avec moi jufqu’à Paris, où elle eft arrivée en très-bon état,
& où je la conferve comme un meuble curieux, & comme
un monument qui me rappelle toujours avec pladfir la mémoire
d’un ami auflî vrai qu'était pour moi Don Fftevan Roxa»
y Melo.i
' Les F.fpagtiqls n’occupent peut-être pas la vingtième partie
de ce beau pays dont je parle; encore ne tirent—ils- aucun
parti de cette petite portion , ces îles font à charge au Roir
malgré ce qu’il tire tous les ans de lès fujets de ces îles, &
qui monte, félon un état que j’ai pour l’année 1 7 4 9 , à
!2 millions 25 5 mille 122 livres, argent de France; M eft
encore obligé de faire paflèr chaque année, de Mexique à
Manille* 1 10 mille piaftres( 527 mille 500 livres): pour
couvrir les frais que lui occafionnent ces îles; cette dépenfê
monte à plus de 620 mille pial très. ( 3 millions 255 mille
livres) L ’état Eecléfiaftique, y compris-l’entretien des différens
Ordres Religieux qui delferventdès-Gures des Philippines i.
abforbe une partie de cette dépènïèy puilqu’ii lui en revient
plus de 5 2 j mille livrés1; mais le Pape, pal- une de lès
Bulles, a donné, m’ont dit les Efpagnois à Manille, la
eonceflîondes Philippines & de Manille au roi d’Ffpagne,
à condition qu’il entretiendrait à lès frais la religion Chrétienne
dans ces Mes.
L e 10 Juilfet 1 7 6 7 , je reçus réponié aux lettres que j’avots
écrites en France l’année précédente 176 6, avant mon départ
de l’Me de France : ces nouvelles vinrent par le Mexique &
Acapuleo, dans le galion k Saint-Charles ; 011 m’annonçoie
des lettres de recommandation de la Cour d’Efpagne. M. le
Due de Chaulnes fit, du confèntement de M. le Duc de là:
.Yriilière, toutes les démarches néceflâires pour que la cjioiè
d a n s l e s M e r s d e l ' I n d e . 27
ne languît pas. Ma lettre trouva l’illultre M* Clairaut- mprt;
M. de la Lande ne négligea pas de s’inte'reiîèr à cette nouvelle
entreprilè. II n’étoit pas poffible d’exiger plus de célérité par
mer : il n’y avoit pas eu un feu! moment de perdu. Audi
Je Gouverneur de Manille, à . qui je les fis v o ir , homme
inquiet, mal intentionné pour les François en général, &
qui ne me voyoit à Manille quavec. un oeil jaloux, peu
accoutumé d’aiileurs à voir aller les nouvelles fi vite par mer,
raffembla les époques de toutes mes lettres & de mon départ
de i’Ifle—de-France, celles du départ de M. de Calèins de
Manille. II fit une combinaifon de toutes ces époques, &
il en conclut que je ne pouvois pas avoir encore reçu de
réponfe à mes lettres, & que celles que je lui avois fait voir
étoient néceffairenient des lettres fuppofées, parce qu’il étoit
impolfible, félon lu i, que je puife parler de M. de Cafeins. -
Je demeurais chez un Négociant François, fort riche,
dont la fille avoit époufé le Secrétaire, du Gouvernement,
Don Jofeph Raon avoit fait part de fon foupçon à fon Secrétaire:
celui-ci en informa fur le champ fon beau-père,
qui me rendit la cholè mot pour mot. Je m’en plaignis
amèrement au Secrétaire, qui tâcha d’exculer fon Maître le
plus qu’il put; mais il gronda beaucoup fon beau-père de
m’en avoir parlé.
C e loùpçon odieux & injurieux me caùfa beaucoup de
chagrin, & me donna auiîi quelque inquiétude pour le relie
du temps que j’avois encore à relier à Manille. Je rendrai
ici juftice à Don Eftevan Roxas y Melo & à Don Andrès
Roxo. Je dépofai dans leur fein les fujets de plainte que j’avois;
je trouvai dans ces amis toutes les confolations poflibles.
Je ne dois pas palier fous fiience Don Feliciano Marqués,
D |