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F4 NOUVEAUX VOYAGES AUX ISLES
aux aecidens du feu qui peut s'allumer
dans les Cannes, ou pour d'autres be-
Rtfptä
^ueUs
iiißres
exigent
de leurs
fimma.
B'ißotre
fur et
fujtl.
foins, mais encore pour les empêcher de
courir chez les voilîns, & y commettre
quelque defordre. J'aimois mieux permettre
aux nôtres dedanfer toutes fortes
de danfes, excepté le calenda, que de
les laiflèr aller dehors. Je payois aflez
fouvent le violon, 8c je leur faifois donner
quelques pots d'Eau-de-Vie pour fe
divertir tous enfemble. Jecroi bien que.
malgré toutes mes précautions, ils danfoient
le calenda de toutes leurs forces,
lorfqu'ils ne craignoient pas d'être découverts.
Leur paifion pour cette danfe
eft au-delade l'imagination i les vieux,
les jeunes, ôc jufqu'aux enfans, qui a
peine fe peuvent foûtenir. Il femblc
qu'ils Payent danféc dans le ventre de
leurs meres.
Tous les Negres aiment à paroître, &
à être bien vêtus, fur tout quand ils vont
à l'Eglife, aux Mariages de leurs amis,
ou faire quelque vifite. Ils travaillent
encore davantage, & s'épargnent toutce
qu'ils peuvent, afin que leurs femmes &
leurs enfansfoient mieux habillez que les
autres. Cependant ilefl rare que-le mari
faffe manger fa femme avec lui, quelque
amitié qa'ilait pour elle. Ils fçavent fort
bien les faire fouvenir du refpeét qu'elles
leur doivest. Il n'y a que la jeunefle qui
danslecomjnencemcnt de leur mariage
dannemt unpeu plus de liberté aux femmes
, & maiagent quelquefois enfemble.
J'ai fbuvjent pris plaifîr à voir un Negr€
Charpentier de neire Maifon de la
Guadeloupe liorfqu'il dînoit. Sa femme
&fe&enians. étoient autour de lui, & le
iêrvoienc avec autaraî de refp«ét' que le$
domeftiques les raiieus inftruits fer\>€nt
l«jrMiaître)Ô£ fi c'éfoitanjoHi-deFête ou
de Dimanche, fes gendtes Sc fe» fiiles ne
manquoiem pae de trou*«j?> & de k i
apporter quelques petits prefens. Ils iài- «îj?,-
foient un cercle autour de lui, & l'en- '
tretenoient pendant qu'il mangeoit,
Lorfqu'il avoit fini, on lui apportoit ft
pipe, & pour lors il leur difoit gravement
allez manger vous autres. Ils lui
faifoient la reverence, &paflbient dans
une autre chambre, oèils alloientmanger
tous enfemble avec leur mere.
Je lui faifois quelquefois des reproches
de fa gravité, & lui citois l'exemple
du Gouverneur qui mangeoit tous les
jours avec fa femme} à quoi il me répondoit
que le Gouverneur n'en étoic pas
plus iage: qu'il croïoit bien que les blancs
avoient leurs raifons, mais qu'ils avoient
auffi les leurs j Se que fi on vouloit prendre
garde combien les femmes blanches
font orgüeilleufts & défobéïflantes à leufs
maris, onavoiieroit que les Negres qui
les tiennent toujours dans le refpeét &Ia
foûmiiîîon, font plus fages , & plus
expérimentez que es blancs fiir cet article.
J'ai déjà ^marqué que les Negres s'ài- Les
mentbeaucoup entr'eux, &qu"ilsfefe- gnsfont
courent volontiers les unslesautres. Cette
amitié paroît fur tout quand ils font p l i "
malades, & dure encore après leur mort, iturs
Si quelqu'un d'eux vient à mourir, foit
qu'il ait des païens ou non , tous les Negres
de l'Habitation le pleurent, ôcfont'"'"^ ''
des cris épouventables. Tous les amis &
compatriotes du déf unt ne manquent pas
de venir auffi-tôt qu'ils le peuvent faire,
& d'aller prier Dieu fur fa fofle, & s'ils
ont de l'argent, ou des volailles, ils les
portent attCurépour faire, dire des Meffes
pour ie defunt.
