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80 NOUVEAUX VOYAGES AUX' ISLES
X(i99- lorfqu'on a commencé à s'en fervir, il
on les avoit auffi bons 8c auffi recens
qu'on les avoit pour lors, & que ceux
qui les ordonnent, ou qui les préparent
n'y vouluilent mettre rien de leur invention,
Se s'en tenir à la premiere recette;
mais à force de changer la maniéré de
les accommoder. Se à force d'être gardez
dans les Boutiques fans être renouveliez,
ils perdent tout leurfuc&leur
vertu, comme il eft aifé devoir, en les
goûtant ; Sç les différentes maniérés de
les préparer achèvent de les gâter.
Cette plante aime les lieux humides,
êc ne veut point être cultivée. On a
remarqué que celles qu'on a cultivées
dans des jardins, n'avoit prefque aucune
vertu.
Jean de Laët dans le quinzième Livre
de fa Defcription des Indes Occidentales
Chapitre dix-huiticme, fait mention
d'une plante qu'il appelle Igpecaja ou
Pigaiaqui guérit la diflenterie., 11 dit,
que fon tuyau eft haut d'une demie coudée,
& fa racine de même longueur, il
dit, qu'elle ne produit que quatre ou
cinq feiiilles de fort niauvaife odeur.Quc
fa racine étant pilée & laiiTée une nuit
dans l'eau au ferain, Se paiTée enfuite
5ar un tamis, £c donnée à un malade,
e purge d'une maniéré, qu'elle arrête
en même tems le flux de ventre.
Quoique cette Defcription ne convienne
pas tout-à-faità l'Ipecacuanha,
j'aime mieux croire que c'eft la même
chofe, mal expliquée, & mal nommée.
C H A P I T RE X L
ÂJfaJJïnat commis à la Martinique. Punition ¿r mort tris-chrétienne de Vajfaßn
vent
jEndant que je demeurois au
Moiiillage pour rétablir ma
fanté, Se faire travailler au
Bâtiment de nôtre Conaniva
que le Jeudy zf. Juin
étant forti de la Maifon un peu avant le
jour, pour mettre mes Ouvriers en beibgne,
j'entendis du bruit dans une maifon
qui étoit vis-à-vis de nôtre Eglife.
La curiofité m'en fit approcher déplus
près pour voir ce que c'étoit, Se comme
je connoiiTois le Maître de la maifon,
je ne fis point diiScultéd'y entrerayant
trouvé la porte de la Boutiqueouverte.
Je fus furpris d'entendre qu'il tomboit
quelque liqueur du plancher , dont
quelques gouttes tombèrent fur mon
habit. Jefortis pourvoir cequec'étojt.
& je fus bien étonné quand je vis que
c'étoit du fang, qui continuoit de tomber
a travers le plancher. J'appellai le
Maître de la maifon, Sc unjeunehomfiie
qui logeoit avec lui depuis quelque
tems, à qui j'avois donné les derniers
Sacremens depuis douze à quinze jours,
parce qu'il avoit été attaqué de la maladie
de Siam. Mais voyant que perfonnc
ne me répondoit, quoiquej'entendilTe du
remuement dans la chambre, je ne doutai
point qu'il ne fût arrivé quelque
meurtre. C'eft pourquoi j'appellai de
nos Nègres pour venir avec moi. La premiere
penfée qui me vînt, fut que le
Maître de la maifon , qui étoit fore
brutal, Se fort fujet au vin , avoit
tué le jeune hotfime qui logeoit chez
lui. Cet homme s'appelloit Croiffant.
Il étoit de Paris, fils à ce qu'on
difoit, d'un Chandeher demeurant à
la Porte Saint Denis aux trois Croiffans.
