêcher d’ad-^-
mirer la modération qu’avoit eu notre Philofophe
de retenir fa-plainte pendant plus«
de trois ans. Celui-ci parut oublier- cette/
in a t te n t io n p o u r contentèr le Pere Mer~~
fenne, il travaiila à réfuterles Méditations ;
Métaphyfiquesv Il fe fou vint un peu dans-
là réfutation de l’oubli de Defcartes , malgré
l’efpèce de1 réparation qu’il en avoifr-
reçue:' Sa diffimulation étoit pourtant fï
âne.éc fi approchante de la mode-ftie, qu’il'
n’y eut prefque que Defcartes qui larecon—
nut. Ce grand hommey répondit. 11 loua lé “
ftyle.de l ’A uteurqui lui parut très-beau ÔC.
tres-agreàble, ÔC foutint qu'il a-voit cependant
moins employé les raifons d’un Phi*
lofophe pour réfuterles; opinions, que les'
artifices d’ûn Orateur pour lesdétruire. I l
fît enfuite parler l’e prit & la chair comme fî
e’étoient deux pèrfonnages qu’il eût voulu
introduire fur-la fcènei G a s s e n d i crut fë
reconnoître fous celui de la chair ; & quoique
Defcartes-le qualifiât de » parfait Phi*-
lay Galilée fët d<?ttuiu lbng-Mrmps drfns I<fs priions
dô-l'Iaqiiilîtiôri', pou* avoir fou tenu ce fentiment.-
Cta-Y suA-k, détail. dscette,.afFaire.dans.rJiiftoitc.de.
ce grand homme qu’-On trouvera dans la claffe der
Afathématiciens.
Lfc]. Voyez rHifloirc de JXeftanes, .qxiiJuiii., '
»lofophe, de perfonnage autant recom-
» mandable par l’intégrité de fes moeurs &
» la candeur de fon efprit, que par la pro-
» fondeur & la fubtiüté de fa- dodrine <*
qu’il lui alfurât » que fon amitié lui feroit
» très-chere, ôc qu’il tâcheroit de la méri-
» ter de plus en plus « ; quoique Defcartes ,
dis-je, fit ces proteftations, cette recon-
noilfance de là chair blefia beaucoup notre
Philofophe. De mauvais efprits voulurent
profiter de cette occafion pour l’aigrir contre
fon adverfaire ; mais il fé contenta de
s’en plaindre au Pere Merfenne. C e Minime
en fit part à Dfcartes,cpx\ fit une réponfe'
amère dont G a s s e n d i fut très-mécontent,
» Il me femble-, dit-rl', que M. G a s s e n d i
» feroit fort injufle, s’il s’offenfoit de la ré-
» ponfe que je lui ai faite ; car je n’ai eu'
» foin que de lui rendre la pareille, tant à
» fes complimens qu’à fes attaques, quoi-
» qu’il ait eu l ’avantage fur moi, en ce que
» j’ai toüjsurs oui dire que lé premier éoup
» en vaut toujours deux ; de' forte que
»quand je lui aurois rendu le double, je
» ne l’aurois que juftement payé. 11 fe peut
» faire qu’il foit touché de mes réponfes, à
» caufe qu’il y reconnoît la vérité ; mais-
» pour moi je ne l ’ai point été des bbj.ee-
» tions par une rai fnn contraire rfice la eft,
» ce n’eft pas par ma faute «. Notre Philo-
fophe trouva cette réponfe tout à la fois'
fîere & défobligeante. Il diffimula pourtant
la peine qu’elle lui faifoit, ôc attendit
un moment plus favorable pour s’expliquer
avec fon Auteur. Lamémoire de fon illuf
tre ami M.Peyrfc , qui lui'étoit fi chere,'-
diffipa fon chagrin. Il penfoit depuis fa'
mort à compofer la vie de ce grand M agi fi
trat ; & pour oublier c e tte petite altercation
, il fe-livra entièrement à ce travail.
Cette vie divifée en*.fix livres», parut etr
r.641 fôus lès au fprees du Com' e d’Alais;
©n y voit aveci plaifir I’êxpofition- du fa-
voir de M » Feyrefc-, de fon amour pour toutes
les belles connoifiances; de fon travail
infatigable pour le progrès dès Sciences
Sc dès Beaux A r ts , tStde fa libéraltté vrai-
mentroyale pourtous lesSavans. Cet Ouvrage,
fut univerfellemenr applaudi. L é
Chancélier S'egMier, qui le lût d’abord qu’il“
0irut.manda. detix fois .G a s s e n d i .chez^
lui pour lui en témoigner fa fatisfattion.
L e Prince de Condé le trouva fi beau, qu?il
voulut Voir fon Auteur pour le combler
d’eloges & de politeffes. Notre Philofophe
reçut ces complimens comme il le
d evoit, ôc tâcha de bien mériter de plus
en plus des humains par des produétions-
utiles;
I l travailloit depuis long-temps à la vie"
à’Epicure, à laquelle il vouloit joindre fon-
apologie ôc l’analyfe de fa doftrine ; ôc il-
avoit formé la réfolut'ion de finir enfin
cet Ouvrage, lorfqu’il apprit la mort d é
Galilée. Cette nouvelle affligeante lui rap-
pella que dans fon Traité de là-communication
du mouvement il avbit promis deux
lettres fur l ’accélération des graves dans;
leur chute. C ’étoit le développement de
la théorie de Galilée à ce fujet. LeRe&eur
du College des Jéfuites de Dijon, nommé-
le Pere Cayrê, attaqua cet Ouvrage, ôc
foutint que la dodrine que PAuteur adop--
‘-toit étoit établie fur un faux raifonnement.-
Notre Philofophe ne fut pas de cet avis.-
I l combattit avec force les attaques de ce*
Jéfuite, & foutint fans ménagement le
nTouvementdè là terre.Les preuves étoient*
convaincantes. Cependant- M. Morin
Profefieur de Mathématiques-au College--
R o y a l, en jugea autrement. Il fit une v i-
fite à G a s s e n d i ; ôc lui annonça qu’fl a llo if
a iâ campagne pour achever un Traire con--
tre le mouvement de là terre. L e Pere
Merfenne ôc quelques autresSavans qui fu-
rent infïruits- de- ce projet', voùlurent l’en-
faire défifter ; mais il prit leur confeil en
mauva'fè part-, Ôc fè brouilla avec- eux.
Notre PhiloGaphe'fut fur-tout enveloppé'-
dans cette difgrace, parce'que M. Morin
croyoit qu’il étoit le chef de fesadverfai-
res. C e futauffi à lui qu’il adreffa fes coups. -
I l publia fon Traité fous ce titre : Aloe tel-
lüris fràêlce ( Les ailes de là terre brifées ),-
dâns'leqael il parla de G a s s e n d i avec au- -
tant d’aigreur que d’impoliteffe. G a s s e n di
répondit à cet écrit par une lettre, qui |
eff la quatrième , qui compofé fon Traité
de là communication du mouvement. Il y
fait voir d’abord‘que AL Morin luidifoit:
des injures fans*aücune raï'on. Il examine-
enfuite-le flüx ôc le reflux de la mer} ôc