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L'J.uteur
court
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nrnrdu
d'un
gros fer-
^enl.
31 NOUVEAUX VOY
que chofe dc fa part, en faifant faire un
deflein en Fi ance, qu'il apporta, & qu'il
. me mit entre les mains pour avoir mon avis.
Il ne me fallut pas beaucoup de tems,
pour lui faire connoître qu'il ne convenoit
nullement n'y au pais., n'y à nos uiâges.
Il goûta mesraiions, 8c me chargea
d'en faire un autre} & afin que rien
n'en retardât l'execution, il retint trois
Tailleurs de Pierre, que le Supérieur de
nôtre Million de la Guadelou pe avoit fait
.venir, pour travailler à rétablir le Convent
, que les Anglois avoient brûlé fept
ansauparavant. En attendant qu'on fût
en état de creufer les fondement de l'Edifice
qu'on projettoit, on les occupa à
tailler huit à neuf cent quartiers de pier-,
re, q ue nous avions amaflez, & à en chercher
d'autres. Je joignis à ces Ouvriers
les deux jeunesNegres quej'avois deftinc
à être Maçons, Se quej'avois faittravail-
1er à la Purgerie & autres Bâtimens que
j'avois fait faire au Fonds S. Jacques. Je
m'en retournai à nôtre Habitation après
que j'eus donné aux Ouvriers les pan- .
neaux, fuivant lefquels ils devoient
tailler un ordre dorique, dont la porte
dcvoitêtreornéej& ceux des piésdroits,
Jancis & écoinfons du reftedu Bâtiment.
Nôtre nouveau Supérieur general vint
quelques jours après au Fonds Saint
Jacques, il y conduiilt deux des Religieux
qu'il avoit amené de France, Se
en retira le Pere Mondidier, qu'il envoya
à la Guadeloupe.
Il penfa m'arriver dans cetems-làun
accident terrible. J'étois dans le bois à
faire abbattre des arbres dont j'avois befoin
pour quelque charpente, lorfqueje
vis un denosNegres quiferetiroit avec
précipitation du pied d'un arbre, où il
coupoic desliannes. J'en voulusfçavoir
la raifon. Ilmedit, qu'il y avoit un gros
ferpent entre les cuilfes de cet arbre. La
curioficé me porta à m'en approcher
AGES AUX ISLES
pour le voir,& comme il me montroit du nij/«-'
bout du doigt le lieu où il étoit, je me
trompai, je crus qu'il me montroit une
cuiiTe plus éloignée,ce qui fit que j'avançai
tout le corps fur le lieu où étoit le ferpent
, de maniéré que mes bras, mon vifage
6c ma poitrine étoient à la difcretion
de cet animal, qui pouvoit me mordre
où il lui plaifoit. On peut juger de ma
peur quand je vis le danger où j'étois. Je
me retirai bien plus vite que le Negre', 6c
j'appellaidu monde pour tuer le ferpent.
On coupa deux perches fourchues avec
lefquelles deux Negres le percerent en
mêmé-tems, ce qui n'empêcha pas que
l'un d'eux ne peniat être mordu, le ferpent
ayant glifle fa tête dans une ouverture,
qui étoit à une des cuilîe de l'arbre.
On lui coupa la téte, 6c enfuite on tira.-'-''""
le corps qui avoit près de neufpiedsde
long, 6c plus decinq pouces dediametre. d'un
C'étoitafîîjrément ieplusgros quej'euC- firftrit,
fe encore vû. Sa tête avoit au moins fix
pouces de large. Qiiand on eût tiré le
corps hors des cuiifes de l'arbre, 6c des
liannes qui l'environnoient, nous nous
apperçûmes que c'étoit une femelle qui
étoit pleine, & en remuant le corps, nous
vîmes fortir quelques petits ferpens par
les playes que les fourches lui avoient faites.
C'étoit une trop bonne prilepourla
négliger Je fis fendre le ventre d'un coup
de couteau,Se j'eus le plaifir de voir comment
fes petits ferpens y étoient renfermez.
Je vis donc que les oeufs étoient attachez
les uns au bout des autres par une
efpece de boyau ou de membrane. Ils
étoient de la grofleur des oeufs d'oye, oeufsàt
mais plus pointus. Leur coque, comme ferment.
celles des oeufs de tortuë, étoitcomme
du parchemin moiiillé.Les petits étoient
dans ces oeufs au nombre de treize, quatorze,
ou quinze,longs d'environ fix pouces,
& de agrofieur d'un petit tuyau de
plum.e à écnre. Ils étoient de toutes fortes
F R A N C O I S E S D
f/îiiS. tes Je couleurs. J'en vis dans un même
oeuf qui étoient jaunes, d'autres gris,
noirs tachetées. Cela me fit revenir de
l'erreur ou j'avois été jijfqu'alors fur le
rapport de bien des gens, que les couleurs
Nofíihre faifoient difîèrentes cfpeces de ferpens.
