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ao6 NOUVEAUX V O Y A G E S A U X ISLES
1701, parèrent du C anon, & de quelques munitions
qu'ils y trouvèrent, &fe mirent
à canoner la Forterelîe tant qu'ils eurent
des boulets & de la poudre. Mais ces
deux chofes venant à leur manquer, &
les Efpagnols ayant reçû dans le mêmetems
un fecoursconfiderable, ils furent
obligez de fe retirer après avoir p i l lé, &
fait Je dégât dans toute l'Ifle. Les deux
freres revinrent en France, & les Boucaniers
&Fhbui l iers retournèrent à leurs
exercices ordinaires de chaiTe & de courfe.
Ceci arriva fur la fin del'année 1(554.
De/crlp- L'Iiîe delà Tortue eft fituée au Nord
lionrie de Celle de Saint Domingue, dont elle
Viftede n'cft éloignée que de deux petites lieiies.
L . " " en a environ fix de longueur Ef t &
Oueft, ôcdeux dansfa plus grandelargeur
Nord & Sud. On lui a donné
le nom de Tortue, parce qu'on prétend
qu'étant regardée d'un certain
pointdevûë, elle a la figure de cet animal.
Je l'ai confiderée de bien des endroits
diffèrens, fans avoir pii découvrir
cette figurejil faut que je ne l'aye pas vû ë
du bon côté. Toute la partie qui eft au
Nord eft extrêmement Lnute, hachée,
cfcarpée,& environnée de rochers à fleur
d'eau, qui la rendent prefque inaceffible.
Il n'y a que les Canots conduits par
desgcnsbienexperimentez, &qui connoiiTent
parfaitement bien la côte qui y
puiiTent aborder. Le côté du Sud qui
regarde le N o r d de Saint Domingue, eft
plus uni, la longue montagne qui fait
le milieu & toute fa longueur del'Ifle,
s'abaiiTe infenfiblement, & laifle une
étendue de cinq à fix lieiies d'un trèsbeau
païs, où la terre quoique de différentes
efpeces, ne laifle pas d'être trèsbonne,
& de produire abondamment
tout ce qu'ion lui veut faire porter, comme
Tabac, Sucre, Indigo, Cotton,
Gengembre, Orangers, Citronniers,
Abricotiers, Avocats, Pois, Bananes
Mahis, autres choies propres à la 179J, li
nourrituredeshommes & des animaux,
& au commerce. Les arbres dont les
montagnes font couvertes, font d'une
grofleur & d'une beauté furprenante. On
y trouvoit autrefois quantité deCedres
qu'on appelle Acajous aux lilesdu Vent.
Les bois d'inde ou Lauriers aromatiques
y font communs & très-gros. 11 ya
des Sangliers ou Cochons marons,'&
dans la làifon des graines, & fur tout
de celles de bois d'inde, on y voit une
infinité de Ramiers, de Perroquets, de
Grives,& autres oifeaux. L a côte du Sud
eft très-poiiibnneufe. Le moiiillage eft
bon par toute la même côte, depuis la
pointe au Maçon, jufqu'à la vallée des
Efpagnolsjle meilleur endroit cependant
& qu'on appelle le Havre delà Tortue,
eft devant le Qiiartier de la Ballètene.
C'eft
une Baye aflez profonde, formée
par deux pointes ou langues de terre qui
avancent aifez en mer, fur l'une defquelles
il y avoit une bonne Batterie. Le
Bourg étoit au fond de cet enfoncement
fous la For teref lè, dont la grande Courtine
& les deux Baftions faifoient face à
la mer , & défendoient très-bien l'entrée
6c le mouillage de la Baye. Cette lile
quoique petite, auroit pû êtremife au
rang des meilleures que les François poffedent
à l'Amerique, fi elle avoit été
mieux pourvûë d'eau j maisil n'y avoit
aucune riviere, & les petits ruiiTeaux
qui fortent de quelques fources que l'on
trouve dans les pentes des montagnes,
font fi foibles, qu'ils fe perdent dans les
terres, & ne vont pas jufqu'à lamer: il
n'y a que la fource de la FortereiTe, qui
foit aflëz confiderable, pour conduire fes
eaux jufques-là ; les Habitans remedioientàce
défaut par des citernes, où
ils confer voient les eaux de pluye. On
comptoit fept Quartiers dans cette Ifle
lorfqu'elle étoit habitée. Celui qui étoki t
noi.
