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176 NOUVEAUX VOY
dévot que les autres à ce Saint, avant
même de pouvoir deviner qui il étoit:
car il étoit lié avec une corde delà grof-
Ï7ot.
Sigure
di
liée au
tnât de
wifent.
L f l T pouce, qui l'environnoit avec
le mât, depuis le col jufqu'aux pieds,
dontonnevoyoitquelebout. La figure
jouvoit avoir trois pieds & demi de
lauteur. Je priai Mumônier de me dire
quel Saint c'étoit, 6c pourquoi il étoit
ainfi lié. Il me dit, que c'étoit Saint
Diego ou Didace, qui étoit Cordelier
en ion vivant , pour qui les Matelqts
avoient une extrême devotion, mais fî
A G E S AUX ISLES
mal reglée, & fi extraordinaire, que
fans mon prétendu caradere de Commillaire
du Saint Office, je n'auroispû
m'empêcher de rire, de ce qu'on me racontoit
de ce Saint, 6c de fes dévots. Je
ne me fuis pas trouvé dans dcsVaiiîèaux
Portugais, mais les connoiiTantencore
plus extraordinaires dans leurs devotions
^ueles Efpagnols, je n'ai pas de peine
à croire du moins en partie, ce qu'on
dit du culte qu'ils rendent à Saint Antoine
de Padoue. AiTez d'autres en ont
inftruit le public, fans que je le répété ici.
C H A P I T RE X I I .
Maniere de pofer les Sentinelles, ce que c'eji que Je Baratto. Deffeni de
l'Equipage de la Barque fur le Fatjfeau Efpagnol Ils partent
& contmient leur Foïage.
5E Sentinelle qui étoit à la porte
de la chambre, au lieu^d'épée
ou autre arme, n'étoitarmé
que delà fourchette dont
on fe fervoit anciennement, & dont
apparemment les Efpagnols fe fervent
encore aujourd'hui, pooir foûtenir le
moufquet. Un de mes divertiiTemens
Sinti- étoit de voir relever, & pofer les fentintl
nclles. En voici la maniéré. Le Caporal
avec la fourchette à la main, fuivi du
g^jj^j. q^j devoit entrerenfààion, qui
n'avoitniépce, ni bâton, s'approchoit
le chapeau à la main de celui qui étoit en
faâion, celui-ci le recevoit de la même
maniéré, on fe complimentoit de part
& d'autre, après quoi celui qui quittoit
le porte, après avoir inftruit celui qui y
devoir entrer de la configne, baifoit la
fourchette en la lui prefentarttj celui-ci
la recevoir avec la même ceremonie, 6c
ils teriïiinoienr leurs civilrrez par une
paire de reverences qu'ils fe faifoient en
le quittant.
L'exprès qu'on avoit dépêché au Prcfident
de Saint Domingue revint fe
Mardy au foir. On aiTembla auffi-tôt le
Gonfeil, & on le renvoya avec de nouvel
les lettres, fans qu'on nous dît rien
de ce -qui fe paffbit. Nous remarquâmes'
pourtant qu'on étoit plus reférvé avec
nous qu'à 'ordinaire, ScmêmeléMercredy
matin on nous fit attendre aflez
longtems à la porte de la chambre avant
de nous laiifer entrer, ce qu'on n'avoir
point encore fait J e demandai à l'Aumôniers'ilyavoit
quelque chofe de nbuvrau,
il me répondit aflez froidenienrqu'il
ne fe mêloit point de ces fortesd'afaires.
Je retournai à la Barque après que
nous eûmes dîné, fous pretexte que j'avois
mal à la tête, M. des Portes y vint
auiïï. Nous nous enfermâmes dans la
chambre avec le Maître, pourconfulter
eniêmble, fur ce que nous avions remarqué
, & fur ces allées & venues à la Ville
de Saint Domingoe ; qui eft éloignée de
dix-huit lietiesdulieuoîi nous étions. lî
fut refolu défaire unprefentao Gouverneur,
qui paroiflbit êtredans nos intérêts
afin
F R A N C O I S E S D E L'AMERIQ_UE. 17 7
d'accord i & qu'en cas que le Prefidenc
hfiinm
di
s'obftinât, il avoir refolu de nous conduire
à la Veracrux, & de faire décider
la queftion par le Vice-Roi du Mexique
, de qui la Flotte dépendoir. Le Pilote
Major dit la même chofe à M. des
Portes, & lui recommanda le fecret,
comme T'Aumônier me l'avoir recommandé.
