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20i NOUVEAUX- VOYAGES AUX ISLES
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I7C0. Enfin Iç nombre de ces Chaileurs ou
Boucaniers,; s'étant beaucoup augment
é , quelques-uns jugèrent à propos de
le retirer fur i'Ifle de la Tortue, afin
J'avoir une retraite au cas qu'ils viniTent
àêtre pouileztrop vivement parles Efpagnols.
Et auffi afin que leurs Magalîns
de cuirs & autres marchandifes fuf-;
fent en fûreté.Plufieurs d'entr'eux fe mirent
à défricher cette lile défertefic inhabitée,
& y plantèrent du tabac, dont
ilsfaifoient un negoce d'autant pjuscon^
fiderable avec les Vaiileaux qui venoieni:-
trafiquer avec eux, que ce tabac étoit
exquis, & égaloitceluide Verine, qui
eftieplusexcellent. Cette marchandife,
& cette retraite, qui paroiffoit aflez affûrée,
aïant encore augmenté confiderablement
le nombre des Boucaniers,
fit craindre aux Efpagnols qu'ils ne les
chaiTaiTentenfinentierementdelagrande
terre, c'eft ainfi qu'on nomme S. Domingue,
par rapport à Tlfle de la Tor -
tue; de forte que l'Admirai de l'armée
navale d'Efpagne eut ordre de détruire
cette retraite des Boucaniers , qu'ils
appelloient des voleurs, & delespaiTer
tous au fil de l'épée. C'eft ce qu'i exe-"
euta en 1658. Comme ilsn'avoient encore
à la Tor tue ni FortereiTe, ni Gouvernement
réglé, il fut facile à cet Admirai,
qui avoit des Troupes nombreufes
& aguerries, defurprendredesgens
Tans Chef, écartez les uns des autres
^Jji ra- dans les défrichez qu'ils avoient faits dans
j'jfie^ & dont le plus grand nombre, les
plus braves, & les plus aguerris étoient
à la grande terre occupez à la ChaiTe, Se
à faire fccher leurs cuirs j tout cela donna
un avantage fi confiderable aux Efpagnols
fur ceux qui étoient reliez dans
l'Ifle de la T o r t u e , qu'ils firent un maffacre
général de tous ceux qui tombèrent
entre leurs mains, & eurent encore la
cruauté de faire pendre contre le droit
les Efpagnols
prprennent
Ja
Tortue
des gens ceux qui vinrent implorer leur j,..
mifericorde, en offrant de fe retirer en
Europe. Ces maniérés inhumaines qui
furent fçûës de ceux qui reftoient, es
obligèrent de fe retirer dans les lieux
du plus difficile accès, & des'y tenir cachez;
& lorfque les Efpagnols après
avoir fait le dégât par tout oii ils pûrent
pénétrer, fe furent retirez, ceux qui s'étoient
fauvez paiferent à la grande terre,
cherchèrent leurs compagnons, & s'étant
raiTemblez au nombre de trois cent,
i*ls retournèrent à la T o r t u e , où ils choifirent'pour
leur Chef un Anglois, qui
faifoiî depuis long-tems le métier de
Boucani er, en qui ils avoient remarqué
de la pi udence, & de la valeur.
Cependant leCommandeurdePoincy
étant arrivé à S. Chrillophle au mois
de Février 1639. avec la qualité de Lieutenant
General de toutes les Mes de l'Amérique,
fut averti de ce qui fe paiToit
à h Tortue. Il crut que cette occafion
lui yenoit tout-à-propos pour fe débarraiîèr
d'un de fes compagnons de fortune,
quiravoitfuiviàS.Chriftopble. Il ze sk
s'appelloit le Sieur le VaiTeur homme^i^""
d'efprit, entreprenant, & fort brave ; ""
mais comme il étoit Huguenot , &des ^JI
plus zelez pour fa Sede, il ne conve- krm
noit guéres à un Chevalier de Malte de
l'avoir pour ami 5c pour confeil. Il lui
propofa donc de lui donner le Gouvernement
delaTortuë, &: des'aflbcier avec
lui, pour faire un établilTement, & un
commerce confiderable,dont ilspartageroient
le profit: Le Pere du Tertre mon
Confrere, rapporte tout au long les articles
de leur traité à la fin de la premiere
Partie de fonHilloirepag. fS}?. dont
le premier étoit la liberté de confciencc
pour les deux Religions. Cetendroit qui
nefaifoit pas honneur au Commandeur
de Poincy étoit direfteinent oppofé aux
Ordonnances du Roi, pour l'établifîeluent
F R A N C O I S E S DE L'AMERIQ_UE. . 203
jjoo, ment de la Compagnie des Ifles de l'A- qu'on nomma dans la fuite le Fort de la 170*.
