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1701.
Tiipari
de lEßtrn.
tei Ca'tirnkes
i f S NOUVEAUX VOY
Se il le faifoit dè ¡telle forte, qu'il ne
vouloit point d'aflbcié. Et pour le fécond
, il écrivit efi Efpagne çar le même
VailTeau qui l'avoit porté à Cartagéne,
pour defnander fon congé, fçadiant
foi-t bien qu'avant qu'il arrivât,
il auroit tout le tetns neceifaire pour
amaffer plus d'un million depiaftres. Il
ne fe trompa pas. Le congé fut fi longtems
Avenir, qu'il mourut avant d'être
en état d'en profiter, après avoir amaffé
non pas quatre ©u cinq cent mille
piaftrefr, mais -quatre ou cinq millions
d'écus. Le bruit fe répandit aux Mes du
Vent qu'il étoit mort plûtôt qu'il ne
vouloit, mais qU'oti l'y avoit déterminé
par une potion cordiale, dont il
cft rarie qu'on prenne plus d'une fois en
fa vie.
' Nous partîmes dé la Rade del'Efterre
le Véndredy 18. Février fur les cinq
heuresdu foir. Nôtre Barque avoit deux
pieces de Canon, mais nous n'avions
qu'un feul boulet, dont nous ne pouvions
pas nous défaire, parce qu'il fer-
Voit à broyer la moutarde, qui accompagnok
nôtre Cochon boucané. Car
quoique nous fuifîons en Carême , &
au milieu de lamer, nous ne pouvions
faire niaigre que le Vendredy, que nous
paflGons atvec du bifeuit, des patates, 8c
du vin. Du refte nous avions d'aflêz
bonnes pro vifions, & fur tout des fufils,
de la poudre 5c du plomb aufervice de
nos amis. Nous étionsdix-fept hommes
avec un Moufle , & mon Negre , qui
àvoit quinze à fcize ans.
Nous eûmes dès le lendemain des
vents contraires 6c fort violens : de forte
quenous ne pûmes gagner les Caiimites
que le z f . fur le foir.Ce font plufieurs
petites Ifles bafles &défertes,quejene
pus pas bien voir , parce que nous les
paiTâmes pendant la nuit. Lamerétoic
fort groiTe , ôcle devint à un tel point,
A G E S AUX ISLES
que les lames fedonnoient la liberté de
s'exercer à qui fauteroit le mieux,& à
qui paiTeroit de l'arriéré à l'avant de nôtre
Barque. Une d'elles fut a (leí mal
adroite, pour emporter chemin fsifant
nôtre cuifine. Accident funeile pour des
gens qui avoient grand appétit. Cette
difgrace 6c la continuation dii tóauvaíís
tems nous obligea de moiiiller fotis le
Cap de Donna Maria, qui eft le plus à
rOueft de toute l'ifle.
Nous y fûmes encore invitez par un
petit pavillon, quedes Chaíleurs qui
étoient en ce Quartier-là mirent au bout
d'une perche, pour nous appeller. Cependant
commeil étoit bon de prendre
fesfûretez, de crainte que cene fuflêat
d^'honnétes gens, tentez d'enlever nôtre
Barque, pour s'en aller Forbans, on
prit les armes , on chargea nos Canoils
de mitrailles, 6c déballés de moufquet,
& je m'offris d'aller avec deux hommes
dans le canot, pour reconnoîtrele terrain
, 6c voir s'i n'y avoit rien à craiadre.
J e m'acquittai de ma commiflion,
& après avoir tout examiné, je retournai
à la Barque avec deux Chafleurs, qui
nous firent un prefentde Cochon frais),
& de boucané. On les regak devin 6c
d'eau-de-vie, 8c on convint avec eux du
prix de dix-huit cent livres de Cochon
en aiguillettes, 6c en pieces, 6c de trois
cent livres de mantegue , c'eft- à-dire, dfi
graiife de Cochonou fain doux.
LesEfpagnols s'en fervent dans l'A''
merique, 6c même en quelque Provinces
d'Efpagneaulieude beure, 6c cela
en vertu de la Bulle de la Croifade, qui
leur donne encore d'autres grands privileges,
6c entr'autres de manger e Samedy
toutes les extrêmitez des bêtes,
comme font les pieds, la tête,lecol,8c
les entrailles. Mais on coupe ces extrêmitez
fi avant, que le corps eft réduit à
très-peu de chofc. Cette raantegue cft
blan-
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^»ec'iß,
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ufiít,
qüelquts-'uiisde tìo"Shommesi, pour letir
aider à aller chercher ces viandes. On
leur en donna fix, 6c jeprisla cotilmiflîon
d'aller choifîr la viande. J e menai
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ies
Ohtf-
¡furi.
