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4ÇÔ NOUVEAUX VOY
que pas du refte du bois, qui efl: d'une
couleur d'ceil de perdrix, avec des taches
brunes, en maniere de volutes ou
d'yeux de diflFerentes teintes. Ce bois eft
compaft, il a le grain fin, 8c prend un
fort beau poli, foit qu'on le travaille
au tour, ou en tables ; i 1 eft pefant quand
il eft verd, parce qu'il eft alors rempli
d'un fuc hui eux & amer, qui le conferve
de la pourriture. Se des poux de
boisj mais quand il eft fee, il devient
d'un poids raifonnable, & proportionné
à fon volume. Lafeiiille decetarbre eft
petite, étroite, rude Se calfante ; il ne
p o i f que dans des lieux fees 6c arides i
il eft rare d'en trouver dans les bonnes
terres. Ces chaifes me coutoient deux
ecus la piece. Se cen'étoitpas trop eu
égard au bois qui eft rare, 6c par confequent
fortcher, Se à la main de l'ouvrier.
Mm» de. Le bois de rofes me fait fouvenir que
fleurir J«Rofiers quc l'on a apporté d'Europe
UsRofa. auxifles, portent des fleurs toute l'année,
pourvû qu'on ait foin d'en battre
les branches à coups de bâton quatre ou
cinq fois par an. Ce n'eft pourtant pas à
dire qu'il faille rompre es branches,
mais feulementles meurtrir, Se entamer
ou écorcher un peu la peau i fans cette
précaution, ils ne portent que pendant
trois ou quatre mois, commeenEuroge.
Ce fait eft conftant} je le rapporte
ici, pour exercer un peu Meffieurs les
Fleuriftes, Se autres gens defceuvrez.
L e I o du mois de Décembre nous eûmes
une allarme aflez chaude à la Martinique.
Nous étions avertis depuis deux
'jillarmc
à la
Martinique
jours qu'il étoit arrivé une groife efcadreàla
Barbade. Sur cet avis M. le Général
avoit fait partir quelques Corfaires
pour en avoir des nouvelles plus certaines.
Un de ces Corfaires revint le matin
du 10 Se rapporta que la Flotte ennemie
le fuivoit. Se qu'il avoit etéchaifé
fi vivement par une Fregate, qu'il n'a-
AGES AUX ISLES
voit pas eu le loifir d'examiner, ni de
compter les bâtimens. Son rapport fc
trouva vrai, toute la Flotte ennemie
parut aux Ances d'Arlet deux heures
après fon arrivée, & s'avança en bon
ordre jufqu'à la portée du canon du
b ort-Roial. On compta vingt-deux gros
vailTeaux de guerre, autant de bâtimens
de charge ou Marchands, dix-fept barques
, fix Galliotes, Se quelques doubles
Chaloupes. On peut juger de l'embarras
où fe trouva à cette vûc nôtre Général
, Se comment il fe feroit tiré d'affaires
fi cette Flotte avoit eu quatre ou
cinq mille hommes àjetter à terre. H
étoit pris fans verd, Se nous auiTi $ Se le
Fort-Roïal auroit couru grand rifquei
d'être enlevé, ou le Fort S. Pierre pillé
& brûlé. On donna l'allarme par toute
r i f l e , on prit les armes; mais tout cela -
auroit été inutile. Se on n'auroit jamais
pû s'aflembler aflez à tems, fi la Flotte
ennemie avoit eu envie de faire une defcente.
Heurcufpmentcen'étoit pas fon
deifeini elle continua fa route en rafant U
Côte de fort près. Quelques-unes defct
Chaloupes firent defcente en un lieu appellé
le Fond Laillet, où elles firent un
prifonnier, Se dans une autre Ance voifine
elles pillèrent Se brûlerent quelques
maiions. Se enlevèrent une barque chargée
de Sucre.
Cette Flotte parut fur les deux heures
après midi devant le Fort S. Pierre, à
une bonne portée de canon, faifant peu
de voilej on la perdit devûë peudanc
la nuit. Je croi qu'elle n'étoit venu eque
pour fe faire voir, intriguer nos Officiers,
Se donner de l'exercice à nosTroupes.
