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316 NOUVEAUX VOYAGES AUX ISLES
noi' venient, cnfaifant donner plus dcvoyc iìcile à trouvci'jouquandonn'enapoint,
il lafçie, & en faifant affûter les dents une plus grande quantité de copeaux,
'îoi,
de tous côtez. Par ce moyen je fis débiter
le Gommier que l'on laiflbit pourrir
auparavant, lorfqu'on ne l'emploit pas
à faire des Canots; & comme c'eft un
très-bonbois, je lefis employer en toutes
fortes d'ouvrages tant de planches,
que cartelage. Aïant été obligé dans la
fuiredéfiiregrand nombre de madriers
pour les plates-formes des Batteries, &
pour des flafques d'affûts, je fis mettre
en oeuvre une quantité conilderable de
ces arbres malgré les murmures de nos
Ouvriers parefléux qui n'étoient pas accoûtumez
à les fcier.
Î^laniert Ce bois eft de couleur de chair claire,
à'con- je croi l'avoir dit ci-devant. Quand les
imbiber le bois plus de fois, & e frotter
avec plus de foin.
Lefuccèsque j'avois eu dans le travail Ari„
du Gommier, mefitefpercr quejeréiif- "PMli
firois aufli-bien à faire débiter un autre''""
qu'on appelle Pain d'Èpices, que fa dureté
avoit confervé contre toutes fortes
d'attaques Je ne fçai d'où ce nom lui ell
venu, car, excepté la couleur, il n'a
rien qui ait du rapport avec le Pain d'Epices.
11 croit ordinairement fur le bord des
falaifes, & dans des lieux élevez, arides
8c pierreux. Il vient très-grand. J'en
ai trouvé un qui avoit plus de quatre
pieds dediametre, & près de quarante
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ouvrages aufquels on les deftine, meri- pieds de tige: fa feuille eft prefquefem-
¿m.confervé & blable au Poirier d'Europe: fonécorce
h. tent qu'on lui "conferve cette couleur, &
qu'on l'empêche de fedécharger, il n'y a
qu''à prendre des copeaux du même bois,
Scies faire bouillir dans de l'eauavec un
peu de Lianne à fang, ou quelques fleurs
deRocou, ouduRocoumêmeenpeti-
eft brune 8c affez épaiffe contre l'ordinaire
de tous les bois durs ; elle eft adhérente,
tailladée & marquetée de petits
points rouges Se blancs. L'Aubier ne différé
prefque en rien du coeur qui eft d'un
te quantité, 6c en humeéter le bois deux jaune rougeâtre,avec quelques filets d'un
rouge plus vif: ileftextraordinairemenc
compaél Scferré, Se parconfequentpefant
: fes fibres fort déliées font mêlées
les unes dans les autres, ce qui le rend
coriace, roide, 8c capable de fupporter
les plus grands fardeaux.
Le premier quejefisabattre, portoic
environ deux pieds 8c demi de diametre.
Nous étions alors dans la faifon de la fécouleureft
encore^lus vive Si moins fu- ve, ce qui mefaifoitcfperer que nous en
jette à fe décharger, 8c l'huile dont les aurions meilleur marché, parce tous les
pores du bois font imbibez, fait qu'il arbresontbienmoins deduretédanscetrefifte
plus aifément 8c plus long-temps te faifon que dansunç autre, à caufe que
à l'air 8cà l'humidité. leurs pores font plus ouverts, & leurs
On peut fefervirde la même méthode parties plus éloignées, pourainfi dire,
pour toutes fortes de bois,obfervant les unes des autres : cependant il fe dé-
' • • ' fendit fi bien, qu'après avoir rompu
huit ou dix haches fans pouvoir prefque
l'entamer, j'étois prêt de le faire
aban-
OU troistois, &lorfqu'il eft prefquefec,
le frotter avec les copeaux, Se quand il
l'eft tout-à-fait, avec un morceau de
cuir 8c un peu de cire. 11 conferve alors
une couleur de chair vive,luifante Se trèsagreable.
Au lieu d'eau on peutfefervir
d'huile de Palma Chrijli boiiillie avec de
laLitarge avant d'y mettre les copeaux,
ou laLianneà fang, ou leRocou. La
- ,
quand on le peut faire, de joindre aux
copeaux quelqueLianne, racine, ou couleur
qui en approche, ce qui n'eil pas dif-
-i^llî::
,7a.
