« i
1 [-M: 29 NOUVEAUX VOYAGES: AUX ISLES
i'>97- gris, les autres les ont jaunes ; ces dernieres
font toujours les plus graiTes, 6c
par confequent les plus tendres,idr
8c les
plus délicates. Ces oifeaux veulent être
feuls, & les maîtres des arbres où ilsfe
rencontrent, fans permettre aux autres
oifeaux de venir manger avec eux. Ils
chaiTent à grands coups de bec, les ramiers
teut des
prives.
Des
fruits
appeliez,
ftßaches
"Defniptio,%
des
•vcrHAhlapift
aches ^
, les merles, les perroquets 8c autres.
Les enfans en prennent quantité
avec des noeuds coulansqui font faits de
crin de cheval. ; -
Pendant que je fuis fur le Chapitre des
fruits fauvages, ilfaut que je parle d'un
qu'on n'a pas tant de peine à cueillir que
"le precedent, puifqu'il vient danslaterr
e , au lieu qu'il faut aller chercher l'autre
dans la moyenne region de l'air. On
l'appelle piftache très-improprement :
car il n'a rien qui approche des véritables
piflaches, ni pour le goût , ni pour
la couleur, ni pour la coque qui le renferme,
ni pour la maniéré dont lanatu^
re le produit.
Il y a apparence que mon Confrere le
PereduTertre n'avoit jamais viî de ve-
" ritablcs piftaches, & n'en avoit jamais
. mangé lorfqu'il a écrit, que celles des
Jfles avoient le même goût que celle
d'Europe. Cela lui eft pardonnable, ce
n'eft pas une chofe qu'on trouve chez les
Religieux où il étoit entré fort jeune, &
il peut s'être trompé auflî-bien que ce
jeune Marchand Hollandois dont parle
M. Tavernier dans fes Mémoires qui les
prenoit pour des feves vertes.
Les véritables piilaches ne croiiTent
qu'en Alîe. L'arbre qui les porte a douze
à quinze pieds de hauteur. Ses feuilles
fontprefque rondes, ce affez femblables
à celles diiTherebinte. 11 porte des fleurs
qui ne font que des bouquets de petites
éraniines comme des franges, après lefquelles
les fruits paroilTent auffi par bouquets.
Ilsfont couverts de deux enveloppes.
La premiere eft verte, mêlée de
quelques pointes 8c lignes rouges, à peu
près delaconfiftence du deilus des noix
communes : celle-ci renferme une coque
blanchâtre,dure, 8cforte, quoiqu'aiTez
mince, qui couvre une amande longuett
e , ronde, pointue par les deux bouts,
dont le defllis eft verd 8c rouge, Sc le:
dedans extrêmement verd.Cette amande
eft fort ngreable au g o û t , foit qu'on la
mange crue, ou cuitte. On prétend
qu'elle eft fort chaude.
Les fruits qu'on appelle piftaches aux Piftaehm
Ifles viennent d'une plante qui nes'éleve
guéres plus d'un pied hors de terre, elle
rampe ordinairement, parce quefa tige ZmoiL
eft trop foible pour fe foutenir.Elle pouf- '
fe quantité de jets déliez, rougeâtres 8c
velus; accompagnez de petites queues,
qui portent des feuilles prefque comme
celles du melillot, Sc des capucines qui
font jaunes avec un peu de rouge aux
bords Sc l'extrémité. Elles durent peu,
8c leur délicateiîé eft caufe qu'elles font
bien-tôt brûlées Scconfommées par l'ardeur
du Soleil. Le fruit fe trouve en terre
où il faut le chercher. Il eft attaché à
des filets 8c aux chevelures que la racine
poulTe, 8c que la tige répand fur la terre,
dans laquelle ils entrent, 8c produifent
desgouiTesou cofles de douze, quinze Se
jufqu'à dix-huit lignes de longueur , fur
quatre, cinq, 8c iix lignes de diametre.
Elles n'ont guéres plus d'épaiiîeur qu'un
bon parchemin, ou comme celles des
amandes, qu'on appelle amandes tendres.
L e dedans eft revêtu d'une petite peau leur fiblanche,
unie Sc luftrée ; le dehors eft de «3* '
couleur de biftre avec des rayes plus blanches,
élevées au-deiTus du fond, qui
vont d'un bout de la coque à l'autre, 8c
qui font unies enfemble par d'autres petites
lignes moins élevées, qui partagent
toute la fuperficie eirquantité depetites
lozanges. Le fruit qui eft renfermé dans
cescolTes, ala figured'uneolive, quand
il eft feu 1, mais pour l'ordinaire il y en a
deux
F R A N C O I S E S DE? L'A M E RI Q_U É.
