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Î703.
394 NOUVEAUX VO Y
en défendant le Fort de la Guadeloupe
en lôpi. quoiqu'il ne fut pas à beaucoup
près en auffi bon état qu'il étoit en
cetté année 1705. Il ne s'attachoit pas
facilement aux gens, qu'après les avoir
bien connus i mais quand il avoit dit
une fois à un homme qu'il étoit fon
pouvoir compter feurementfur
A G E S AUX ISLES
ami
Le Sr.
Cloche.
fon bien & fur faperfonnej 6c quelque
obligation qu'on pût lui avoir, on lui
étoit encore plus obligé "de la maniéré
que de la chofe même. Ses fervices lui
ont procuré le Gouvernement de la Guadeloupe
quelque tems après que Monfieur
Auger eût été nommé à celui de
Saint Doming ue. Il avoit un neveu
nommé Cloche qui étoit Lieutenant de
la Compagnie du Sieur de Maifoncelle,
ôc qui la commandoit en chef pendant
que le Capitaine faifoit les fondions de
Major: le Sieur Cloche étoit alors un
jeune homme de 22. à Z3. ans, bien
f a i t , d'une phyiîonomie agréable, il
avoit beaucoup d'efprit, du brillant &
de la Icdure. On difoit que le mauvais
choix qu'il avoit fait des livres qu'il
avoit lû, l'avoit rendu critique, fatirique
& même médifant, fources fécondés
de beaucoup de démêlez.
Monfieur de Maifoncelle étoit Creolle
dekGuadeloupcjc'étoit un Gentilhomme
fort bien fait, il avoit les traits du
Mr.de vifage réguliers, du feu & de la viva-
Maifi^. cité autant qu'il ell permis d'en avoir
à un homme qui paifoit un peu trente
.ans; fes cheveux étoient chatains &
fort beaux; on étoit d'abord prévenu en
fa faveur, il avoit avec cela beaucoup de
bravoure Se defagefle, fa compagnie
qui étoit depuis long-tems en garnifon
au Fort Loiiis de la Grande-Terre lui
donnoit le commandement de tout ce
quartier-là; & quoiqu'alors il n'eut pas
un bien confiderable, il ne laiiîoit pas
de foûtenir le rang de Commandant
de la Grande-Terre beaucoup mieux que
des Officiers plus riches ^ue lui qui ^
1 avoient précédé ; il étoit fort honnête,
f^ortobligeant, d'unefpritextrêmement
doux & poli; fes bonnes manicres lui
avoient gagné le coeur de tout le
monde.
Le Capitaine de l'autre compagnie de ,, .
^ortdelaBalTe-Terre, éroit le Sieur
Tanneguy du Chatel, feizeoudix-feptiemedu
nom. Il étoit Breton; ildifoic
a tous ceux qui le vouloient écouter,
& le leurauroit répété cent-fois le jour,
de peur qu'ils ne l'oubliaiîènt, qu'il defcendoit
en ligne direde & de mâle en
maie du fameuxTanneguy duChatel qui
tua un peu traîtreufement leDuc deBourgogne
furie pont de Montreau, comme
dit l'Hiftoirede France. Mais comme
Moreri & les autres Hiiloricns & Genealogiftes
aflbrent que ce Tauneguy du
Chatel ne fût jamais marié, & qu'il
n'avoit que deux freres, tous deux dans
l'Ordre Epifcopal qui n'avoient point eu
d'alliance; Monfieur Tanneguy du Chatel
dix-feptiéme du nom étoit réduit à
de grandes extrémitez quand on le
pouifoit fur ce point, ce qui obligeoit
fes, amis de lui confeiUer de prendre
quelque branche collateralle moins fujette
à caution & à la médifance. Quoiqu'il
en foit, il auroit été long-tems
le Doïen de tous les Gardes de la Marine
du Roïaume, fi Madame laMarechaie
de Villeroi ne lui avoit procuré
l'expeftative d'une Lieutenance dans
les compagnies détachées de la Marine
qui font aux Ifles. Il y vint dans le
tems que le Marquis d'Amblimont étoit
Gouverneur Général; il s'attacha à cc
Seigneur qui étoit la meilleure perfonne
du monde, & la maladie de Siam
qui faifoit de grands ravages l'aiant
épargné pendant qu'elle emporta grand
nomris.