F R A N C O I S E S DE L'AMERIQ^UE. 207
le plus à l'Eft fe nommoit la pointe au les VaiiTeaux François, Angloi s&Hol - 1701.
Maçon, les autres étoient Cayonne, la Irndois, recommencèrent à frequenter la
Bafleterre , la Montagne, le R ing o t , le côte. Le Port du petit Goave fe rendit
Milplantage, & la Cabefterre. Ceder- fameux parle commerce des cuirs & du
nier qui éloit prefque auffi grand que tabac, & parce que les Flibuftiers y
tous les autres enfemble, n'étoit prefque amenoient es prifes qu'ils faifoient furpas
habité, parce quela mer y étoit trop les Efpagnols, ou fans tant deformalirude,
& l'embarquement trop difficile tez, comme ils les avoient faites fans orpour
charger les marchandifes, & que dre de perfonne ,ils ne demandoient auiH
leur tranfport à la Bafleterre au travers à perfonne l'adjudication, & la permifdes
montagnes, étoittroppenibleôc trop fion de les vendre. Leur nombre s'audanpreux.
^ _ gment ant , ils étendirent leurChafleÔc
Voila quelle etoitl Ifle de la T o r tue , leurs Boucans bien au-delà de la grande
cette motte de terre & de rochers, quia plaine de Leogane, Scdéfolerenttelletant
donne de peine aux Efpagnols, qui ment les Efpagnols, que pour fedébara
etc fi fouvent pnfe & reprife, & qui rafler des Boucaniers, ils fe mirent euxmêmes
à faire le dégât, & à tuer fans
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malgré fapetitclfe&fon peu de valeur,
doit être regardée comme la mere des
floriflantes Colonies que nous avons au
Cap, au Port-Paix, à Leogane, au petit
Goave, àrifleà Vache, &dansles
autres endroits qui dépendent de ceux
que je viens de nommer.
Cette Ifle doiit les Efpagnols connoifloient
l'importance, & qu'ils vouloient
fe confer ver en y mettant une Garnifon
confiderable, ne demeura cependant
pas long-tems entre leurs mains:
car quoique les Boucaniers & les Flibuftiers
euflent été contraints de leretirer
avec les fieursHotman fous la conduite
defquelsils avoient entrepris de la'
reprendre en 165-4. ils ne perdirent jamais
de vûë ce defliin > mais en atten
diftinârion toutes les bêtes, efperant
que nos igens ne trouvant plus de Cochons
marons pour fe nourrir, ni de
Boeufspourenavoirlescuirs, feroient à
la fin contraints d'abandonner le pais, 8c
de les laifler en repos. Mais cela produifit
un effet tout contraire. La diminution
de la Chafle augmenta le nombre
des Flibuftiers, & celui des Habitans :
de forte qu'au lieu que les Boucaniers ne
fongeoient prefque point à faire des établiflçmens
fixes, & qu'ils fe contentoient
de vivre au jour la journée, il y en eut
un bon nombre qui fe mirent à cultiver
l'Indigo ôcleTabac, pendant que leurs
compagnons alloient en courfe, enlevoient
tous les Bâtimens des Efpagnols,
dant qu il le prefentat quelque occafion ruïnoient entièrement leur comme°rce"&
Î Î f l'n- ' ilsallerent les tenoient dans des allarmescontinuel-
! chafler les Efpagnols qui etoient au petit les, à caufedes defcentes, & des pilla-
Goave, & s y ctablirem, de maniere que ges qu'ils faifoient tousles joursfur leurs
lans avoir de,.Fortereire m de chef, & Côtes.
vivant à peu près en Republique telle- Ce manege dura quatre ou cinq ans
ment libre, cjue chacun faiioit tout qui fans que Mrs. Hotman fuffenten ém de'
ui pla>foit, lis debufquerent peu à peu revenir prendre leur revanche, ni que
les EJaguol s de toute la partie de Mf l e , leBailly de Poincyfongeât à envoyer des
qui eft depuis les mmuagnes du grand Troupes capables de chafler les Efpa-
Goave jufqu au Cap Tiberon. Auffi-tôt gnols de la Tortue.
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^raniois
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Goave,
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