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3^0 NOUVEAUX VOY
1701. Le Comte deGennes fit ce qu'il pût
pour lui ôter la démangeailbn de faire
ceyoïage, en lui en reprefcntant l'inutil
i t é , & le befoin qu'il avoit de fa perfonne,
puifqu'ils étoient à la veille d'avoir
les ennemis fur les bras. Il y confentit
à l a f in, voïant que tous fes efforts
étoient inutiles, 8c qu'en cas de malheur,
on pourroit lui reprocher que s'il avoit
:iermis au Sieur de Château-vieux d'aler
chercherdufecours àla Martinique,
il auroit été en état de fauverfa Colonie.
C e Lieutenant de R o i paiTa à k Guadeloupe}
&comme dans cetems-Iàj'étoistoûjoursavec
le G ouv e rneur , pour
conduire les travaux, que l'on faifoit
pourladéfenfe de l 'Ifle, j'étois témoin
de l'étonnement oil tout le monde étoit
-du peu de diligence que faifoit cet Of f i -
cier, jufques-là meme, que le Maître
de la Barque qui le devoit pafTer à la
Martinique, vintprierM. Augerdeux
ou trois fois, de le faire embarquer,
ou de lui permettre de partir, parce que
cet homme l'empéchoit de faire fon
voïage avec la d iligence, qui étoit necefiiire
aux intérêts de fes Maîtres : de forte
que nous fçûmes plûtôt la prife de S.
Chriftophle, que l'arrivée de ce Lieutenant
de Roi à la Martinique.
Voici de quelle manière cette affaire
s'eil paiTée. Je n'y étois pas prefent, mais
j'en étois peu é loigné, & j e m'enfuis inilruit
à fond par les rapports de quantité
de perfonnes d'honneur & de mérité qui
y étoient, &qui n'avoientaucuninterêt
de déguifer la vérité 5 & par les pieces du
procès que l'on fit au Comt e deGennes
après la reddition de l'Ifle.
Les Anglois n'avoient pas attendu
des nouvelles certaines de la Declaration
d e l a G u e r r e , pour commencer àpiller
les François, & à leur enlever leurs Efclavesj
ils avoient raême coupé toute
A G E S AUX ISLES
la communication entre les Quartiers
François, en empêchant le pafl'agefur
leurs terres, 6c exerçoient par avance,
& impunément toutes fortes d'aftes
d'hoftilité. Ils reçûrent enfin avant nous
la Declaration de la Guerre, Se dès ce
moment, vis ne gardèrent plus du tout
demeilires. Ilsfçavoient l'état de nôtre
Colonie auffi-bien que nous mêmes, ôc
ils étoient aflûrez qu'elle ne devoit attendre
aucun fecours, ni de la Martinique,
ni des autres Ules, & que nous
n'avions aucun Vaiffeau de Guer re, qui
pût traverfer leurdeffein. Qiiant aux retranchemens
que l'on avoit faits autour
duBourg, &à laRavineGuillou, qui
étoit nôtre Frontière, ils y avoient paffé
trop de fois, pour n'en avoir pas remarqué
les mauvaifes façons, & la foibleffe,
Se la précaution qu'ils avoient prife,
d'empêcher la communication de nos
Quartiers, les mettoit en état de tout
ofer, 6c de tout entreprendre fans riea
rifquer.
L e Comte de Gennes n'ignoroit pas
les préparatifs que Jes Anglois faifoient
pour l'attaquer 3 & il voïoit clairement
qu'il lui feroit impoffible de foûtenir
leurs éforts , lui qui n'avoit en tout
qu'environ quatre centhommes y compris
lesHabitans de la pointe de Sable,
& les quatre Compagnies détachées de
la Marine, qui compofoient fa Garnifon.
Cependant commeileftnatureld'éloigner
le danger autant qu'il eftpoffible.
