d’elle : cependant je conviendrai volontiers que l'en dro it, quoique
petit-, -eft très-joli. O n pourrait le rendre -très-agréable & beaucoup
plus confidérable. Sa rade elt très-fréquentée, & prefque toujours
.garnie de quantité de Vaiflfeaux de toutes les parties de l ’Inde; il y
en avoit quinze lorfque j ’ y palîai : c ’eit ce concours de tant de
Vaiilèaux qui rend le nom de Malacca fi célèbre, & qui l ’a fait palier
pour une des .principales foires de l ’Inde.
Malacca eft une elpèce de ville aftez mal b â tie , & compofée de
trois rues principales, parallèles entr’eiles & à la côte ; la première
ou la plus confidérable de ces trois rues , eft celle qui borde la mer
& qui i e prolonge en quelque forte le long du rivage ; elle eft très-
propre , elle a d’aflëz jolies maifons à un é ta g e , & des -arbres d’un
côté , lefquels, par leur verdure , font de cette rue une demeure
fort agréable : la fécondé rue n ’eft pas fi confidérable ; la troifîème
ne mérite pas qu’on en parle.
L e s rues de traverfe font remplies de maifonnettes fort mal-propres;
toutes ces rués font peuplées par des Chinois, des Maures ou
plus exaélement M o g o ls , des Malabars., & par quelques pauyres
Portugais : on y trouve très-peu d’Hollandois ; ceu x-c i habitent
dans les deux principales rues ; ce font prefque tous gens au fervice
de la compagnie de Hollande ; dans la rue qui borde le r iv ag e, logent
tous les Etrangers qui -paiTent quelque temps à Malacca« foit en
hivernage, foit autrement.
Malacca eft donc un compofé de plufieurs Nations; de Maures,
de Malais, qui font les Naturels ; de Por tuga is, de C h in o is , & de
quelques Hollandois. Cette peuplade eft bornée d’un côté par la mer,
du côté des terres par une jolie rivière & par un mur qui achève
de la fermer; le mur eft peu épais, & de terre à la hauteur de 3 à 4
pieds, avec des eipèces de redoute de diftance en diftance ; le tout
incapable de faire la moindre réfiftance, ni de les fituver d’un coup
de main, n ’ayant ni défenfes ni fo i f é , mais allez bon contre les
incurfions & les attaques des gens du pays.
C e s dilférentes Nations,, hor-s les Por tuga is, ont leurs Temples
D A N S LES A l E R S DE L ' iN D E . 6 0 3
dans la ville ; les Chinois y en ont u n , les Maures une M o fq u é e ,
& les Malais la leur, car ils font Mahométans.
Les Portugais o n t , à une demi-lieue hors la v i lle , leur É g l i f e ,
delfervie par un Religieux de l ’Ordre de Saint-François , & dépendant
de I É veché de Timor ; il a fous là direétion beaucoup de
Catholiques Romains, dont ctn fait monter le nombre à plus de
deux mille; on y comprend quelques François, qui font la plus
grande partie des Troupes q u ’ont les Hollandois à M a la c c a , & qui
ne montent pas en tout à trois cents Hommes,
Les Portugais vont a leur églife par un chemin fort agréable-,
étant garni de mai ions fur les deux cô té s, de grands jardins plantés
de Cocotiers & de quantité d’autres arbres-; on y eft prefque toujours
a 1 abri du Soleil : j ’y v is , les deux fois que je fus à la m eflè ,
un très-grand concours de monde.
L e C u ré de cette paroifïè eft dans .une allez grande- misère,
Ac ion eglilè ie relient de la fituation; il vit des aumônes que lui
font les Vaideaux qui palfent à Malacca en relâche : les Portugais
de Malacca font ou trop peu libéraux pour l ’aider, ou trop pauvres
pour pouvoir ie faire , mais ne manquant ni d ’orgueil ni de
hauteur.
Par cette même raifon, leur églife eft très-mal entretenue & fort
mal bâtie ; les murs ne font élevés qu’à 3 à- 4 pieds de terre : des
piliers de b o is , à double ran g , forment le refte du corps de l ’églife ,
& foutiennent un toit de paille qui tombe à 8 à 1 o pieds de terre
feulement, en lailïànt l ’églife à jour de tous- les côtés-; il y a des
portes, mais elles n’ y font que pour la forme : l’Autel & la parure
répondent a là magnificence & à la ftruéhire de l’édifice. Si cette
églife eft dans cet état h on teu x , les Portugais ne peuvent s’en
prendre qu’à eux-memes ; car on m’a alluré que les Hollandois leur
failfoient la pleine & entière liberté de -la bâtir, & de l ’orner beaucoup
mieux, qu’elle ne l ’eft.
Les femmes des Portugais font fingulièrement habillées à Malacca,
foit qu’elles fortent pour aller en v ifite , foit qu’elles aillent à l’ëglife;
elles ont prefque toutes un p a g n e , avec lequel elles s’enveloppent
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