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54Z NOUVEAUX VOYAGES AUX ISLES
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I70i; vices. Cela fuffit à un homme mort, Se
c'eft une confolation confiderable pour
une famille affligée comme celle du
Comte de Gennes.
- Ce que j'ai dit ci-devant du fieur de
Valmeinier marque aiTez que le Jugement
rendu contre lui n'a point tait
d'impreffion à la Cour, puiiqueleRoi
l'a fait depuis ce tems-là Chevalier de
Saint Loiiis , & fon Lieutenant à la
Martinique, & qu'il cil difficile qu'un
Prince marque plus de confiance en la
fidélité, & en a fagefle de fon Sujet,
que le Roi lui en a témoigné dans les
inlbuétions qu'il lui donna en l'envoyant
à la Martinique, pourappaiferlesmouvemens
qui y étoient furvenus en mil fept
cent dix-fept.
Pour ce qui eft du fieur de Châteauvieux,
quoique fon aftion fût criante,
ik qu'il méritât unepunition, fa viëil-
Icfle, & fes longs fcrvices firent qu'on ¡-oi
l'épargna aux Mes 5 mais il eut enfin
ordre de venir rendre compte de fes
adions à la Cour. J1 s'embarqua dans
un Vaifleau de Nantes de 31. Canons
appelle le Saint Jean-Baptifte avec fa
femme, & beaucoup d'autres paiïagers
à la fin de 170S. lis furent battus d'une
fi furieufe tempête, qu'on n'a plus entendu
parler du Vaifleau , ni de ceux
qui étoient dedans.
J'ai cru devoir rapporter tout de fuite
i tout ce quiregardoit l'affaire de S.
Chriftophle, fansfuivrc l'ordre de mon
Journal, ôc cela pour la' commodité du
Leéteur.
La partie Françoife de cette Ifle, qui
étoit la mere de toutes les Colonies à
été cedéc aux Anglois par la derniere
Paix conclue avec eux à Utrecht en
1713.
C H A P I T R E XX I I L
0 » fe prépare à ïa Gnadeloupe a recevoir les Jnglois. ChaJJe deRamierî.
SA prife de la partie Françoife
' de l'Ifle de Saint Chriftophle
nous fit craindre que
le General Codrington ne
nous tint trop exaftement la parole qu'il
vrèpa- m'avoit donnée l'année précédente, lorfîcGou
Auger nôtre Gouverneur fit travailler
•verneur fans relâche, & avec tout l'empreilèment
poiîîble à fe metre e hiiade- ' . 1 « 1 • n état de bien reeelou^
t. voir les Anglois , s'ils nous venoient
attaquer.
Nous vifitâmes enfemble tous les
P o f t e s ^ e l'Iflc , oil les Ennemis pou--
voient faire des defcentes , & j'y traçaitous
les retranchemens qui nous parurent
propres pour couvrir les lieux,
nous donner de la facilité à repouifer
ceux qui s'y prefenteroient. Après avoir
mis les chofesen train, tant au For t de la
BaiTeterre que Je long delà côte, qu'on
jugea à propos de fortifier, nous allâmes
au Qiiartier des trois Rivieres, oÏj nous
demeurâmes une femaine entière.
M. de la Malmaifon Lieutenant de
Roi de cette lile, qui a une Habitation,
& une Sucrerie dans ce Quartier, convia
M. le Gouverneur à une partie de Chaiîc
de Ramiers, oii nous eûmes trop de plaifir,
pour ne la pas rapporter ici.
Les graines des bois d'inde qui étoient
meuresavoient attiré une infinité de Ramiers,
car ces oifeaux aiment paffionnément
ces graines, ils s'en engraiflent à
merveille, & leur chair en contrafte une cUff'
odeur degerofle,Sc demufcade tout-àfait
agreable. Nous nous rendîmes fur les ""
fcpt heures dans un endroit oùily avoiif
bcaubeaucoup
F R A N C O I S E S DE L'A M E R I CLU E. ?4Î
de ces arbresj nous y trouvâmes
une feuille fur le bord d'un ruifieau
où l'on avoit mis le vin à ratraichir. A
cinquante pas fous le vent de cetendroit,
on avoit établi la cuifinc, avec une ample
pile de bois, qui fut réduit en char- ^
bon pour les befoins des Chafleurs.
