pierre du [erpeut à chaperon, de ia groffeur d’un oeuf de poule;
que cette pierre ell un excellent antidote contre le venin
provenant de la morfure des ferpens. Cet auteur me paroît
débiter à ce fujet plufieurs rêveries ; quoiqu’il penfe que
cette pierre foit une compofition dont les Bramines ont
feuls le fecret; je n’en ai point entendu parler à la côte
de Coromandel.
Koempfer, Voyageur beaucoup plus fenfé que Tavefaier,
entre dans un très-grand détail fur ce ferpent ; il rapporte fort
au long l’hiftoire des danfes du ferpent capele, page y S j &
fuiv. &c. il donne à cette occafion la deicription de cet animal;
deicription conforme à ce que j ai vu ntoi - meme de ce
ferpent à la côte de Coromandel.
J’ai été témoin de ces danfes, comme Koempfer, ce qui
pie procure aujourd’hui l’occafion de faire fur fon texte deux
à trois remarques, qui ferviront encore a répandre quelques
traits de lumière fur ce que je viens de rapporter au fujet
des prétendues danfes des ferpens dans l’Inde.
Il me paroît premièrement que Koempfer eut véritablement
affiiire à quelque charlatan ou baladin, comme il nomme
ces gens qui vont de ville en ville & de maifon en majfon
dans l’Inde, faire voir les danfes de.leurs ferpens pour gagner
quelqu’obole. Les préparatifs de l’Indien qui étoit muni, «fit
cet Auteur, d’une certaine quantité d’une eljfece de racine
dont il avoit grand foin d’en renfermer dans fa main une
portion quelconque, afin de tromper fes fpeélateurs, en leur
faifant entendre qu’avec le fecours de cette racine, il pouvoit
impunément livrer combat à ce dangereux reptile ; tous ces
apprêts, dis-je , ne font en effet qu’une adreffe de charlatan
pour vendre fa racine à ceux qui auroient la fimtaifie de
toucher
toucher le ferpent ; & il ne permettoit véritablement à
perfonne de le toucher, s’il n’avoit. auparavant de ce prétendu
préfervatif.
Le jeune Indien que j’ai fait venir plufieurs fois dans mon
Obfervatoire, étoit un enfant de quinze à feize ans au plus.
Il me parut de la plus grande naïveté ; il n’étoit mûnr
d’aucune racine, d’aucune herbe, d’aucun prétendu préfervatif;
il m’engagea à agacer comme lui ion ferpent , & à recevoir
fes aiîâuts fur le poing, lans que je lui en euffe témoigné la
moindre curiofité : où je reconnois encore l’ingénuité de cet
enfant, c’eft dans l’aveu qu’il me fit de la nourriture avec
laquelle if entretenoit la vie de fes ferpens pour les dompter
plus facilement; pendant que Koempfer dit pofitivement que
la manière dont les Charlatans de lInde nourriffent leurs ferpens >
en ne leur laifant point paître ( pafcere ) d ’herbes propres à
leur faire recouvrer en peu d'heures le venin qu'ils leur ont
ôté, eft un fecret que ces gens-là fe réfervent : quelle plus
grande preuve encore peut-on me demander de l’ingénuité
de mon jeune Indien, que de m’avouer les précautions qu’il
étoit obligé d’avoir pour fon ferpent nouvellement pris!
Le tour de fable, dont je vais bientôt parier, n’ell-il pas
encore en faveur de fa bonne foi ! Il avoit fait plufieurs fois
chez moi ce tour, fi adroitement; & ce tour m’avoit, par
cette raifon, fi fort frappé, que j’étois dans la plus grande
impatience de lavoir en quoi confifloit' fa magie. Un de
mes amis, Çonfeiller au Confeil Supérieur, lui propoia de
nous l’apprendre ; le jour fut fix é , je me rendis chez le
Çonfeiller ; mon jeune Indien s’y trouva; il fit fon tour de
fable à découvert, en nous l’enfeignant; en forte que je le;
répétai d’après lui & en là préfence.
Tonte I. Q