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1700,
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des Efduv^
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près de trois mille hommes} & dix d'Infaritei
ie, qui faifoient cinq mille hommes
ou environ. Je fis femblanc de le
croire:^ carj'avois lieu d'en douter trèsfort
, à moins qu'ils ne miiTent fous les
armes leurs engagez, qui font en gran^d
nombre, mais fur lefquels il ne faudroit
pas beaucoup compter dans une occafion
parce que la plus grande partie font de
pauvres Irlandois enlevez par force ou
par furprife, qui gemifl'ent dans une dure
fervitude de fept ans ou de cinq pour le
moins , qu'on leur fait recommencer
quand elle eft finie, fous des prétextes
dont les Maîtres ont toûjours une provifion
toute prête, bien für s , tels qu'ils
puiflent être, que les Juges n'y trouveront
rien à redn e. De forte que G cette
Ifle étoit attaquée , les Maîtres n'auroient
pas peu d'affaires, puifque leurs
engagez tourneroient- infailliblement
contr'eux les armes qu'ils leurs auroient
mi-s à la main, & fe joind.roient à ceux
qui viendroient de dehors, quand ce ne
feroit que pour recouvrer leur liberté ,
fans parler de ce qu'ils auroient à craindre
de leur^ Negres.
L e nombre des Efclaves Negres qui
font dani cette Me , eft très-confiderable.
On me difoit qu'il y en avoit plus
de foixante mille. J'en doute encore
cependant fuivant ce que j'ai vu dans k
Baifeterre depuis le Pont jufqu' à Saint
Jean, & fuppofant qu'il y en aitautant
à proportion à la Cabefterre où j e n'ai
point été, je croi qu'il peut bien y en
avoir quarante mille ou environ, ce qui
eft un nombre exorbitant pour une lile
comme la Bai-bade, qui n'a tout au plus
que vingt-cinq à vingt-huit lieiies dç
circuit.
LesAnglois ménagent très-peu leurs
Negres j ils les nournlfoient trés-mal, la
plupart leurs donnent le Samedy pour
travailler pour leur compte ^ afin dç s'en-
A G E S AUX ISLES
tretenir de tous leurs befoins eux & leurs
iamilles. Leurs Commandeurs les pouflent
au travail à toute outrance, les battent
fans mifericorde pour la moindre
faute, & femblentfefouciermoinsdela
vie d 'unNegr e, que de celle d'un Cheval.
Il eft vrai, qu'ils les ont à très-bon
marche: car outre les Compagnies Angloifesqui
ont des Comptoirs fur les
Cotes d'Afrique qui en enlevent tous
les ans un nombre prodigieux qu'ils
tranfportent en Amérique, les Marchands
interloppesen apportent encore
beaucoup , qu'ils donnent à meilleur
marcTae que les Compagnies. Les Miniftres
ne les inftruifent, & ne les baptifent
point i on les regarde à peu prL
comme des bêtes à qui tout eft permis
pourvu qu'ils s'acquittent très-exaétement
de leur devoir. On fouiFre qu'ils
ayent plufieurs femmes , & qu'ils les
quittent quand il leur plaît} pourvu
qu'ilsfaiTent bien des enfans, qu'ils travaillent
beaucoup , & qu'ils ne foient
point malades, leurs Maîtres font contens,
& n'en demandent pas davantage.
On punit très-rigoureufemcnt les moindres
delobéilfances, & encore plus les
révoltés, ce qui n'empêche pas qu'il n'y
en arrive très-fouvent, parce que ces
malheureux fe voyant pouiTez à bout
plus fouvent par leurs Commandeurs
yvrognes, déraifonnables & barbares
que par leurs Maîtres, perdent à la fin
patience, s'aiTemblentjfejettcntfur ceux
qui les ont maltraitez, les déchirent, &
les mettent en pieces ^ & quoiqu'ils
foient ailûrez d'en être punis d'une maniéré
trcs-cruelle, ils croycnt avoir beaucoup
hit quand ils fe ibnt vengez de
leurs impitoyables boureaux. Cel t alors
que les Anglois courent aux armes, &
en font de grands mail^cres, ceux qui
fontpris&conduits en prifon font condamnez
à être paflez au moulin, brûlez
tout
m F R A N C O I S E S D
1700. tout vifs ou expofez dans des cages de
fer qui les ferrent, de maniéré qu'ils ne
peuvent faire aucun mouvement, &en
cet état on les attache à une branche d'arbre
où on les laiiFe périr de faim & de
rage. On appelle cela mettre un homme
au fcc.
