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m’avoient fourni des matériaux pour dreiTer une Carte de là
côte de l’Eft de cette île, beaucoup plus ihre pour la Navigation
que tout ce qu’on avoit eu jufqu’à ce moment. Tout
ce que j’avois pu recueillir des plus habiles Marins qui fré-
quentoient cette côte & ma propre expérience, m’avoient
auffi mis en état de compofer un difcours fur les différentes
routes que l’on doit fuivre dans les voyages de l’Ifle de
France à Madagafcar & à l’île de Bourbon, pour l’aller &
pour le retour; ces mers étant fujettes à une efpèce de vents
périodiques ou de mouflon, qui fouillent pendant fix mois
du Sud-eft, & le plus fou vent du Nord-e ft pendant les
autres fix mois de l’année; de façon que les variétés qu’on y
remarque, viennent plutôt du Nord-eft au Sud-oueft en paffant
par le N o rd , que du Nord-eft au Sud-eft par l’Eft : ce même
difcours traite des moeurs, ufkges & coutumes des différens
peuples de Madagafcar qui habitent une partie de la côte de
l’Eft de cette île ; car je ne prétends pas donner la delcription
des moeurs de toutes les différentes nations qui peuplent cette
grande île. En général, les peuples des bords des mers ne
donnent qu’une idée imparfaite de ceux qui habitent le
centre du pays: ces habitans du bord de la mer à Madagafcar,
d’après ce que j’ai' entendu dire à des gens qui
avoient pénétré cinquante lieues. & plus avant encore dans
les Terres, font, comme en* Europe, des efpèces de
Colonies très-différentes, dans leurs ufâges, des autres peuples
de la même île. Les peuples de la côte de l’Oueft de Madagafcar,
Félon les relations que j’en ai eues, font encore très-
différëns de ceux de la côte de l’Eft : mais nous fréquentons
très-peu celle-là ; & notre commerce à Madagafcar le borne!
prefque entièrement à la côte de l’Eft.
d a n s l e s M e r s d e l ’ I n d e . x j
■ Malgré la brièveté que je dois m’impofer dans cet extrait,
je ne peux me dilpenler de dire un mot au fujet des attentions
& des égards que les différens Chefs de Traite pour
la Compagnie des Indes à Madagafcar ont eus pour m o i,
dans toutes les circonftances, & principalement M. de Laval,
Capitaine de Vaiffeaux de côtes , & premier Supercargue à
Màdagafcar, avec lequel j’ai fait les voyages à Foulpointe &
à la baie d’Antongil. Je me rappellerai toujours avec grand
plaifir ces voyages que j’ai faits avec tout l’agrément dont
puifîè jouir un Voyageur.
L ille de France étoit mon féjour ordinaire. J’y ai obfcrvé,
fur-tout les réfraétions aftronomiques, depuis l’horizon jufqu’à
[XO degrés de hauteur au-deffus.
M. le Juge, premier Confeiller, dont j’aurai plus d’une
fois occafion de parler dans la fuite, m’avoit prêté un logement
d’où je voyois la partie de l’horizon de la mer, où fe
couchoit le Soleil pendant l’hiver. C e fut de la maifon de ce
galant homme, que je fis pour la première fois une remarque
fingulière au fujet du coucher du Soleil; remarque que j’ai
confirmée depuis à Pondichéry, & qui forme en partie la
matière d’un- Mémoire, que l’on trouvera dans la fécondé
partie de ce volume, fur les réfraélions horizontales: j’ai fait
auffi mon étude de l’hiftoire naturelle de l’Ifle de France, dont
i ’ai compofé une defcription hiftorique. J’ai tâché de détruire
■un préjugé que je trouvai univerfellement répandu dans cette
île, & dans lequel je fus moi-même, dans les commencemens
de mon féjour en cette Colonie: on croyoit qu’elle avoit été
culbutée de fond en comble ; que les pierres dont la fiirface
eft femée n’étoieiit que des pierres lancées ; enfin que l’île
■n’avoit été, pour ainfi dire, qu’un volcan. Je crois prouver