C'étoit fous ceî arbres ou étant alTis,
8c en caufant nous entendions les Ra-
L e plaifir de cette Chafle , cil que i7oi>
chaque Chafleur plume fon gibier , le
fend par le milieu, l'enfile diagonale- ai,6réter.
ment dans une brochette, c'eft-à-dire,
d'une cuifle à l'aile oppofée, plante fa
brochette en terre devant le feu, le tourne,
6c le fait cuire, comme il le juge à
propos, fans employer d'autre chofc
ot Ci. ....L.. qu'un peu de Tel, & un jus de citron
miers fur nostêtes, 8c voyions tomber à ou d'orange. Le Ramier veut être mannos
pieds les graines qui leurs échap- gédemi cuit,&: pour ainfi dire,encore
poient, ou qu'ils égrainoient en man- tout faignant j c'eft une er reur, que les
géant. Alors fans autres fatigue que celle Medecins ont introduite dansle monde, -
que nous avions eue à nous tranfporter de manger la plupart des viandes tellefurlelieu,
nous entuyionsà difcretion, ment cuites, rôties,ou boiiillies,qu'elnous
avions le plaifir deles voir tom- les n'ont prefque plus rien de leur fuc.
ber devant nous, fans que plufieurs coups Les Anglois, Ecoilbisjlrlandois, Améde
tufil, que l'on tiroit fur un même ar- riquains , & autres Peuples du Nord
hrepûtles obliger à s'envoler; ils fe con- font d'un meilleur goût , ils n'ont garde
tcntoient de fauter d'une branche à l'au- de laiflerconfom mer parle feu le fuc de
t r e , e n c r i a n t ,& regardant tomber leurs leurs viandes, il ne leur donnent de
compagnons. Carquand ces oifeaux font la cuiiîbn qu'autant qu'il en eft neceflaigras,
ils font extrêmement parefleuxi re, pour aider la chaleur naturelle, 8c des
il faut, pour ainfi dire,du Canon,pour les le ferment de l'eftomach à les digérer
faire changer de domicile. Uneautrere- plus aifément; auffi voyons nous qu'ils
marque que j•' ai' f"a i•t e ^p lus d'une fois., c^f t font ordinairement plus g r o s , plus gras.
que dans cet état , la moindre dragée
qui les touche les fait tomber; au lieu
que quand ils font maigres, ils fupporteiit
un coup plus fort que celui qu'on
lire à un lièvre. Je m'imagine que dans
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plus forts, 8c plusgrands, que ceux qui
ni vivent que de viandes tellementboiiillies,
qu'elles ne reflemblent plus qu'à de
kfilaiTe, ou rôties à un point, que fans
le lard qui les couvre, ou la fauce, dont
leur embompoint, leurs plumes font plus on les arrofe, elles n'auroient guéres p luj
écartées les unes des autres, £c donnent de faveur que les charbons.
par confcquent plusde jour au plomb} Le Lieutenant deRoiav'oitfait préau
lieu que quand ils font maigres, leurs parer Un grand dîné, auquel on ne touplumeç
étant comme colées fur la peau, cha prefque point, chacun fe contenue
les unes fur les autres, le plomb glifle tant de manger fa chafle j 8c je puis'
dcflîis fans pénétrer plus avant. J'en ay aflurer qu'on ne S'épargna pas. Nous
vû plufieurs qui s'éeachoient en tom- paflames toute la journée dans ce dibant
à terre, à peu près comme un fruit vertiffement, nous foûpâmes fur le lieu ,
trop meur quand il tombe de l'arbre. Le 8c nous ne revînmes qu'aflcz avant dans
Gouverneur tira un coup, qui eut un ef- nuit, 8c aux flambeaux , chez le Lieufet
tout extraordinaire -, il ne voyoit
qu'un Ramier, fur lequel il tira, 8c au
lieu d 'un, on en vit tomber fix.
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tenant^e R o i , fort contens de la Chafle
que nous avions faite, 8c du plaifir que
nous avions eu à manger des Ramiers
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