machines énormément lourdes, elles ne peuvent à caufe de
leur grandeur, entrer dans' l’intérieur de la pagode : on les
cônferve fous des elpèces de remifes ou de hangars qui font
dans l’enceinte de la pagode, ou qui font faites exprès dans
un lieu féparé & dépendant de la pagode. On les fort, on
les prépare, on les orne piufieurs jours avant la fête, & on
arrange fort proprement dans ces chariots les Divinités à côté
les unes des autres.
Bernier dit qu’ii vit porter Jagrenate avec beaucoup de
reipeét ; il ne dit pas qu’il y eût d’autres divinités.
A Viinour, je vis porter le dieu Poillous & Vichnou, iis
étaient mieux .accompagnés que Jagrenate ; il y avoit fur
tout un cheval dont l’attitude était la plus noble que l’on
puiife imaginer.
Lorfqu’ii y a des éléphans on les fait précéder la pro-
ceffion : cet animal hideux par lui-même, celle de le paraître
quand il eft peint & orné à la façon des Indiens. A Viinour
où il n’y avoit point d’éléphans, la proceffion était précédée
par un chameau monté par un Indien, qui battait de temps
en temps, avec les mains, for un petit tambour, appelé
tam-tam ; immédiatement après, marchoient deux longues
files de'flambeaux.
Ces flambeaux font des elpèces de réchauds plus creux
que larges, qui font au bout d’un bâton de trois à quatre
pieds de longueur, & que l’on remplit de bouze de vache
bien féchée au ioleii; on y met le feu & on i’arrofo de
temps en temps avec de l’huile, ce qui forme beaucoup de
fumée & une odeur fort délàgréable : c’eft-Ià tout l’encens
qu’ils offrent à leurs divinités; foi vent les chariots traînés pal
«ne multitude d’indiens, avec des cordes.
Des
Des danfeufes vêtues de b la n c , au nombre de d ix ,
marchoient fur deux rangs; & précédoient immédiatement
ies chariots.
A la tête de toute la proceffion était le maître des cérémonies
; de temps en temps il fonne une petite clochette,
lâ proceffion s’arrête alors, & les danfeufes, danfent devant
l’idole pendant un petit moment, après lequel la proceffion
reprend fa marche.
Tel eft l’ordre de la proceffion des chars que je vis ; on
palfa une fois devant la pagode, & ia proceffion s’y repofa
plus long-temps qu’ailleurs ; les danfeufes y étalèrent auffi
plus de favoir faire, & firent des tours de force finguliers.
Je ne perdis rien du coup - d’oeil de Cette proceffion,
j’eus le bonheur d’y rencontrer un Négociant de confidération
demeurant à Pondichéry, attaché à la Compagnie des Indes,
qui me reconnut; il appaiia quelques murmures qui avoient
commencé à fe former parmi les Indiens, quand ils me
virent au milieu d’eux ; de forte que cet Indien me procura
la liberté de me promener au milieu de la proceffion tant
que je voulus ; de ia foivre & de contempler à mon aife
toute la cérémonie, les chars & les danfeufes. Il y en avoit
pkifieurs de grandes, bien faites & fort jolies.
Je n’ai pas remarqué d’autres Angularités à cette proceffion ;
fi i’on veut en favoir davantage for cet aéte religieux des
Indiens, on peut confoiter le premier volume des Cérémonies
religieufes, & c. qui parle des procédions de Vichnou, &
principalement d’une d’Efwara, vue par Pietro délia Valle,
& rapportée dans fes Voyages : on y verra un curieux détail
des cérémonies que ce Voyageur a vues , & des Angularités .
remarquables qu’il y a obfefvées.
Tome I, Y.