Je n'aurois pas été trop fâché de faire
afin de l'y affermir. life trouva par bonheur
dans la Barque une feile de velours
rouge, en broderie d'or & d'argent, avec
la houife, les fourreaux, & les chaperons
des piftolets de même parure. On l'avoir
portée, pour la vendre à la Jamaïque, 6c
on n'avoir pû. Onreiblutdonc delalui
preferiter. Après quoi nous conclûmes,
que fi l'ordre venoit deconfifquer nôtre
- Barque, nous demanderions permiflîon
S ' d ' e n v o y e r un autre exprès au Prefident , le voïage de Mexique. J'étois déjà pref-
''' & pendant ce rems-là, nous ferions nôtre que accoutumé à leurs manieres > 8cfi
polfible pour nous échaper, quand mê- nous en euffions été réduits à ce pointme
nous devrions pour cela mettre le feu là, il eft fûr que leur VaiiTeau n'auroit
au Vaifleau, afin d'avoir le rems de couper
nôtre cable, -6c de nous mette à la
voile, pendant que nos nouveaux freres
les Efpagnols feroient occupez à l'éteindre
ou à iè fauver. Nous concertâmes
les moyens que nous emploirions pour
réiiffir dans ce deflein, 6c nous char-
1701.
if.r
I 1
^eâmes leMaître de preflentir l'équipage
ur ce que nous avions refolu, 6c fur tout,
de ne confier fon fecret qu'à ceux dont
ilétoit bien aflïïré, 6c encore non comme
d'une chofe arrêtée 6c conclûc, mais
comme d'une pcnfée qui lui feroit venue
en l'efpriten fongeant aux moyens
de nous fauver, fi on nous vouloir confifquer.
Je me chargeai de douze pieces de
platilles pour donner à l'Aumônier, afin
de lui ouvrir la bouche. Nous retournâpointeude
mal, du moins fi j'en avois
été le maître. L'Aumônier fe chargea
de faire agréer le prefent que nous avions
deftiné pour le Gouverneur, qui ne
manqua pas de faire fon eiïèt, comme la
fuite nous le fit connoître.
A nôtre retour dans nôtre Barque,
nous trouvâmes nos gens les mieux intentionnez
du monde. On avoir déjà
travaillé aux chemifes fouffrées, 6c on
avoir chargé fept ou huit grenades qu'on
avoir trouvées dans la Barque, pour les
envelopper dans les chemifes, afin d'écarrer
ceux qui voudroient apporter du
remede au feu. Nous avions encore neuf
fufils, 6c quelques piftolets, on mit tout
en ordre.
• Mais nos gens propoferent une chofe, Dejfein
à laquelle nous ne voulûmes point du del'étoutconfentir,
qui f rneis au Vaiffeau fur le foir. J'affeétai, ^ ^ ut d'enlever la Barplus
de gay été qu'à l'ordinaire, 6c étant que du Gouverneur de Port-Ric. Ils di- TJLi
allé trouver l'Aumônier dans fa petite foient pour raifon , que la nôtre demeu- dePortchambre,
je lui donnai le prefent qu'on rant amarrée au Vaifleau ; on nefe doului
avoir deftiné. M. des Portes en fit teroit point que nous fuflions caufe de
autant au Pilote Major. Ces deux pre- l'incendie, que l'autre Vaifleau voyant
fens firent leur effet. L'Aumônier me fuir la Barque de Port-Ric ne la pourdit,
qu'il y avoitdela conteftation en- „.o i:„„
tre le Prefident 6c le Gouverneur fur nôtre
fujet. .Que le premier jugeoit que
nous étions de bonne prife, 6c que le
fuivroit pas, au lieu qu'il ne manqùerôit
pas de pourfuivre la nôtre. Je répondis
à cela, quel'enlevement de cette
Barque nous découvriroit infaillibletiouverneur
n'en vouloir pas demeurer^ ment, qü'il y -ávoit du monde deffus ,
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