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76 NOUVEAUX VOYA
fièvre, fans diiTenterie, & avec .un trèsgrand
appétit.
J'ai toujours cru que ces deux vers
extraordinaires étoient l'effet de quelque
poîfon, foit qu'on me l'eût donné pour
me faire périr, foit que j e l'euiTe pris en
mangeant des fruits ou en goûtant des
racines dans les bois.
Je m'apperçûsdeuxjours après que je
rendois du fang, dont la quantité qui
s'augmentoit de jour en jour, faifoit
croître mon appétit. Cela fut caufe que
j e mangeai deux ou trois fois avec peu
d e difcretion, êc que ma diflenterie revînt.
Mais comme à la referve du fang
qui me faifoit quelque peine, elle ne
m'empêchoit plus d'agir, parce qu'elle
n'étoLt plus accompagnée de fièvre, je
me vis en état d'aller à la Baifeterre le z j
Avril, pour étreprefent à la lecture des
Patentes que nous avions reçues de Rome,
pour reconnoitre le Pere CabaiTon,
en qualité de Vicaire general de nôtre
Congregation, & de Préfet Apoftolique
de nos MiiHons.
Je demeurai dans nôtre Convent du
Moiiillage jufqu'au mois de Septembre,
que j e fus obligé de retourner au Fond
S . Jacques, pour défervir la Paroille
de S. Marie, qui manquoit de Curé.
Je m'occupai pendant cetems-la à conduire
nôtre Bâtiment. Ma maladie, &
la mort de deux de nos Maçons Franç
o i s , avoient été caufe qu'il étoit allé
fort lentement. Je le preiTai alors du
moins autant que mon mal le pouvoit
permettre: car il continuoit toûjours,
& il étoit caufé felon les apparences par
un ulcere que ces vers m'avoient fait dans
k s inteftins, qu'il n'étoit pas aifé de fermer.
O n m'obligea ou plûtôt on me contraignit
par force de prendre plufieurs
remedes, auffi inutiles, qu'ils étoient de
mauvais goût fans recevoir aucun foûlagement.
L e Sieur de la Mattiniere Medecin
G E S A U X ISLES
entretenu par le Roi , arriva de France
en ce tems-là, & apporta une partie
d'Ipecacuanha qu'il vouloit vendre auffi
cher, que ceux qui le firent connoître
les premiers en Europe.Nôt re Supérieur
vouloit abfolument que je prifle ce remede,
8c ne me donnoit point de repos
là-deifus, j'étois enfin prêt de ceder,
lorfque j'appris que la propriété de ce
fimple étoit de faire vomir : je vis bien
alors qu'il ne me convenoit point du
tout, de forte que je refufai abfolument
de le prendre, refolu de garder mon
mal , tant qu'il plairoit à Dieu avec
d'autant moins de peine que j e reifentois
peu de douleur, 8c que cela ne m'empêchoit
pas de vacqueur à mes affaires.
Cependant aïant appris qu'une certaine
femme de nôtre Paroiffe guériiîbit
infailliblement le flux de fang, je la fus '
trouver, & la priai de me donner fon
remede. Elle me fit faigner & purger, 6c
puis je commençai à le prendre. Je ne
doutai plus de ma guérifon, dès que j e
vis que mon eftomach ne le rejettoit
point. Cependantjelepris neufjoursde
fuite, fans qu'il produifît l'effet qu'il
avoit coûtume de produire le deux ou
troifiéme jour à tous ceux qui s'en étoient
fervis. Ma Medecine en parût étonnée,
& ne fçavoit à quoi attribuer ce manquement
de vertu j maisjelaraiîûrai en
lui difant que je me fentois beaucoup
mieux, & qu'il ne falloir pas s'allarmer,
parce que mon mal étant invétéré, il ne
falloir pass'étonner fi le remede ne produifoit
pas fon effet auffi promptement
qu'il avoit accoûtumé.
Je continuai donc à le prendre. Le
lendemain qui étoit le dixième jour , je
commençai à reffentir l'effet de fa bonté,
puifque j e ne fus point obligé de me lever
pendant la nuit comme je faifois ordinanement
cinq ou fix fois, & fouvent
bien davantage. Je fus enfin entièrement
guéri le douzième jour. Pour plus grande
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F R A N C O I S E S DE L 'AMERICIUE. 77
de fùreté, je continuai à le prendre, 6c lait, à un feu lent , & en Ics remuant
â garder le même regime encore fix
jours, ce qui me guérit fi parfaitement,
qu'un mois après j'étois méconnoiffablc
tant j'étois engraiffé.