IÉ97. deux ou trois dans chaque cofle, dont ils
rempliiTent exaétement la capacité, ce
qui eur fait prendre différentes figures.
Ces fruits ou amandes font couvertes d'une
peliculerougeâtre, quand on les tire
de terre, dont la couleur change Se devient
grife lorfque le fruit eft fee. Cette
peau eft peu adherente quand le fruit eft
nouveau, on n'a qu'à le prelîer entre les
doigts pour l'en dépouiller. Elle eft plus
adherente lorfqu'il eft fee. Lafubftance
qu'elle couvre eft blanche, compaéte 8c
pefante, 8c a un peu l'odeur 8c le goût du
gland. Quand le fruit eft roti dans fa
coiTe, cette pelicules'envaenpouffiere,
& la fubftance blanche qu'elle renf ermoit
devient grife, 8c acquiertlegoût, Scl'odeur
des amandes rôties. Nos Efculapes
Leurs prétendent que ces amandes font bonnes
proprk- pour l'eftomach. Je n'en fçai rien. J'ai
feulement remarqué qu'étant mangées
crues, outre leur mauvais goût , elles
font indigeftes, 8c échauffent beaucoup.
C'eft peut-être en cela feul qu'elles reffemblent
un peu aux véritables piftaches.
Elles font moins mal faifantes étant rôties,
elles ouvrent l'appétit, elles excitent
à boire ; on en fait des dragées, des
mafTepains, on les met dans les hachis
& dans les ragoûts en guife de marons:
on s'en fert encore pour donner au rofi.
i
folis une odeur, 8c un goût d'amandes rôties
qui n'eft pas defagreable. Cependant
il faut convenir qu'à quelque ufage qu'on
les employe, elles font toûjoursindigeftes
Se pefantes, 8c qu'elles échauffent
beaucoup.
L e Pere du Teitre dit, qu'elles font
mal à la tête à ceux qui en mangent beaucoup
, que l'on en fait des cataplâmes qui
guériiTent les morfures des ferpens, 8c
que l'huile que l'on en tire, efteftimée
comme l'huile d'amandes douces.
Je n'ai point experimenté, ou entendu,
dire, que ce fruit ait caufé malàla tête
àperfonne. Je fuis très-certain qu'on n'a
jamais penfé à guérir les morfures de fero
n s , avec un pareil remedei 8c pendant
e grand nombre d'années que j'ai demeuré
aux Ifles, je n'ai jamais entendu
dire, qu'on fe foit avifé de tirer de l'huile
des piftaches, quoique nous en ayons
eu aiTcz fouvent un befoin preiTant.
Quand cette plante a été une fois dans
une terre, on peut compter qu'elle s'y
confervera long-tems. Car quelque foin
qu'on fe donne en fouillant les f rui t s , il
n'eft pas pofîîble qu'on les enleve tous,
ou du moins qu'il ne refte en terre quelques
filets, ou quelque chevelûre de
la racine, 8c cela fuffit
tuer la race à l'infini.
pour en perpe-
C H A P I T R E IV .
Vefcente d'un Corfaire Anglais k la Cabejîerre de la Martinique.
JUlarme caufee par un Serpent.
gEs Anglois qui fçavoient que
^ la Paix étoit prête d'être conclue,
voulurent profiter du
tems qui leur reftoit pour
gagner quelque chofe fur nous. Ils
mirent en mer autant deCorfaires qu'il
leur futpoiïïble, 8c nous ne manquâmes
pas de faire la même chofe de nôtre côté.
Un des leurs nommé George Roche ,
qui montoit une Barque de huit Canons
8c defoixante Sc dix à quatre-vingt hôm- Corfatn
mes d'Equipage, vintla nuit duquatorze
au quinze Of tobre, faire unc^décen- "¿Z'Î
te au Marigot. Ce pxtit Bourg n'étoit KOCL
alors compofé que de fept ou huit maifons,
avec autant de Magazins à Sucre. Il
mitfoixante Se quelques hommes à terre
dans deux Canots, avec d'autant plus de
facilité, que les Habitans qui étoient de
garde voyant la nuit fort noire, 8c la
^ 3 mer