Se qu'en gagnant du tems, il pouvoir
recevoir quelque fecours inefperé,
il fit propofer au General des Anglois
l'obfervation des anciens concordats de
neutralité entre les deux Nations. Mais
les Anglois quifefentoientlesplusforts,
n'eurent garde d'y donner les mains ; au
contraire, le Sieur Chriftophle Codrington
General de leurs Illes fous le vent,
vint d'Antigues à S. Chriftophle,
y
170Í fnwi
F R A N C O I S E S D
y amena le refte du Regiment de Breseis,
dont il y avoit déjà quelques Compagnies
dans leur For t de la grande Rade
; il fut joint par unepartiedesMilices
d'Antigües Sc de Nieves, qui faifoient
près de douze cent hommes, fans ceux
des mêmes Mes , qui devoient débarquer
aux Salines, afin d'attaquer le Bourg
François des deux cotez en même-tems :
de forte que les T roupes Angloifes montoient
à plus de deux mille cinq cent
hommes.
On pourroit peut-être s'étonner que
je donne la qua ité de General des Ifles
ibus le Vent au Sieur de Codrington.
En voici la raifon, les Anglois ont trois
Gouverneurs généraux dans les Ifles qui
font fituées dans le Golphe du Mexique
, qui font tous trois indépendans les
uns des autres , à moins que quelqu'un
d'eux n'ait le titre de V i c e -Ro i , comme
cela eft arrivé quelquefois à celui delà
Jamaïque: car pour lors les deux autres
lui obé'ííTent.
L e plus ancien de ces trois Gouvernemens
généraux, eft celui des Ifles qui
font fous le Vent . On comprend fous ce
nom la partie Angloife de S.Chriftophle,
qui efl; leur premiere Colonie auffi-bien
qu'aux François, les Ifles de Nievis,ou
Nevis, Monfarrat, Antigües, la Barboude
, Panefbon autrement la grolTe
Vierge, & l'Anguille.
L e fécond par le rang d'ancienneté,efl
celui de la Barbade. Cette Ifle efl; au
Vent ou à l'Efl: de toutes les Antifles,
Quoiqu'elle étoit feule, SCque fon étendue
ne foit pas confiderable j fes richeffes,
fon grand trafic, &C le nombre de
fesHabitans, lui ont mérité l'honneur
d'avoir un Gouverneur general, quia
d'ordinaire fouslui unGouverneur particulier,
& des Commandans dans les
Villes 6c Bourgs qui font répandus dans
fon Ifle.
E L 'AMERIQ.UE. fj t
L e troifiéme efl: celui delà Jamaïque, i-ojil
dont lajurifdiction s'étendoit fur les Ifle s
de la Providence, & fur celle de S. Catherine,
avant que les Efpagnol s l'euffent
reprife fur les Anglois.
Cette lile efl: une des quatre grandes
du Golphe du Mexique. On lui donne
cinquante lieiies delong, 8c vingt cinq
de large, ce qui doit faire une circonférence
decent quarante à cent cinquante
lieiies. Les Anglois avoient fouvent
tenté de s'en emparer; fi on en croit
Jean de Laet , le Chevalier Antoine
Sherlei en prit une partie avec la Cap -
taleen ifi)6. qu'il abandonna auffi-tc t
après. Mais ce à ne paroît guéres vraifemblable,
à moins que cet Auteur n'ait
voulu infinuerfimplement, que les Anglois
s'étoient rendus maîtres dans une
irruption de quelque partie de cette Ifle,
qu'i s la pillerent, 8c l'abandonnèrent
auffi-tôt, n'étant pas en état de s'y maintenir,
comme nous fçavons que leChevalier
Françoi s Drack avoit pillé quelques
Villes fur les côtes de la mer du Sud en .
1579. Se même la Vi l l e de Por t -Ri c Capitale
de rifle du mênie nom en ifpf.
Car quoique ces Infulaires fefuffent établis
à la Vermude dès l'année i6i i . 8c à ^
la Nouve l l e Angleterre, qui fait une par- "
tie du Canada, quelques années auparavant
, il efl: certain qu'ils n'ont point eu
d'établiffemens dans les Ifles du Golphe
de Mexique que dans l'année 16x7. que
lehafard aïant conduit à l'Ifle S. Chriftrophle
le Capitaine Defnaubuc François,
8c le Capitaine O u vernard A nglois,
ces deux Nations s'y établirent, 8c
enfuite dans les Ifles voifines ; ce qui
donna enfin occafion aux Anglois de
penfer à des établiffemens plus confiderables,
Se à la conquête de la Jamaïque.
O n doit convenir qu'ils ont été excitez
à cette entreprife par le fameux
ApoÜat