Ces méchans petits animaux fortoient à
-^tenus"' mefure qu'on déchiroit la coque qui les
dmslt renfermoit, ils fe louvoient en même-
'uentre tcms, c'cft-à-dirc, qu'ilsfemettoient en
d'umfc- roi^dj la tête élevée iur leur lof, 6c mor-
'' doient un bâton avec lequel je les tuois,
jutant de fois qu'ils le pouvoient attraper.
J'en tuai de compte fait foixanteSc
quatorze qui étoient contenus dans fix
oeufs. Un autre s'étoit rompu dans le
tcms qu'on tiroit le corps de la bête hors
des broufiliilles, dont la plûpartdes petits
qu'il renfermoit s'étoientfauvez. Je
fis porter trois oeuft ¡entiers à la maifon,
avec tous ceux q.ue j'avois tué, & le corps
& la tête de la béte.
On voit par ce que je viens de dire,
combien ces animaux multiplient. Il eft
oeriain qu'ils couvriroient le païs, 6c le
rendroicnt inhabitable, s'ils ne fe défi'uiibiejit
p ^ , & ne fc mangcoient pas
les uns les autres. Les couleuvres qu'on
appelle fimpjement courefics à la Martinique,
leur font une rude guerre, 6c en
devorent autant qu'elles en peuvent attraper.
Les hommes ne leur donnent point
de quartiei" ; les fourmis en ont fait mourir
un très-grand nombres ils leurs mangeoient
les yeux : 6c je croi qu'une partie
des petits meurent dc faim, avant
qu'ilsfoient enétat de pourvoir eux-mêmes
à leur fubfiftance. Voilà, fije ne me
trompe à quoi ontift redevable du nombre
aflez mediocre dc ferpens qu'on voit
aujourd'hui, en comparaifon dece qu'on
. endevroitvoir, vûlaprodigieufemukiplication
de ces atùmaux.
Nos Peres nouveaux venus de France,'
virent tout çela avccfrayeur^ & n'ofoient
Tûm. II.
E L'AMERICLUE. 35
fortir de Maifon dès qu'ilj étoit nuit,
craignant] de rencontrer quelque animal
femblable dans leur chemin.
J e fis tirer lagraiflê qui étoit dans le
corps, où l'on trouva auflî quatre gros
piloris à demi confommez.
Lagraiflê de ferpent eft fpecifiqueSc
admirable pour guérir les rhumatifines,
les douleurs froides, les contraétions 6c
foulures de nerfs, 6clafciatique, Elle fe yertm
trouve dans le corps du ferpent atta- «¿e {"
eh ée au deflbus & des deux côtez des ver- ^^fÊ
tebres, elle eft divifée en deux lobes plus
ou moins gros, felon que le ferpent à
trouvé de quoi fe nourrir: car quand le
ferpent a manqué de nourriture, on en
trouve très-peu:on la fait fondre au foleil,
ou fur le feu ,8c on la verfe dans un flacon
où elle fe conferve tant que l'on veut.
Elle eft jaunequand on la tire du corps
de la bête, elle devient plus blanche ,
lorfqu'elleeft fondue, 6c figée. Elle n'a
aucun mauvais goût, ni aucune mauvaife
odeur.
Quand on s'en veut fervir, on la fait Maniere
fondre fur une aiïïette, 6c on y mêle enfuite
de l'Efprit de vin, ou de l'Eau-de-
Vie la plus forte. Celle de Canne eft
meilleure pour cela que celle devin, 6c
après qu'on a oint la partie malade 6c les
environs, on la frotte bien avec des linges
chauds, 6c on met une compreifc
bien imbibée de ce qui eft reilé fur l'ai^
fiette. J'ai remarqué que cette graifle fait
plus d'effet lors qu'avant de l'appliquer,
on fait de fortes frixions avec des linges
chauds 6c rudes fur la partie malade 6c
aux environs,afin de rappellerles efprits,
les mettre en mouvement, 6c ouvrir les
pores. J'en ay vû des effets merveilleux, Expt-
•6c j'en ai fait l'experience fur moi-même.
Car ayant été moiiillé un jour, dans
le tems que j'étois tout baigné defueur, touchant
lâos avoir la commodité de changer de inguai]]'*
iinge 6c d'habit, jemeiiouvai lelende-
E main.