Lorfqu'il mouroit quelque Negrc'de
rtötEe Habitation, fes parens §c amis ne
raanquoknt pas de m'iipporter des vo*.
lailles: pour' faire dire des M:iïés. Je les
refuJbis, & je leur promettois dedirela
Melîè àleiar inientkmi', fan» prendre de
rc-
F R A N C O I S E S D
. 1698. retribution. Je m'aperçûs qu'ils étoient
Tenfée mécontens de mon procédé, & je fus
des m- averti qu'ils murmuroient hautement
gres fur contre moi, parce qu'ils croient que les
lutkV' prières pour les défunts ne leur profitent
des Mef- qu'autant qu'elles font payées. J'ai fait
f'?' en vain tout ce que j'ai pû, pour leur faire
perdre ces idées j il a fallu pour avoir la
paix recevoir les volailles qu'ils m'apportoient,
fauf à moi à prendre mon tems
pour les leur payer fous quelque prétexte
quand l'occafîon s'en prefenteroit. Je n'avoispas
le même fcrupule pour les Negres
qui n'étoient pas de nôtre Maifon :
car i leur égard, je me fouvenois bien
que celui qui fert à l'Autel, doit vivre
de l'Autel.
lis Ne- La plupart desNegres, pour peu qu'ils
^esfont foient accommodez, ne manquent pas de
hWde ™ ^ leurs parens, & à
j®"*"
cr les m- croyent chargez de cette obligation après
la mort de leur pere. S'ils meurent fans
»uent Ja'fler d'enfans,leurs parens,leurs amis, &
*presla fur tout leurs filleuls fe chargent de ce
mn de foin, 8c continiuent ce petit regal.Quand
urptre. leurs moyens ne fuffifentpàs, ils viennent
prier leurs Maître d'entrer dans une partie
de la dépenfe, en leur donnant quelque
bouteille d'Eau-de-Vie pour la fete.Pour
peu qu'on foie raifonnable, on ne leur
retufe pas ces bagatelles. Ils ne manquent
jamais d'y convier ceux que le défunt
avoit coûtume d'y appellef,{âns compter
tous ceux de l'Habitation qui ont droit
tajfens de s'y trouver, 8c qui pour l'ordinaire
bursfef- n'y viennent jamais les mains vuides.
tins des Après qu'ils font afîêmbkz ^ ceiuiqui les
a invitez leurs fait un petit difcours à la
loiiange de celui dont ils renouvelle la
féte: il leur dit, fes bonnes qualitez, il
exagere la perte qu'ils ont fiitc par fa
mort, &: conclut en les priant de fe fouvenir
de lui dans leurs prières, & de fe
joiiîdïe àluipoui-prier Dieu, pour le re-
Cornmen
E L^AMERICLUE. 55»
pos de fon aine. Alors ils fe mettent tous ïiîy^,
à genoux, Se recitent toutes les prieres
qu'ils fçavent y après ils mangent ce qui
eilapporté, & boivent à la famé du défunt.
Les Negres Aradaseftimenttoeaucoup ^es n»^
la chair de chien, & la préfèrent à toutes
les autres. Un feilin parmi eux feroit ^manient
i'egardécommètrès-mediocre,filaprin- lu chiens
cipale piece n'étoit pas un chien roti.
(¿uand ils n'en ont point, 8e qu'ils n'en
peuvent pas voler, i s donnent un cochon
deux fois auiîi gros pour en avoir un.
NosNegresCreolles n'en mangent point,
ceux mêmes qui defcendent de pere 8c
mere Aradas. Ils regardent comme une
grande injure d'être appeliez mangeurs
de chiens. J'ai vû plufieurs fois de ces
feftinsd'Aradas, où il y avoit un chien
roti. L'odeuren étoit bonne, 8cla chair
me paroiiToit très-délicate. J'ai eu foitventenvie
d'engoûter, la honteplûtôt
que la repugnance m'eiï a empêché. Je
fçai pourtant bien que dans une neceffité
preifante, jenemourrois pasdefaioe , fi
je trouvois des chiens.
Les Negres Aradas ne font pas les fèuls Sau^
qui mangent des chiens, la plûpartdes f^
Sauvages de Canada, au rapport des
voyageurs les regardent comme un mets auffi les
délicieux, 8c ce qui fait le plat d'honneur
de leurs feflins} de maniéré que quand
il eft tems de s'aiTeoir pour manger, le
maître du feftin dit tout haut,^ le ciiien
eil cuit : Se il me fèmble que dans la grande
Tartaric Se autres Pais qui en font
voifins on châtre les chiens pour les en;-
graiiîèr plus facilement, 8c les manger.
C'eft une chofe étonnante de voir comme
les chiens abboyent 8e pourfuivent '^''¿f"^
ces mangeurs de chiens, fur tout quand
ils fentent qu'ils en ont maiigé recem»- ceux, qui
ment. Dès qu'il y a un chien roti dans
une cafe,, on en eil bien-tôt averti : car
tous, les- chiens viennent heurler autour, bks,.
com.'