mouillent à côté l ’un de l’autre, & là ils font leur échange ; &
c ’eft ce qui nous arriva : ou les Hollandois font trop foibies pour
s’oppofer à,.ces manoeuvres, ou iis n’ont pas le droit exc iufif cfo
commerce du Détroit.
i I f ferable que les- Hollandois ne confervent Malacca que pour
faire faire k fortune à un feui homme ; le Gouverneur y eft abfolu
en to u t , i l fait à lui feui tout le. commerce de Malacca f if ne ie
permet à qui que ce fo it , fi ce n’eft à quelques perfonnes de fes
plus a fïid é s , encore ii faut qu’elles s’affocient avec Iüi ; car il ne
le leur pennettroit pas pour leur compte feui.
I l p en fit m’arriver une petite aventure à M a la c ca , pour n'avoir
pas appris le Chinois avant mon départ de Paris.
J e vous, ai dit q u’il y a une douane a M a la c c a , & que' les Chinois
en fon t.le s fermiers. O r , vous vous, rappelez que M . Pignon
m’avoit chargé de remettre, à votre ami., a Mala cca, une boite da
3 pieds environ de lon gu eu r , qui contenoit une V ie rg e & quelques
ornemens d’éghle 5 j ’avois cette boite dans ma chambre, & iorfqus
je fus arrivé: à Malacca , je rendis compte à M . Bertelm de h
corn million dont on m’avoit chargé pour lui : deux al trois jours
après , il me pria de lui remettre-fa boîte: I l me donna, fa. pirogue,
armée de trois à quatre Lafcars, dont je n’entendois point, le langage,
pour me conduire à- mon bord ; il m ajouta qu il étoit inutile .que
’apportaffe à terre ia b oîte , qu’ il me prioit de-ia porter directement
à-foit bord , & de la remettre à l ’Officier de garde. J ’exécutai très*
ponctuellement fa volonté ; j ’allai à mon b o rd , je pris ma boîte , fa
mis dans- ma pirogue-, & fis figne à mes Lafcars de déborder ;
M . Bertelin les- avoit inftruits de la marche qu’ils deveitnt. tenir,
il n ’étoit queltion pour moi que de me laiffer conduire ; ôn travaiiioit
à notre bord à reprendre quelques- coutures, & il y avoit un Ras
qu'on nous avoit envoyé de Malacca; Comme j ’ailois déborder, deux
à trois C h in o is , auxquels je n ’avois fait nulle attention-, voulurent
à toute fo rc e entrer dans ma p ir o g u e ,.& arrêtoient mes Lafcars qui
étoient prêts de les recevoir ; je crus facilement que ces Chinois
demandoient à mes- Lafcars de les recevoir pour les defçendre à-terre.,
d’autant mieux que nous a-v-ions à bord beaucoup -de ces Meilleurs;
M o i, qui trouvois déjà ma pirogue affez charg ée , & qui n’aimoià
point ces frêles nacelles, je cherchois à écarter mes paffitgers ; mais
j ’ignorois que ces pa-ffagers fufTent des Commis de la douane dé
Malacca , qui vouloient me fitivre &’ accompagner ma boîte , pour
voir où j ’aliois la por ter , en même-temps ils me parloient dans leur
langue, fans doute ; -enfin n’entendant -point ee -qu'ils -me difoient,
voyant qu’ils s'obftinoiem ^ vouloir entrer dans ma piro gu e , & -qu’un
d’eux avoit déjà u n pied fur le bord, je faifis de la main d'un de mes
Lafcars fa -rame , je m ’en armai, & commençai à faire la démonf-
tration d'en décharger un grand coup fur le 'Commis-Chinois le plus
avancé., V ous les euffiez bientôt vu tous les trois-reculer & ïë retirer:
je fis alors figne de partir, & bientôt nous nous éloignantes: du bord.
Lo rfque nous fumes au la r g e , j ’aperçus une p iro gu e , q u i , fans
chercher a nous joindre , paroi fi oh nous obierver ; mes Lafcars
parloient entr eu x, & s en entretenoient, ilàns ‘doute : j ’aperçus trois
Chinois dans cette pirogue , qui m'ayant vu acofter un des VyifTeaux
de la rade, firent fo r c e de rames & gagnèrent la terre. N e foup-
çonnant rien du to u t , je reliai quelque temps -avec l ’O ffic ie r de
garde du Vaiflèau de M . Bertelin, & ne revins à terre que pour
dînér. Les Commis avorent déjà fait leur rapport à la D o u a n e , &
on avoit déjà dépêché chez M . le G o u v e rn eu r , pour l’informer dé
cette affaire ; mais elle en relia là. M . Be r te iin , % mon arrivée ,
m inftruifit de la plainte formée contre m o i, & principalement contré
lui-meme : je lui racontai lé fait exactement; ii fe trouva -conforme
au récit des C om m is , qui furent affëz honnêtes gens pour ne point
1 aggraver. M . Bertelin m’ajouta qu’heureufement je ne les avois
pàs‘frappés ,'ca r cela aurait pu lui faire'une affaire. Votre ami n’étoit-il
pas plus en faute- que m o i, & n ’auroit-il pas dû m’avoir donné un
interprété ! Mais il mé dit qu’il n ’avoit pas prévu qu’on nous avoit
envoyé des Commis à b o rd , pour empêcher que nous ne fiffions
ie commerce, c ’elt-à-dire la contrebande, félon les Hollandois.
Au relié, M . Berrelin répondit comme moi, que* ces Commis avoient
leur pirogue qu’ils- auraient dû s’en ferVir pour me fuivre &