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376 NOUVEAUX VOY
blanc 6c bleu. G'eft-là dedans que l'on
trouve les grains du Cacao avec beaucoup
de duvet deffus, au nombre de 10
ou de If. On fait la recolte de ces épis
un peu avant la nouvelle lune, on les
ouvre avec un coûteau, & on retire le
fruit que l'on met fecher pendant trois
jours à l 'ombre, enfuite pendant trois
autres jours au foleil, après cela encore
à l'ombre, 8c puis au foleil, jufqu'à
c e qu'il foit bien fee. Ces arbrifleaux
ne rendent pas l'air bien fain. Ainfi
£nit la defcription du Cacao ôc du Cacaotier
du Sieur Careri -, elle eit courte,
mais elle renferme bien des fottifes j
il femble que cet Auteur ait voulu fe
rendre ridicule de gaieté de coeur, &
donner avis à tout le monde qu'on ne
doit point ajouter foi à fa rélation toute
enticre, puifqu'il a été capable de nous
decrire d'une maniere fi éloignée de la
v é r i t é , un arbre que plufieuri milliers
de perfonnes connoiflent fi parfaitement,
qu'il efb impoffible qu'on s'y trompe.
C ' e f t même aparament pour cela qu'on
a eu foin de mettre à la tête de fa defcription
la planche que l'on a copiée
fur celle de 'Hiftoire naturelle du Cacao
de Monf ieur de CailuSjOÎi cette prétendue
plante & fes épis font rcpréfentez
auiîi naturellement qu'ils font éloignez
de la defcription qu'en fait le Sieur Careri.
Les taiTes ou gobelets dont on fe fert
pour prendre le chocolat , lont de différentes
matières & de différentes figures.
Les plus ordinaires font de fayence fine
ou de porcelaine; quelques-unes ont des
foucoupes de la même matière où elles
s'emboitentj d'autres ont des foucoupes
ordinaires, & fe fervent fur des cabarets
de vernis de la Chine. On met quelquefois
le gobelet plein dans un autre iemblable
qui eft vuidc, pour éviter de fe
brûler en le tenant à la main. Oq fait
A G E S AUX ISLES
des gobelets d'or, d'argent & de vermeil j
mais ils ont cette incommodité de confervertrop
long-tems lachaleurduchocolat
dont on les a remplis} de maniéré
qu'il faut attendre qu'il foit prefque froid
avant de pouvoir porter le vafe à la
bouche; cequieft un inconvénient confidcrable,
parce que le chocolat veut
être pris le plus chaud qu'il eft poiTible,
& à plufieurs reprifes. Lesta/Tes ou gobelets
de fayence fine, ou de poi celaine
un peu épaifle me paroiiTent les plus
commodes.
Les Efpagnols, du moins ceux de
l'Amerique, fe fervent beaucoup de noix
de cocos coupées horifontalement au
tiers ou à la moitié de leur hauteur : ils y
font un bord, deux ances 8c un pied d'argent;
cela eft propre & répond aifez
bien au chocolat, puifquelataiTcquile
contient croît dans le même endroit que
le Cacao dont il eft compofé.
Les Indiens fe fervent de certaines ca-
Icbafles d'arbre qui n'ont pasplus de trois
à quatre poûces de diametre; ils les coupent
comme les cocos, dont je viens de
parler, & leur font un pied de la même
matiere. J'ai vû de ces taiTes , ou
pour parler le langage de l'Amerique,
de ces coiiis qui étoient très-propres ;
le dehors étoit taillé à l'Arabefque ,
& les hachures remplies de différentes
couleurs qui faifoient.un fort bon effet.
II y a certaines taiTes ou gobelets d'un
bois très-legcr, doublé & recouvert d'une
feiiille d'argent affez mince, qui me
paroiifcnt très-commodes; le chocolat
y conferve fa chaleur auffi long-tems
qu'il eft neceiTaire pour être pris comme
i faut, 6c le bois empêche que fa chaleur
ne fe communique trop violamentà
l'argent. On fait de ces gobelets à Paris
6c à Rome.
