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160 NOUVEAUX VOYAGES AUX ISLES
1700.
Par qui
a fut
apporté
entrance.
. Sesdifftrens
ntms.
Pat qm
ila été
introduit
en
Italie.
C'eft le
mai âe
Inaptes,
Tes différents
enmatiere
de
Ssliñen
fût la même herbe, on ne laifla pas de
la nommer tantôt l'herbe à la R e ine , &
tantôt l'herbe au Grand Prieur i ce qui
n'empêcha pas ceux à qui l'Ambafladeur
N i c o t en avoit donné , de l'appeller par
reconnoiflance la Nicotiane.
L e Cardinal de Sainte Croix, qui
avoit été Nonce en Por tugal , & Nicolas
Tornaboni qui l'avoit été en France,
revenans de leurs Nonciatures l'apportèrent
en Italie, elle y fut d'abord connue
fous le nom d'hei be fainte, furnom que
les Efpagnols lui avoient donné à caule
des vertus extraordinaires qu'ils publioient
y avoir remarquées. Je ferois
pourtant aiTez porté à croire que les Efpagnols
, qui pofledoient bien avant ce
tems-là leRoyaume deNaples, l'avoient
fait connoître en Italie avant ces deux
Prélats j mais comme après le mal Ameriquain
qu'ils avoient apporté, & dont ils
avoient déjainfefté bien des païs,on craignoit
tout ce qu'ils apportoient du nouveau
monde , except é l'or & l'argenti il
n'avoit pas ftllu moins que le pouvoir
de ces deux Prélats, pour établir l'ulage
d'une chofe auffinouvelle, & qui avoit
déjà autant d'Adverfaires que de Partifans.
Car i lef tbondefçavoir, que le tabac
ne fut pas également bien reçû de tout
le monde. Cette plante fut comme une
pomme de difcorde , qui alluma une
guerre très-vive entre les fçavans. Les
ignorans en grand nombre y prirent parti
, aufli-bien que les fçavans , & les
femmes même qui ne furent pas des dernieres
à fe declarer pour ou contre une
chofe qu'elles ne connoiiToient pas mieux
que les affaires ferieufes, qui fe paiToient
encetems-là, oii elles n'avoient pris que
trop depart.
On peut croire que lesMedecins n'oublierent
pas de faire valoir en cette occafîon
le droit qu'ils fe font acquis de juger
de toutes chofes. Quoiqu'ils n'euflent
jamais vû, ni entendu parler de tabac,
ils ne laiiferent pas de difcourir fur fa
nature, fes proprietez & fes vertus,com- <
me s'il eût été connu par toute la terre
habitée dès le tems de Galien, d'Hipocrate
& d'Efculape. Il eft vrai, que raifonnans,
comme ils faifoient, fans principes,
ils ne s'accordoient prefque ja- (
mais. Les uns le faifoient froid, les au- D|i.
très chaud. Ceux-ciletemperoientavec
des drogues réfrigérantes i les autres cor- ^jj
rigeoientfa froideur avec des aromates, cîk
Mais tous s'accordoient en ce point de
donner force recettes 8c ordonnances fur
la maniéré de le préparer, & d'en ufer
felon l 'âge , les forces, 8c le temperament
des gens. Ils marquoient exaétement la
quantité qu'on en devoit prendre, & le
tems. Te le devoit prendre à jeun après
avoir craché 8c mouché un certain nombre
de fois : un autre ne s'en pouvoit
fervir qu'après avoir mangé. Celui-ci
n'en devoit ufer que le fojr, cet autre
qu'à midi. On l'accommodoit, on le
diverfifioit en une infinité de maniérés i
chaque jour produifoit quelque nouvelle
découverte, on le mettoit à toutes fortes
de faulces, 8c comme aiTez fouvent
les maladies n'ont point d'autre caufa
qu'une imî^ination bleifée, il eft prefque
incroïable combien les Medecins firent
de cures furprenantes fur ceux qui
avoient l'imagination frapée des vertus
du tabac. Celaalla fi loin, qu'on fut fur le
point d'abandonner tout le refte des medicamens,
pour ne plus fe fervir que de
cette plante -, 8c j e penfe que cela feroit
arrivé, iî ceux qui par leur caraélere ont
droit d'impofer à tout le monde avoient
été d'accord entr'eux.
Les Chimiftesremplirent leurs alembics
de tabac. On en tira de l'huile, du
f e l , de l'eau, desefprits. Se mille autres
femblables babiolles que l'on employa
Vertus
attñbuécs
au
tabac m
foudre.