F R A N C O I S E S D
1703. nombre d'OfficiersScdePrétendans plus
anciens que lui, il fut facile au Marquis
d'Amblimont de le pourvoir d'une Lieutenance
Se enfuite d'une Compagnie.
Le Sieur du Chatel étoit aiîbz bien
fait, letourdu vifage agréable, le teint
beau} il difoit qu'il avoit toute la valeur
de fes Ancêtres, c'eft ce que je
n'ai garde de lui conteller; il étoit
prompt, violent 6c emporté; il méprifoittoutle
monde, 6c tout le monde
lui rendoit la pareille.
usiiur Nôtre Aide-Major étoit un Gentil-
¡iRoi dt homme Européen ou Creolle; jenefçai
pas trop-bien oùil étoitné, il s'appelloit
le Roi de la Poterie, fon pere avoit
eu autrefois du bien confiderablement,
mais il avoit eu le malheur de le perdre
en jouant avec des gens qui en fçavoient
plus que lui. J1 étoit venu aux
Ifles pour rétablir fes affaires. Se il y
auroit rciiffi, puifqu'il avoit trouvé le
moien de faire une Sucrerie à côté du
Gros Morne, fi le jeu, ladépenfe, 8c
les Anglois n'avoient tellement achevé
de le ruiner, qu'ilfubfiftoit avec beaucoup
de peine ong-tems avant de mourir.
Son fils le cadet qui étoit mort depuis
deux ans avoit exercé la charge de
Major de l'Ifle de la Guadeloupe , 8c
auroit été un fort bon Officier, L'aîné
qui eft celui dont je vais parler, avoit
demeuré long- tems en Canada j Se felon
la coutume incommode du païs qui ne
permet pas d'entrer trois fois dans une
maifon où il y a des filles fans parler
du mariage, il s'y étoit marié ; il avoit
quitté fa femme 5c l'emploi qu'il avoit
d'Infpeâreur ou Conti'olleurdes Fortifications
quand il avoit apris la mort de
fon frere Se de fon Pere, efperant que
l'honneur qu'il avoit d'appartenir à un
de nos Miniilresdu côtédes femmes lui
procureroit tout au moins la charge de
E L' A M E R I Q ^ U E . ^of
fon frere, & peut-être les moïens de
rétablir fa maifon : cependant il avoit
été trompé, la parenté Se fes follicitations
ne lui avoient fait avoir autre
chofe qu'un brevet d'Aide-Major qui
eiltrès-peu de chofe, pour ne pas dire
moins que rien. C'étoit un homme de
trente-cinq ans, d'une petite taille aflcz
bien prife; il avoit la phyfionomie d'un
homme fimple Se fans malice, 6e fa
phyfionomie n'étoit point trompeufe:
il étoit meilleur chrétien que foldat>
Se quoiqu'il eût demeuré long-tems en
Canada, où l'on dit que la valeur eft à
très-bon marché, il n'en avoit fait aucune
provifion ; il ne laiiîoit pas de nous
conter une infinité d'hiftoires extraordinaire
du courage des Creollcs de ce
païs-là, dans les guerres que l'on avait
eu contre les Anglois Se coHtre les Iroquois
j mais comme il ne s'y éroit pas
trouvé en perfonne, on fedifpenfoitde
croire tout ce qu'il en rapportoit furie
rapport d'autrui, Se c'eft pour cela que je
n'en dirai rien. Cependant, à l'exemple
de ces Meffieurs les Canadiens il avoit
faire faire line petite hachette quis'emmanchoit
dans une canne de trois pieds
de long, qu'il appelloit un caiTe-tête,
on jugea aifément que cet inftrument
etoit trop court pour qu'il s'en pût
fervir.
Il ne faut pas croire que ces Meffieurs
fuifent les feules perfonnes de
diftinâion qui étoient dans l'Iile ; il y
avoit plufieursGentilhommes confiderables,
comme les Marquis Hoiiel de Varennes,
Se de Bolifl'eret, Meffieurs Domonville,
de Rochefort, de Bragelonne
Se autres dont je ne parlerai point ici
parce qu'ils n'étoient pas Officiers ; mais
. e ne les oublierai pas pour cela, Se je
eur rendrai juftice quand l'occafions'en
préfentera.
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