Rmedt Ce remede confiftoit en [des raclures
^¿to/w-d'une plante qu'on appelle mahot-couhléfour
iin pour la diftinguer de plufieurs autres linge fin. Ces raclures ne changent point
plantes, qui portent le nom de coufin. la couleur du lait, £c ne lui donnent
U f l ^ Celle-ci approche beaucoup pour la fi- d'autre goût que celui que lui donneroic
defanz- gure de la feuille à celle du mahot or- un peu de farine de froment. Le Sucrc
dinaire dont j'ai parlé dans ma premiere
Partie,
fans ceffe ; elles fe diffolvent, 8c font à la
fin une eipece de bouillie. On y met iî
on veut un peu de Sucre 8c de Canelle,
qui n'y fervent de rien, mais auffi qui
n'y peuvent nuirej 8c on prend ce boiiillon
après qu'il a été coulé à travers un
1699.
Ipongieux, fouple, liant, foible8cprefque
J)ifcrip- dès qu'il eit parvenu à deux ou trois
tion du pieds de hauteur, il jette beaucoup de
tnahotcoufin.
branches qui s'entrelaffent dans les hailiers
8c la Canelle, quand on y en veut mettre
, ne fervent qu'à le rendre plus agréaplus
qu'elles font beaucoup
petites j le bois de cette plante elt ble. Je croi cependant qu'il vaut mieux
titesi le bois de cette plante eft
fponeieux, fouple, liant, foible 8c pref- s'en paffer, parceque Ie-Sucre8c la Canelle,
quoiqu'en petite quantité ne laiffent
pas d'échauffer, 8c c'eft ce qu'il faut
éviter fur toutes chofes dans ces fortes
de maladies.
On prend ce remede trois fois par
jour. Je le prenois de grand matin après
que j'avois dit la Meffe. Je mangeois
trois heures après l'avoir pris, mais feulement
des viandes rôties ou grillées,
fans potage, ni falade, ni fromage, ni
fruits, ni ragoûts, ou autre chofeoiiil
pût y avoir des épiceries. Trois heures
après ce repas je prenois le fécond boiiillon.
Au bout de trois ou quatre heures
je foupois comme j'avois dîné, Se j e
prenois le troifiéme en ii^.e mettant au lit.
C e remede très fimple, comme on voit,
aifè à prendre 8c fort îiouriilant m'a fi
bien guéri , que depuis ce tems-làjen'ai
incapable de fe foûtenir lui-même
où il croît ordinairement, fon écorceeft
verte, mince, 8caffezadherente
au bois qui eft gris. Cette plante produit
de petites fleurs jaunes compofées de
cinq feiiilies, au milieu defquelles naiffent
de petits boutons de la groffeur d'un pois
hérilTez de petits piquans crochus qui
s'attachent aux habits fi facilement, que
quand ils font meurs ils fe détachent de
leur branches au moindre fouffle de vent,
ou pour peu qu'on les touche, Scs'attachent
par tout.
Les racines de cette plante font en affez
grande quantité, elles font longues, à
peu près comme les cercifis, 8c de la
confiftence de celles de perfil ; ellespa- reflènti aucune attaque de diflenterie,
roiffent grifes lorfqu'on les tire de terre, ni de flux de fang.
mais dès quelles font lavées 8c nettoyées II y a une autre efpecede coufin dont Seconde
elles font fort blanches. Quand elles font toutes les hayes des Baffeterresdes Mes
en cet état, on les gratte ou racle dou- font remplies, qui a les feiîilies en maexcepté
CtmpofuiondH
cernent avec un couteau,jufqu'à ce qu'on niered'écuffons de lalargeur d'une piece
nmede. arrivé vers le Centre qui eft rude 8c de trente fols. Sa tige eft plus forte que
dur,comme celui d'une racine de perfil. celle dont je viens de parler, elles'éleve
On le jette comme inutile. On prend jufqu'à trois ou quatre pieds de hauteur
une bonne poignée de ces raclures que après quoi elle aabfohiment befoin d'ê-
1 on fait bouillir dans une çhopine de trefoûtenuë, auffi s'entrelafle-t-elle dans
K 3 tous