le corps à la façon des gens du pays ; par-deiTus ce pagne , elles
portent un* rùbe de chambre qui leur defcend ju fq u ’aux talons, &
qui ferme exactement par en haut.
L e Fort de Malacca eft fur le bord de la m e r , de l ’autre côté
de la riv iè re , fur laquelle il y a un double p on t- Ievis. L ’endroit
où eft ce Fort , .eft une petite montagne , fur le fommet de
laquelle eft le Temple des Hollandois , & à cêté r le mât de
pavillon : le Fort ne confifle que dans une muraille qui environne
la montagne par le pied ; cette muraille eft bonne & fo r te , garnie
de place en place de gros canon , en bon état ; elle eft défendue,
fi cela le peut dire, par des efpèces de tours moitié carrées, moitié
ron d e s, qui font placées dans les angles de la muraille, & qui font
également garnies de g ro s , canon; un mauvais petit folfé prend à
la rivière, & allant fe terminer, à la mer , achève d’enfermer la
citadelle : c ’eft en cela que confifte le Fort de Malacca ; il eft du
temps des Portugais , les Hollandois n ’y ont rien ajouté.
Quand on eft entré dans le F o r t , on trouve au pied de la muraille
une alfez jolie rue qui fait le tour de la montagne. O n y voit des
petites mai ions allez propres, où logent les Employés de la Compagnie.
L a maifon du Gouverneur eft grande & belle.
Je ne vous parle pas des relies de deux édifices qui font dans le Fort,
dont l’un eft une efpèce de chapelle qui tombe en ruine ; l ’autre, dont
il ne relie que des murs fort élevés qui menacent de leur ch ute , paroit
avoir été un couvent. L e relie de la montagne eft couvert de Cocotiers
& de Bananiers : on p ou rrait, à la vérité , faire de cette
montagne un endroit relpeélable, en la fortifiant régulièrement ;
mais ce ferait un ouvrage fort inutile, fi l ’on ne fortifioit pas en
même-temps une petite montagne vers l’E ft qui domine le Fort.
V o u s v o y e z , mon cher ami, par cette courte defcription dé Malacca,
que rien ne feroit fi aifé que de s’en rendre le maître, même avec
de très-médiocres forces. Pour toute opp ofition, on ne trouveroit
q u ’un Fort incapable de la moindre réfiftance, & une garnifon a
peine de trois cents hommes ; gens prefque tous de mauvaifè volonté ;
o r , le grand nombre d’établilfemens que les Hollandois ont à
garder dans les mers de l’In d e , les met dans l ’impuilfance de pouvoir
augmenter cette garnifon : deux VailTeaux de guerre qui paiferoient
aâtiellement par Malacca, les alarmeraient ( a ) ; de plus, l’exiftence
d e s Hollandois à Malacca eft tout-à-fait précaire. Ils ne polsèdent
guère de terre qu’à une lieue aux environs de Malacca. Ils ne la
cultivent & ne la font point cultiver; tout le riz qu’ils confomment,
ils le tirent du dehors. Les Malais, prefque toujours en guerre avec
eux, ne leur fournilfent aucune efpèce de vivres ; de façon q u ’on y
eft èxpofé à la famine : par cette railon le riz y étoit très-cher lorfque
j ’y arrivai.
A u relie , Malacca ne fert prefque pas aux Hollandois. L a C om pagnie
n!y fait que très-peu de commerce ; & cet endroit ne peut
que lui être à charge : il eft vrai que le commerce du Détroit eft
très-lucratif, & que les Hollandois prétendent être les maîtres de
tout le Détroit. J ’ignore fur quel fondement cette prétention eft
appuyée. Les autres Nations, & fur-tout les A n g lo is , leur prouvent
fê contraire; puifqu’ils ont continuellement des VailTeaux à commercer
dans le D é tro it, à la.face des Hollandois, & q u ’ils fe font
même rendre leurs effets, après que les Hollandois les ont confifqués
comme contrebande, ce qui venoit d ’arriver il n’y avoit pas longtemps
en core, vis-à-vis d’un vailîèau Anglo is.
A Malacca il y a une douane , dont la ferme eft entre les mains
des C h in o is , & les Vailfeaux mouillés en rade ne peuvent pas faire
le commerce de Vailfeau à Vailfeau, fans payer les droits d’entrée
& de fortie , comme 11 les marchandifes e'toient defcendues à; terre ;
les gros & forts Vaiilèaux ne iailîènt pas de le faire quelquefois, & le
Gouvernement de Malacca n ’ofe pas approfondir leur conduite ; ceux
qui ne peuvent pas faire comme les gro s, & qui craignent dlêtre
confifqués ¡¡¡fe tirent d’affaire autrement : ils conviennent entr’eux
des conditions ; puis ils appareillent à un demi-jour de différence,
fe rencontrent dans le détroit à douze ou quinze lieues de Malacca,
( n ) ‘ Ils prirent/ombrage, lorfque j’étôîs• à Pondichéry, de deux gros
.VailTeaux françois , qui y relâchèrent en allant en Chine.