, F R A N C O I S E S D
p l o y a én toutesfortes de maladies,le plus
fouvent aux dépens de ceux qui avoient
la bonté de fe prêter à ces fortes d'expcriencesi
6c malgré tout ce que pouy oient
dire les gens qui avoient confervé leur
raifon ailèz entiere pour ne fe pas laiiTer
prévenir pour ou contre le tabac avant
que le tems ou le hazard Feuifent fait
connoître plus à fond, on en fit une
Medecine prefque univerfelle.
Ses cendres, a ce qu'on di foi t , guenffoient
la gàle 8clefarçin. Etant pris en
5oudre, il guériifoit les rhumatifmes,
es fluxions fur les yeux , les larmes involontaires,
les douleurs de tête ordinaires,
les migraines, l'hidropifie, la
paralifie, Sc généralement tous les accidens
qui arrivent par l'acreté des humeurs
, leur trop grande abondance, 8c
leur extravafion hors de leurs canaux naturels.
R i en n'étoit meilleur pour rendre
au fang fa fluidité , regler Ion mouvement
8c fa circulation. On s'en fervoit
commed'unfternutatoireinfaillible,pour
rappellera la vie ceux qu'une apop exie
violente, ou une l'étargie formée avoient
déjà étendu dans le cercueil. C'étoit un
puiflant fecours pour les femmes q,ui
ctoient dans les douleurs de l'accouchement.
Un remede aifûré contre les paf-
Cons hifteriques, les vapeurs» les inquiétudes,
la mélancolie noire , la manie.
Ceux qui en ufoient n'avoient ricnj
à craindre de l'air le plus mauvais , 8c le
plus corrompu -, la p eñe , la verol le, le
pourpre, les maladies populaires qui fe
communiquent le plus aifémcnt, n'avoient
garde d'approcher d'eux. 11 fortifioit
la mémoire,, il rendoitTimagination
fecondëj jamaisles fçavans n'étoient
plus en état de s'appliquer àl'étudedes
chofes les plus abftraites , 8c les plus dif-,
ficiles, que quand ils avoient le nez bien
rempli de tabac.
Ceux qui en prenoient en machicatoifom.
I L • ' • . -
E L 'AMËRICtUE. 161
rc (car le tabac en poudre n'étoit pas le 170».
feul qui fût en ufage) en difoient bien
d'autres merveilles. Selon eux il fuffifoit
tout feul aux befoins les plus ordinaires ,
8c les plus preifans des hommes ; • puifqu'il
ôtoit le fentiraent de la faim 8c de vertus.
la foi f , qu'il empêchoit la diminution du tabat
des forces, 8c qju'ilconfervoittoutfcul,
& fans le fecours d'aucune autre chofe,
toute la fanté , 8c tout l'embonpoint
qu'on remarquoit dans k s perfonnes les
mieux nouries.
O n prétendoit avoir des experiences
rèïterées une infinité de fois dans prefque
tousles climats de la terre, qu'une
demie once de tabac de Z4. en 24. heures
, avoit foûtenu des Soldats iiins boire
ni manger,, dans les plus rudes travaux
de la guerre,, non pas-desjournées, mais
des femaines entières, iâns qu'ilseuifent
fenti les plus legeres atteintes de la faini
8c de la foif, « fans que leurs forces
cufl"ent é té diminuées le moins du monde.
R i e n , à les entendre, n'étoit plus propre
pour purger k bile,, tenir le ventre
l i b r e , décharger le cerveau des ferofitez
qui lui font fî nuifi^bles, empêcher ou
guérir les douleurs des d ent s , détourner
toutes fortes de fluxions. On n'y trouvoit
à redire , que la mauvaife odeur
dont l'haleine de ceux qui en ufoient
étoit infcétée, qu'il n'étoit pas poiTible
de corriger même en felavantla bouche
avec quantité d'eau-de-vie. ,
Mais ceux qui en difoient le plus de
b i e n , Scquienconfommoient auffi une
plus granxk quantité étoient les fumeurs.
O n publioit, que cette plante avoit;
été de tout tems en fi grande veneration
chez' les Açneriquairts, que c'étoit le
parfum 8cl'encens leplusagreable qu'ils
puiTent offrir à leurs Dieux. Leurs Prê- (yprérs^
très ne voyoient rien dans l'avenir qu'au ¿atives
travers d'une épaiflè furace de tabaCjdont
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