J'avoue que ces fupplices ibnt cruels j
mais il faut prendre garde avant de condamner
les Habitansdesliles dequelque
Nation qu'ils foient, qu'ils font fouvent
contraints de pailér les bornes delà moderation
dans la punition deleurs Efclaves,
pour les intimider, leur imprimer
de la crainte & du refpeét, & s'empêcher
eux- mêm es d'être les viélimes de la
fureur de ces fortes de gens, qui étant
ordinairement dix contre un blanc, font
toûjours prêts à fe révolter, à tont entreprendre,
& à commettre les crimes les
plus horribles, pour fe mettre en liberté.
Quoique ces fanglantes executions nefe
faifent pas fi fouvent chez les François
que chez les Anglois, parce que nos
Efclaves ne font pas en fi grand nombre,
que la Religion dans laquelle on les éle-
KtatUfftment
des
ikisàU
forbade.
mains, & qu'on les traite d'ailleurs avec
plus dedouceur ôcde charité que les Anglois,^
il n'y a pas long-tems qu'on fut
obligé à la Martinique d'en faire deterribles
executions à caufe d'une révolté
prefque générale , qu'on ne prévint que
de quelques momens : tant il eft vrai, que
Îedefir de la liberté & dé la vengeance
eft toû jours le même chez tous les hommes,
Scies rend capables de tout entreprendre
pour fe fatiffaire.
On prétend que les Anglois ont découvert
la Baibade, & qu'ils s'y font
établis dès l'année l i a j . que ce fut un
de leurs Vaifieaux, qui revenant du Brefil
oil felon les apparences, il étoit allé
faire la courfe, fut pouffé par la tempête
fur la côté de cette I f l e , qui- ayant-fait
E L'AMERIQ^UE. 155-
rapport à fesMaîtres de fa découverte,
on y envoya auffi -tot une Colonie oui
y afaitl'établiiîement que l'on voit encore
aujourd'hui} mais j'ai peine à croire
qu'il foit fi ancien. Car il eft conftant
que celui des François & des Anglois à
Saint Chriftophle eft fans contredit le
premier que ces^ deux Nations ont en
dans le Golphe de Mexique, Sccependant
il n'a été fait qu'en lûzy. quelle
apparence y a-t-il que les Anglois ayant
fait ces deux établiiTemens en même-tems
fi éloigné l'un de l'autre, & qu'ayant
alors toutes les Mes à leur difpofition ,
ils ayent choifi, & fe foient placez dans
celles qui étoient les plus petites, qui
manquoient abiolument de Ports pour
retirer leurs Vaifleaux, pendant que les
François fe fontpoftez long-tems après
eux dans les plusgrandes, les meilleures,
les mieux fournies de bonnes eaux, & oîi
ils ont des Ports naturels, excellens, 8c
très-fûrs pour mettre leurs Navires en
fûreté dans les plusgrandes tempêtes.
Quoiqu'il en foit du tems de Fétabliffement
des Anglois à la Barbade, il
eft cenain que leur Colonie eft trèsriche
&très-florijfante, que toute l'Me
eft découverte, 'défrichée & cultivée,
& qu'il y a long-tems que les Forefts
dont elle étoit couverte font abbatuës
& confommées. On y a-fait autrefois
beaucoup de tabac. On a enfuite cultivé
legengembre & l'Indigo. Oh fait encore
du coton en quelques endroits, mais le
Sucre eft à prefent prefque l'unique chofe
à laquelle on s'attache. Le terrain, du
moins celui de la BaiTeterre que J'ai vu
d'un bout à rautre,eft extrêmement maigre,
fee & uic} on eft oblige de replanter
les Cannes au moins tous les deux
ans, fouvent mèmcàchaquecouppe, 6c
malgré ce travail elles auroient de la
pïine à venir dans beaucoup d'endroits
£ on ne fumoit pas la terre de forte
qu'il
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