lieues à faire dans i’Eft; ce chemin qu’il eft ïmpoffible dé
faire direélement, à caufe des vents de Sud-eft qui en
empêchent, oblige les Vaiffeaux d’aller à la Bouline, & de
diriger leur route dans le S u d , au plus près du vent pour
gagner les parallèles de 3 7 à 38 degrés, afin de trouver
les vents d’Oueft : ce parallèle eft celui des îles de Saint-
Paui & d’Amfterdam. Cette manoeuvre fuppofe qu’au-delà
du 35.° degré de latitude, les vents dOueft font conftans,
au moins pendant l’hiver de cet hémifphère.
La plupart des Navigateurs font fi fcrupuleux obfervateurs
de cette maxime, que quoiqu’ils Aient fouvent des vents
favorables, avant que d’être parvenus à cette grande latitude,
ils s’obftinent cependant à y aller, en négligeant abfolument le
chemin en longitude. Je crois que-cette pratique eft un peu
trop ftriéte, & je pènfe qu’il faut, autant qu on Je peut, faire
du chemin à ,1’E ft, fur-tout iorfqii’on eft parvenu à 3 2. degrés
de iatitude; qu’il eft inutile, pour mettre la route à lE ft,
qu’on foit à 3 7 degrés; & enfin que le meilleur parti eft de
fe maintenir, autant qu’on le peut, entre 32 & 35 degres,
les,vents & les mers y font moins à craindre que par les
37: 011 38 degrés, où l’on a des temps terribles &i des mers
très-dures.
Des Obfervatioiis que de bons Marins mont communiquées
, & ma propre expérience, m’ont appris que les vents
d’Oueft ne font pas aufli conftans, au-delà du 3 5 •' degré
de latitude, qu’on a pu le fuppofer juiqu a prefent, & qu on
y voit beaucoup plus fouvent ceux du Nord au Nord-eft
& au Sud-eft: les vents de Nord-oueft qui feraient bons ;
y font très lares,
mon voyage à Manille, les vents les plus cohftans
que
que nous trouvâmes, depuis le 35.° degré jufqu’au 3y .e &
demi, furent ceux du Nord-eft au Sud-eft, qui nous étoient
tout-à-fait contraires; nous elfuyames auffi dans celte Zone
plufieurs coups de vent de la partie du Nord-eft, & pendant
plus de douze jours que nous reliâmes dans cette bande,
nous ne pûmes prelque pas faire de chemin à i’Eft ; parvenus
au 3 y .e degré 2 2 minutes, à peine pumes-nous avancer d’un
degré en trois jours, dans des parages où nous comptions
trouver des vents forcés de la partie de l’Oueft ; nous étions
aux environs des îles de Saint-Paul & d’Amfterdam, qui
nous forcèrent trois fois, en trois jours, de virer de bord,
dans la crainte de les rencontrer pendant la nuit : là, nous
eiîùyames encore un violent coup de vent du Nord-eft;
nous étions alors au 10 Juin, & nous avions quitté lile
de Bourbon le <j Mai ; nous primes enfin le parti de remonter
vers le N o rd , & nous reliâmes entre 3 4 & 3 5 degrés, ou
nous fumes poullës par un bon frais de l’Oueft égal &
confiant.
Les vents d’O ueft, dans cette faifon, feroient-ils moins
conftans au-delà du 3 5 & du 3 6.e degré de latitude, qu’ils
ne le font entre le 3 2 & .le 3 5 .e 1 Ce phénomène, s’il étoit
bien conftaté, feroit fort extraordinaire. Cependant ce que
je viens de dire fembleroit le prouver; le fait fuivant
paroît le confirmer encore.
Le Galion de Manille, qui va tous les ans de cette ville
à Acapuico, avoit autrefois coutume de. s’élever dans le
Nord jufqu’au 3y .e degré de latitude, & fouvent plus, pour
y prendre les vents d’Oueft; là, les Efpagnols étoient contrariés
& battus ' de fréquentes tempêtes de la partie du
Nord-eft : plufieurs de leurs Vaiffeaux s’y font même trouvés
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