Je montai doucement à la chambre,
& l'ayant trouvée entre-ouverte, j.e voulus
entrer i mais je fus repouffé aflez rudement
parce jeune homme, qui ferma
la porte fur lui au veroiiil, 6c lui ayant
demandé
"i
FRANCOISES D
demandé d'où venoit ce fang qui tomboit
du plancher, il me répondit, que ce
n'étoitricn. Je connus alors que je m'étois
trompé , & que c'étoit Croiffant qui
avoit été affaffiné. Comme je l'entendois
encore fe remuer , 6c fe plaindre je defcendis,
j'appellai du monde, 6c ayant
fait apporter une pince de fer, je fis enfoncer
la porte, afin de voir iî le bleffé
feroit encore en état de recevoir quelque
affiftancefpirituelleou corporelle. Nous
trouvâmes le jeune homme à demi vêtu,
couché dans Ion lit, quifaifoitfemblanc
d'avoir peur que nous ne tuffions venus
pour le tuer, comme on avoit tué Croiffant
, à ce qu'il difoit. Nous le découvrîmes
enfin renverfé fous des matelas,
des chaifes 6c des tables, qui expiroit,
tellement meurtri, 6c défiguré, que cela
faifoit horreur.
On faifit le jeune homme. On remarqua
qu'il avoit la naiffance des ongles
toute pleine de fang, ce quiaïant donné
lieu de le faire déchauffer, on vit que les
pieds,fes jambes, 6c fes genoux en étoient
tous remplis ; 6c comme il lui manquoit
beaucoup de cheveux d'un côté, on s'apperçût
que Croiffant les tenoit dans fa
main. Cet affaffinat dont il étoit facile
de connoître l'auteur nous furprit tous :
car ce Croiffant étoit un homme extrêmement
robufte 6c vigoureux, quiauroit
mis en pieces dix perfonnes comme
ce jeune homme, qui n'avoit que dixneuf
ans, d'une complexion fort délicate,
6c qui ne faifoit que relever du mal
de Siam, qui l'avoit réduit à l'extrémité.
On trouva dans un coin de k chambre
le marteau dont il s'étoit fervi pour commettre
ce meurtre, il étoit tout rouge
de fang, ce qui aïant donné lieu de chercher
répée ou le poignard, dont il paroiffoit
plufieurs coups dans le corps du
mort, on trouva enfin un couteau enfanglanté
dans la pailiaffe du lit oîi ce jeune
^om. IL
m L'AMERICi .UE. 8t
homme couchait, qui fut reconnu par
un des aififtans, pour être celui-là même
que ce jeune homme lui avoit emprunté
deux Jours auparavant, ôc qu'on lui
avoit vû aiguifer la veille avec beaucoup
de foin.
Lecadavreaïantété viiîtépar lesChi^
rurgiens fac trouvé bleffé de vingt-crois
coups de marteau 6c de couteau, 6c le
jeune homme aïant été conduit en pri-
Ibn, on lui fit fon procès. Il m'envoya
prier de l'aller voir, j'y fus; il me conta
tout le détail de ià mauvaife aétion, 6c
médit, qu'il l'avoit niée au Juge, 6c
qu'il étoit refolu de ne la confeffer jamais.
Je lui dis, que la défenfeétoit de
droit naturel, mais que fon crime étoit
fi clair, qu'il ne me paroiffoit pas qu'il
y eût aucun moyen d'échapper la mort
en leniant, 6e qu'ainfi il étoit obligé de
l'avoiier, pour mettre en repos la confcience
des Juges, 6c pour faire connoître,
qu'il n'avoit été confeillé, ni aidé
de perfonne pour commettre ce meurtre.
Comme le procès étoit en état, il fut
jugé le lendemain, ôc enfuite conduit
au Confeil, où fon jugement fut confirmé,
6c lui renvoyé au Fort S. Pierre
pour être rompu vif, 6c puis étranglé
devant la maifon où il avoit commis le
crime.
Je l'avois difpofé pendant qu'on inftruifoitfon
procès à faire une confeffion
gcnerale, 6c je me fervis des deux jours
qu'il demeura en prifon après fon jugement,
pour la lui faire faire. Il envoya
chercher le Juge 6c le Greffier, 6c leur
dit, que quoiqu'il n'eût jamais avoiié
qu'il étoit l'auteurdu meurtre de Croiffant,
il l'avoiioitàprefent, 8c leurconfeffoit
qu'il l'avoit commis feul, fans
l'affiftance, ni le confeil de qui que ce
f u t ; qu'ily avoit été porté par la crainte
que Croiffant ne fît vendre à vil prix
quelques mai çhandifes qu'il avoit, corn-
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