F R A N C O I S E S ^ DE L'AMERIQTJE. if t
blanehe comtBe la neige , 6c ejicellenîe raardié, qui ne bleflc jamais, 8c qui em- î7oî:
de q i i e l q u e maniéré qu'on la veuille ein- çêche qu'on ne fente les pierres & les
ployer. épines, fur lefquelles on marche.
Nous devions payer ces provifions Cîi Nous arrivâmes affez tard à leurBounoudpe,
pkjrab , toiles 6c merceries -, 6c can, 6ù QouS trouvâmes leurs trois au-
^miîie leur Boucati étoit environ àdeiÉK tresfanfiiraifes. Leurs pavillons étoient
lieiie^ de lamer, ils rrous demandèrent dans une aflez bonne cafe couverte de
taches, 6c la petite cafe à boucaner
étoit tout auprès. Ils avoient beaucoup
de viandes feches, d'autres qui boucanoient,
6c deux ou trois Cochons qu'ils
mon Negré avec moi, pour porter mon venoietlt de tuer. Nous foûpâmesfort
hamac , 6c nous partîmes fur lechatBp. [oyeufement, 6e avec appétit, J'avois
C'étoit quelque chofe de plaifant de fait apporter du vin, 6c de l'eau-de-vie,
!b^oir l'habillement de ces deux Chafleurs. mais mon Negre avoit oublié le pain,
ils n'avoientqu'uncalçon, 6c uneche- Je m'en mis peu en peine. Je mangeai
mife, le calçon étoit étroit, 6clache- comme eux desbananes rôties 6c boiiilmifcn'entroitpasdedansi
elle étoit par- lies avec la viande, 6c enfuitelegras6c
deffiis. Comme les roupilles denos roui- le maigre du Cochon en guife de pain 6c
iiers , Se un peu moins large- Ces deux de chair, accompagnéde la pimentade.
pieces étoient fi noires, 6c fi imbibées de Soit que l'air, le chemin, ou la nou veauftng
& de graiflè> qu'elles fembloient té m'euflent donné plus d'appétit qu'à
. -j l'ordinaire, foit que la viande fût plus
tendre, 6c plus appetiflante, je croi que
j'en mangeai près dequatre livres. Nous
dormîmes à merveil è. La faim ptôtôt
^ue le point du jour nous reveilla. J'avois
de la peine à concevoir qu'ayant
-tant mangé peu d'heures auparavant,
mon eftomac 1 eût déjà fait ia digeftion.
être de toîlegaudronnée. Une ceinture
de peau de Boeuf avec le poi l , ferroit
la chemifev 6c foutenoit d'un côté une
guàìne, qui renfetmoit trois ou quatre
grands co^teau^,; cimtime des bayonnette.?,
ôc- de l'autre-, un gargouffier a
l'ordinaire.. Ils avoient fur la tête uti
cul de chapeau ,, dont il refixàtenviron
quatre doigts de bord coupé en pointe Mes fix hommes 6c mon Negre fe trou-
verent dans le même befoin que moi,
6c les Chafleurs me dirent qu'il ne fait
ioit pas que cela nous étonnât, qu'ils
avoient autant d'appétit que nous, 6c
que cela leur étoit ordinaire, parce que.
la viande de Cochon mangée de cette eiuaUii
iàçon fe digere plus facilement. On peut de la^
croire que nous ne foufiî-îmes pas long- ¿f^^t
tems cette incommodité. Nous déjeuna- chsnmes
3 . - - T- f- ^^ er» MM 1 A' MA A M ^ ^ l^n fy^ « « l ^ • « A A* au-deflus des yeux .Leurs foûliers étoient
fans couture, 6c tout d'une piece. On
les fait de peau de Boeuf ou de Cochon.
Voici comment. Dès qu'on a écorché
un Boeuf, ou un Cochon , on enfonce
le pied dans lemoiceaude peau qui lui
couvroit la j^mbe. Le gros orteil fe
place dans le lieu qu'occupoit le genoiiil,
on ferre le boutavecunnerf, ^l'on le
coupe< On fait monter le refte ti ois ou
quatre doigts aù-deffus de la cheville du
pied, 6c on l'y attache avec un nerf,
bien. Mes fix, hommes avec trois maron,
Chafleurs fe chargèrent, 6c partirent
dans l'intention de revenir vers le midi,
jufqu'à ce qu'il foit fec, 6c alors i l l e afin de pouvoir faire un autre voïage. J e
tientde lui-même. C'eft uneçhauflùre reftai avec les deux autres, 6c mon Netrès
comoïode, bieiï-rôt faite, à bon gre au Boucan, où je ne demeurai pas
K k 5 oi&f;