Jemefuistoûjours fervi du terme de
pren-
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D E L'AMÊRIQ^UÉ. 577
prendre le chocolat, quandj'ai parlé de
l'aftion que l'on fait en s'en nourriiTant;
parce qu'il cft le plus propre ôc, le plus
lîgnificatif pour exprimer cette aftion;
car on ne peut pas dire boire du chocolat,
comme on dit boire de l'eau 6c du vin;
on ne peut pas dire auiîî manger du cho-
combien ils ont fumé de bouts de tabac
en faifant ce chemin.
Les Efpagnols, ¿c à leur imitation
beaucoup d'autres nations, font des
moiiillettes, ou de petites tranches de
pain commun rôt i , ou du bifcuit fait exprès,
qu'ils trempent dans leur chocolat,
colat, lorfqu'il eft diiTous dans quelque 6c qu'ils mangent avant dele prendre,
liqueur. Il eft trop épais pour être bû. Cette méthode ne fçauroit être mau-
& trop clair pour être mangé j tout de vaife, fur tout , s'il cft vrai , comme ils
même qu'on ne dit pas boire un boùil- le prétendent , que les flegmes , les
Ion, ou une medecine. Ces raifons me cruditez 6c les autres impuretez qui
paroiflenifulïifantespourauthoriferl'u- font dans l 'ef tomach, s'attachent à ce
fage de dire, prendre ôc non pas boire pain, 6c que le chocolat les y trouk
chocolat. vant aiTembiées, les y confomme, ou
: A u refte je ne fais cette remarque les précipite plus facilement, ce qui n'eft
que pour inftruire, 6c poUr décrafler pasune petite vertu dans le chocolat,
un peu, s'il eft poiTible, les petits ha- lleftbon de fe tenir en repos pendant
bitans de S. Domingue 6c des Ifles du quelques momens après qu'on l'a pris,
V e n t , fur tout ceiix du quartier de, la parce qu'il excite une petitefueur, ou
rande Anc e de la Mart inique, qui di- une moiteur qui ouvre les pores, 6c qui
fent communément boire la chicolade,
au lieu de prendre le chocolat. Ils font
un ufage ii ordinaire du chocolat, de
norl^n l'eau de vie 6c du tabac, que ces trois
cr»)«/«-chofes leur fervent d'Horloges 6c de
mime- jj^gf^res itinéraires: de forte que fi on
r i « » l e u r demande à quelle heure ils font
/«¿;î<î«î partis d'un endroit, 6c quand ils font
arrivez, ils répondent fe fuis parti au
fait tranfpirer les humeurs mauvaifes ou
inutiles.
Il arrive encore prefque toûjours qu'on
a envie d'uriner quelques momens après
qu'on a pris le chocolat : c'eft une
marque certaine qu'il eft diurétique j à
quoi je dois ajoûter, qu'il cft rare que
les perfonnes qui en ufent foient relTerrées,
ou qu'elles foient attaquées de maux
coup d'eau de v i e , 6c j e fuis arrivé àla de tête, de vertiges Ôc d'obftruftions j
c h i c o l a d e ; c'eft-à-dire,qu'ilsfontpartis 6c pour faire voir la différence des effets
au point du jour , 6c qu'ils font arrivez
fur les huit hcuresdu matin, parce qu'ils
prennent de l'eau de vie immanquablement
tous les matins au point du jour,
& le chocolat fur les huit heures ; 6c
lorfqu'on veut fçavoir d'eux la diftance
d'un lieu à un autre, ils difent il y a
qu'il produit étant Amplement compofé
de Cacao; de fucre 6c d'un peu de
canclle, ou de toutes ces drogues chaudes
que les Efpagnols y mettent en quantité
6c fans di fcret ion, il ne faut qu'obferver
que ceux qui ufent de ce dernier
chocolat, deviennent à la fin maigres
deux bouts de tabac, ou trois bouts de . 6cdeiréchez; au lieu que ceux qui fe
tabac, c'eft-à-dire, qu'on emploie le - fervent du premier font prefque toû
tems de fumer deux ou trois bouts de tabac,
en allant de ce lieu-là à l'autre,
parce que leur coûtume étant de fumer
toûjours en marchant , ils otit remarqué
jours gras, d'une chair ferme 6c fans
être jamais fujets aux infirmitez qui
viennent d'une trop grande chaleur d'entrailles.
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