meriquedumoisdeFévrier lôj f . les au- Roche, ou le refuge de la Tortue,
trts articles ne regardoient que leurs in- Cet afile & le magafin que ces deux
terêts particuliers. Ce traité eft du z Meffieurs Aflbciez établirent dans le
Novembre 1641. Bourg, qui étoit au pied de la Roche,
Le Sieur le VaiTeur partit auffi-tôt de toujours tîien rempli de vin, d'eau-de-
S.Chriftophle dans une Barque, qui fut vie, detoiles, d'armes, de munitioris,
achetée, Scarméeauxdépensdelafocie- & autres marchandifes, y attira bien-tôt
t é , & arriva au Port Margot dans rifle tous les Boucaniers, dont le nombre
S. Domingue, éloigné d'environ fept augmentoitàvûëd'oeil,'&parune fuite
lieiies de laTortuë. Il amaiTa en cet en- neceflaire, les dégâts qu'ils faifoiefit fur
droit foixante Boucaniers François,qu'iI les terres des Efpagnols croiflbient de
joignit aux quarante-cinq ou cinquanp plusenpius. Cela obligea le Prefident de
S, Domingue, de lever fix cent Soldats
avec un bon nombre de Matelots, qu'il
mitiurfix Vaiifeaux, & qu'il envoya à
t a t , il alla mouiller à la Torcuë, Seen- h Tortue pour détruire entièrement
t-Î
hommes qu'i" avoit amenez avec lui de
S. Chriftophle, qui étant de fa Religion,
avoient été ravis de le fuivre. En ceté-
^ /i T r - n - • t' w u . vj^Liuui. tlJULICUieUC
voya dire a 1 Angloisnomme Wi lhsqui l'EtabliiTement des François. CesBâtiycommandoit,
qu'il eijt à fortir fur le mens s'étant préfentezauPortdelaTor - -
champ de l'Ifle avec ceux de fa Nation, tuë, furent canonez fi vivement qu'ils
ou autrement il alloit venger fur eux la furent contraints d'aller mouiller deux
mort de quelques François qu'ils avoient lieiies fous le vent , en un endroit qu'on
airaffinez. Les François qui étoient mê- nomma depuis, l'Ance de la Plaine des
lez avec les Anglois, aïant pris les ar- Efpagnols. Ils y débarquèrent leurs trou- EÎ
mes dans l'inftant, & s'etant jointsàla pes&vinrent attaquer la Forterefle avec
troupe du Sieur le VaiTeur, les Anglois une extrême vigueur: mais le Sieur Je
furent fi confternez qu'ils s'embarque- VaiTeurlesreçût&lesrepoufTaavectant
rent auf^tôt , & laiilërçnt les François de fermeté & de bravoure, qu'aprè. en v X ^
en polleliion de l'Ifle. avoir tué u^e bonne partie, il contraignit
Le Sieur le Vaflëur aïant prefenté la le refte de s'enfuir- du côté de leurs Bâ-
Commiffion qu'il avoit de M. de Poin- timens,8cde fe rembarquer eh confufion
cy, fut reconnu pour Gouverneur, & abandonnant leurs morts, leursbleflez '
s'apphquaaufli-tôtàconftruireuneFor- & tout l'attirail qu'ils avoient mis â
terefle qui le mî t , lui, lesHabitans, & L.eci arriva au mois de Janvier
leurs biens hors d'infulte, & en état de
refifter aux Anglois, s'il leur prenoit fantaifie
de revenir, & aux Efpagnols s'ils
vouloient les inquiéter, &leschaflerde
ce pofte : il trouva un endroit fort commode,
& fort aifé à fortifier, inaceffible
du côté dç la rade qu'il défendoit trèsbien
, §c tellement couvert & environné
terre.
i64f.
Jufques alors le Sieur le V aiTeur avoit
)aru fort moderé, & il avoit traité fes
íabitans áH?ec bèaUcobp'de doUCeur &
d'honnêteté; mais cette viSoire l'enfla
tellement,:quîil devint toüt d'un coup
niéconnoiflable. Il crut que rien ne lui
pouvoit refiiler , & que les mefures
deprecipices.&deboisepais, & impra- qu'il avoitgardces j(u.„fq^uuecsn ailuorrss aavveecc fleess
ticables du cote de la terre, qu'il le ju-, Habitans & les Boucamers de la Côt e "
geaunpenetrable dececoté-là. Ç'elt c>e, o'etoioii plus-de faifon, -Il devimcruel
jufqu'à
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