M. le Général la fuivit avec ce qu'il
put ramaflcr de Cavaliers à la hâte, Sc
arriva fur le foir au Fort S. Pierre. Je ne
manquai pas de l'aller faluer aufli-tôt,
Se de le complimenter fur la diligence
qu'il avoit fait pour venir s'oppofer aux
eonemis. Il reçut fqrt gracieufement
mon
rro^i
F R A N C O I S E S DE L'AMERIQ^UE. 46 7
moncomplimenti&merenditmavifite tai qu'il y avoit là-delTus quelque chofe 1704.-
des le lendemain i l ] vit tout notre nou- de nouveau} Se en effet j'appris quelques
veau bâtiment, Se exami^na le plan des jours après, que ce b6n Prêtre s'étoit
Ä ' n ^'nbarqucprécipitament,furl'avisqu'on
méditions de faire pour le perfca,onner. me dit qu'il avoit eu, qu'il y avoit ordre
J e lui dis que nous avions d-ipoié l'ap- deiaCourdeJ'arrêter, &de luifairefo^ ^
partementdu rezdechaulfeed'une ma- procès. Celal'auroitLt intrigué- car
^ - C e r t i f i c a t l e c o n v a i n q u o i Î S i r S
Î r a-? ' L " clandeitin , \ c qui l'auroic
coupdhonnetctez,Sc meparlaenfuite conduit à droiture aux Ga^es.
del'afFairedefonAumônier. Jemedou- ^''iwc!,.
c H A P I T R E XIIL
foUge de V Auteur klaGuaddou^e-Jesdwerfesavantures. Combat naval '
gE Vendredi fécond jour de
l>nnée i j o f . j'allai avec nôtre
Supérieur Général au
Fort-Roïal faire les complimens
ordinaires au Gouverneur Général.
Quoiqu'il eut encore fur le coeur le départ
de fon Aumônier, auquel il nous
foupçonnoit d'avoir contribué, en donnant
avisen Cour de fa malverfation ,
ilnejlaifl'a pas de nous bien recevoir.
Après quelques momens de converfation,
il nous fit entrer dans fon cabinet
& nous mit en main une nouvelle difpenfe
que le Sieur Grefiier avoit obtenu j
nous la lûmesi 6cquoiqu'c]le ne fut pas
tout-à-fait comme nous la defirions,nous
refolûmes de nous en contenrer,d'autant
qu'aiant fait confulter l'affaire enFrance
on nous avoit mandé-que l'ufage de Ig
Cour de Rome n'étoit pas de ipecifier
tout-à-fait dans lesBrefs les termes desSu.
phques.LeSuperieurGénéraldenosMiffions
dit àM.leGénérai qua fa confiderationilpafleroit
par deflùs quelques circonftances
qui manquoient, Se que pour
terminerl'aff^aire plus promptement Se
épargner aux prétendus mariez la peine
de venir a la Martinique, il m'envoiroit
a la Guadeloupe com me fon Commiflaire,
pour faire les information», Sc don-
"aIÌ'Ì' difHnitive. Cela fitplaifir
aM ]cGencral,il me fit beaucoup d'honnetctez,
Se me dit de lui écrire quand je
fcrois prêt à partir, afin qu'il donna ordre
a quelqu'un de nos Corfaires de m'y
tranfporter. Quoique je n'cuiTe pas beloin
de fa recommandation pour cela ,
puifque tous nos Capitaines Flibuftiers
etoient de mes amis,je ne laiflai pas de recevoir,
comme je devois, l'honnêteté
qu il me faifoit. Se de lui dire que ie
ferois en état de partir immediatèmenc
après le jour des Rois, aiant feulement
bdom de trois ou quatre jours, pour aller
donner les ordres necefl-aires à notre
habitaaon du Fond S. Jaques. II s'informa
aufli-tot s'il y avoit quelque corihirc
prêta partir, &aïant fçuque lecapitaine
Damel fe difpofoit à mettre dehors.
Il lui envoia ordre de m'attendre. Sede
me portera la Guadeloupe. Nous nous
J^F'-ames fort contens les uns des au-
J c partis le lendemain pour le Fond
Saint
If - T