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58S NOUVEAUX VOY
1703. neur de la Guadeloupe dépêcha deux
pirogues commandées par un Lieutenant
de milice nommé Raby, 6c lui ordonna
d'aller à la Grande Terre, & enfuite
de s'aprocher de Mariegalante le plus
près qu'il pourroit, Scd'examiner avec
foin les bâtimensquiyétoientmoiiillez.
On donna ordre aux deux pirogues de
ne point porter de voile, que pour prendre
chafle, & de fe tenir toujours à vûë
l'une de l'autre avec des fignaux con-
Pirosues ^S"" occailons qui
eavoiées fe préfenteroient. On les inftruifit de
à Udi. ce qu'ils auroient à repondre s'ils avoient
couvim Je malheur d'être pris & interrogez par
les Angloisjfçavoir,que nousavions dixfept
cent hommes de milice tant de l'iile
de la Guadeloupe, que de la Grande
Terre & des Saintes, qu'il nous étoit
venu fix cent Flibulliers de la Martinique
avec quatre compagnies delà Marine,
outre les deux que nousavions,
Se qu'on nousprottlettoit un plus grand
fecours, iî nous en avions befoin, outre
celui qu'on attendoit de Francei &que
c'étoitfur l'avis qu'on avoit eu, qu'il
y avoit des bâtimensmoiiillez à Mariegalante
, qu'on les avoit dépêché pour
Içavoir qui ilsétoient. On leur avoit encore
donné ordre qu'une des deux pirogues
revint auiîî-tôt qu'ils auroient découvert
de quelle nation étoient ces bâtimens
,&que l'autre allât mettre à terre
à la Caberterrede Mariegalante, &tâcher
de parler aux habitans qui s'y
étoient retirez, pour faire enforte d'enlever
quelque prifonnier,& nous le conduire,
& répandre fins afFeftation les
nouvelles que je viens de dire, afin que
fi quelque habitant étoit pris il pût les
débiter aux Anglois comme il les avoit
appris.
Une de nos pirogues revint le dix
à la pointe du jour j elle rapporta que
e'éioit la Flotte Angloife, & qu'on
A G E S AUX ISLES
n'en pouvoir pas douter, puifqu'ilss'en lyej;
étoient approchez pendant la nuit aiTez
près pour entendre le langage que
y parloit. C'étoit Raby qui nous
voioit fa fécondé pirogue avec cet avis, Fi««
pendant qu'il s'en alloit avec la fienne^"i'«'/«
à la Cabefterre de Mariegalante pour
prendre langue des habitans.
Il en joignit quelques-uns avec aifez
de peine, de qui il fçut que les Anglois
n'attendoient que la jonétion de quelques
milices des Mes dedeifous le Vent
qui n'étoient pas encore arrivées, pour
attaquer la Guadeloupe; que ceux de
la Barbade n'y étoient pas, parce qu'ils
ne vouloient pas obeïr au General Codrigton
qui n'a aucune authorité fur la
Barbade. Ils avoient fçû cela par un Anglois
qu'ils avoient trouvé écarté dans
e bois, & qui étoit mort de lableifurc
qu'il avoit reçu quand il fut pris.
Raby auroit été bien aife ^d'engager
les habitans à faire quelque mouvemeno
pour avoir un prifonnier, mais ilneles
y j:rouva pasdifpofez; ils craignoienc
d'être découverts & pourfuivis, ou que
quelqu'un des leurs ne fût pris en voulant
prendre, & qu'à force de tortures
on ne lui fit avoiier où les autres fe
retiroient, ce qui les auroit expofez à
être faccagez par les Anglois. Tout ce
qu'il put faire fut d'aller avec des guides
au travers des bois le plus-près du
lieu où la Flotte étoit moiiillée, pour
confiderer mieux qu'il n'avoit fait pendant
la nuit, le nombre & la force des
bârimens & la quantité des Troupes
qu'il y pouvoir avoir. Il partit de Mariegalante
après qu'il eut fait fes obfervations,
6c arrivai laBaife-Terre delà
Guadeloupe la nuit du iz. au 15. de
Mars. Après qu'il eut fait fon rapport,
6c qu'on eut fait rafraîchir fon équipage
pendant quelques heures, on le renvoia
aux Saintes pour y porter, des
ordres,
F R A N C O I S E S DE L 'AMERIQUE. 589
ordres, 6c pour retourner avec l'autre habitans, leur repréfenter leur devoir.
pirogue obferver les mouvemens des ennemis,
ôc en donner avis.