F R A N C O I S E S DE
abandonner lorfqu'ilfeprefenta un Machoquet
ou Tail andier, demeurant au
Bourg du Baillif, nommé Loriau, qui
m'offrit de me faire des haches d'une fi
bonne trempe, qu'elles couperoient toutes
fortes de bois, llenvou oit trois écus
1701.
de la piece, Se les donnoit à l'épreuve
pendant quinze jours. Il m'en fit une
douzaine, qui refterent en coupant les
arbres appeliez tendres à caillou, 8c les
Fer blancs, qui paflent pour les plus dursj
mais quand ce vint au pain d'Epices, elles
fe rompirent comme lesautres. Cela
étonna étrangement mon Ouvrier. Il
vint fur le lieu ,6c rompit lui-même deux
de fes meilleures haches. Il s'en retourna
chez lui, étudia fonmétier, 8ctrouva
enfin le point de la trempe qu'il falloir,
6c me fournit le nombre de haches
dont nous étions convenus; mais il ne
voulut jamais montrer fon (ecret au Negre
Taillandier, que nous avions dans
la maiibn, quelques promefles que je lui
fille, 8c quelque argent que je lui offrillé.
C'eft un ménagement de tems trèsconfiderable,
quand on a de grands abbattis
à faire, d'avoirtoûjoursun nombre
de haches emmanchées, & toutes
prêtes, pour fournir aux Nègres qui
rompent les leurs dans le travail. Ils
perdent un tems infini à faire des manhkui
affiler leurs haches,°18c c'eft le
timp'ij tems, qui eft lachofela plusprécieufe
/"" fur tout aux Ifles. J'aimois mieux donner
quelque argent aux Negres, que je
/m connoiiTois les plus adroits, afin qu'ils
Jisétii. fiifent des manches de haches aux heu-
¡"^f' res qu'ils peuvent travailler pour eux j
6c le Commandeur avoit foin de faire
porter une douzaine de haches de rechange
fur le lieu du travail, pour en
fournir à ceux qui venoient à en avoir
befoin.
Pour revenir au Pain d'Epices, j'en
Tom.IL
ivoir
fiind
L ' A M E R I Q U E . 317
fis débiter en planches, qui étoient d'une
grande beauté: j'en fis tourner, Se il réiiffit
parfaitement bien -, il prenoit prefque
de lui-même un poli, & un éclat merveilleux.
On peut bien juger par ce que
j e viens de dire, qu'il eft très-difficile à
fcier, qu'il échauffe les fcies d'une maniéré
extraordinaire, & qu'il les détrem- Manière
pefaeilement. Leremede à cela eftd'a-^' ''
voir deux fcies d'une égale épaifleurjaf--'""^'
futées bien également, & les changer de
quart d'heure, en quart d'heure} afin
de leslaifferrepofer, ÔCrafraîchir, après
les avoir frorées avec du fuif. Quelques
Habitans prétendent que ce bois n'eft
bon qu'à couvert, Se qu'il ne dure guère
dès qu'il eft expoféaux injures de l'air.
Je n'ai pas eu le rems de faire cette experience;
mais j'ai fi fouvent entendu dire
la même choie de quelques autres bois,
quoique j'aye experimênté le contraire,
que je ne croi pas, que celui-ci ait cc
défaut.
Le Procès que les Communautés Religieufes
de la Guadeloupe avoient à Paris
avec les héritiers de M. Hinfelin au
fujet de la Donation qu'il leur avoit faite,
aïant été terminé par un accommodement
, nous en reçûmes les nouvelles fur
la fin du mois de Janvier i-oz, avec les
pieces neceflaires, pour nous mettre en
5offeffion des biens qui nous avoient été
eguez. Mais comme nos intérêts étoient
differens, puifque les Religieux de la
Charité devoient avoir la moitié de ce
bien, avecle choix des lots, quand le
partageferoit fait, nous nous aiTemblâmes,
Scîje fus choifi, Sc établi Procureur
des quatre ' Communautez, qui
avoient la moitié de la fucceffion à partager
entr'elles, c'eft-à-dire, desjefuites,
des Carmes, des Capucins, Se de
nos Peres Les Supérieurs Généraux des
quatreCommunautez fignerent la Procuration
qui me fut donnée, & voulu-
S f rent