Dès les premiers avis certains que
nous eûmes que les ennemis étoient à
Maric-galantc, on fit prendre les armes
à tous les habitans, 6c on leur ordonna
de fe rendre au Bourg de la BaiTcterre
comme au lieu d'a&mblée, d'où
on obferveroit plus aifément ce que les
iiiedts ennemis voudroient entreprendre,pour ^ _
mihcei. s'y oppofer felon qu'il feroit jugéapro- eiFacer'lafaute qu'ils avoient commencé
pos. Tous les habitans de l'Iûeôcfoi- de commettre, ils vinrent en diligence
Xante hommes des Saintes s'y rendirent
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au premier commandement, laiiîant feulement
pour la Garde des quartiers, 6c
pour retenir les negresdans leur devoir,
les Vieillards, les Infirmes, 6c Ja JcunelTe
qui pouvoit, à la vérité, faire le
coup de fufil , mais qui n'avoit pas
encore aifez de force pour fuivre les
Troupes, & refifter aux fatigues de la
guerre.
iiih*- Il n'y eut que les habitans delà Grandeihamdt
Terre qui firent difficulté d'obeïr, fous
di Tine P^'^tcxte qu'ils pouvoient être attaquez
nfu/ent eux-mêmes, les Anglois étant fi proches
dtviKir. d'eux. C'étoitunetrès-mauvaifeexcufe,
car les ennemis n'avoient garde de commencer
leur attaque par leur quartier
8c de bonne grâce, 6c fe comportèrent en
gens de coeur pendant toute cetteguerrc.
J'avoisétéfurpris, en apprenant que
la nuit du fept au huit il étoit arrivé de la
Martinique un jeune Ingénieur nommé
Binois, quej'avoisvû à S. Chriftophlc
auprès du Comte de Gennes; je crus
d'abord que le Gouverneur m'en avoit
fait un miilere, 6c je tus fâche, comme
je le devois être, qu'ill'eutappellélorfque
tout étoit tait, 6ccomme pour receùillir
le truit d'un travail extraordinaire
de plus d'une année dont j'avois fupporté
la fatigue tout feul J'en témoignai
mon jufte reifentimentau Lieutenant de
R o i , 6c je me retirai chez nous. Je feignis
d'être incommodé pour ne pas être
fi facile à défendre, qu'il n'y avoit qu'à obligé de direànos Peres, quej'avoisdes
gâter les citernes, 5c combler quelques raifons pour ne plus fervir, je me mis à
mauvais puits que l'on y trouvoit pour embaler mes hardes 6c mes papiers, que
faire périr de foif toute leur armée, j'envoïai chez un de,mes amis au réduit.
L'objet de leur entrepriib étoit la Gua- 6c ce contretems vint fort à propos pour
deloupe , étant bien aiîiirez que s'ils les fauver.
étoient une fois maîtres de cette Ifle,
laGrande-Terretomberoit d'elle-même
entre leurs mains : c'étoit donc à la confervation
de la Guadeloupe qu'il falloit
fonger uniquement. MonfieiirAuger
ne manqua pas d'envoier le Sieur de
Maifoncelle Capitaine d'une Compagnie
Monfieur le Gouverneur qui avoit
befoin de moi, 6c qui n'étoit pasbienaifé
qu'on pût lui reprocher d'en avoir
mal agi après les fervices que je lui
avois rendu, n'eut pas plûtôt appris de
M. de la Malmaifon le fujet de ma retraite,
qu'il monta achevai, êc me vint
détachée de laMarine qui faifoit les fonc- trouver. Nos Peres furent furpris de fa
tiens de Major , pour faire affembler ces vifite, ôclui dirent d'abord que mon
Tom. IL Dd d in-
1703;
6c les fommer de fe rendre au quartier
d'aiTemblée à la BaiTe-Terre de la Guadeloupe,
fans aucun retardement, fous
peine d'être traitez comme rebelles au
R o i , 6c traîtres à la nation. Mais on
n'eut pas befoin de ces formalitezj car
avant que le Sieur de Maifoncelle arriv
â t , ces habitans avoientfait réflexion
au danger 6c à l'infamie où ils s'expofoient
par leur défobé'iiTancci & pour
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