p la c é s , comme je vous l ’ai marqué ci-deflus , tout le relie eft aulfi
exaél qu’il puifle l ’être : auflî notre premier P ilo te , quoique Por
tu g a is , ne fe fervoit point d’autres Cartes que de celles de M . Daprès,
il ne faifoit aucun cas de celles dont ufoient les autres Pilotés f e
confrères ; ' il eft vrai que pour la pratique , il ne fe fervoit pas
de I’inftruélion de M . D ap rè s, il s’en écartoit en bien des points,
& il m’alfura q u’il abrégeoit, par-là , confidérkbletjjent fes voyages.
Depuis notre départ de M a la c c a , jufqu’à la fortie du détroit,
nous ne fumes pas un jour fans voir des orages fur la prefqu’île , qui
fîloient le long de la côte du Nord-oueft au Sud-eft , fans venir tout-
à -fa ità nous ; nous entendions gronder le tonnerre, & c ’étoit tout.
V o u s Voyez par-là que la mouflon doit être interrompue dans tout
le détroit,' comme effeélivement la trouvent telle tous les Vaiflèaux ;
cette même mouflon reprend fttot qu on quitte le détroit & qu oit1
s’éloigne des terres. Mais voici ce que m on t dit les deux premiers
Pilotes de notre V aifleau; la grande pratique-que les Pilotes Portugais
ont des voyages de i ’ ïn d e , les met a portée de faire quantité
de petites remarques bien utiles, puifqü’elles leur fervent à abréger
leurs v o y a g e s , & de plus habiles Marins pourroient bien les ignorer.
V o ic i donc ce qu’ils m’ont dit :
Que l e long de la côte de Sumatra, on trouve des vents alternatifs à
terre ¿ r du la rge :'
Que les Vaijfeaux qui ont voulu fuivre le milieu du canal, entre le
prefqu’ile de M a la y e & Sumatra, s ’en fon t repentis, fu r - to u t dans
iarrïire-faifon , parce q u ’ils ont trouvé des calmes confdérables, é f deji
fo ib/e s vents, qu’ils n’avaient p a s la fo rce de faire refouler le courant :
Que ces Vaijfeaux ayant cru fortir plus vite, en tenant le milieu du
canal, ont au contraire employé beaucoup de temps, ¿7 fouvent manque
leur voyage :
Que pour fortir promptement du détroit ( c ’e ft-à -d ire , du bras de
mer compris entre Sumatra & la côte de la prefqu’île de Mala ye),
i l vaut mieux acofer cette prefqu’ î l e , que de ferrer Sumatra ,
parce qu’on e f expofé à moins de calmes, Ù" que le voyage e f pat
conféquenl plus fu r :
Q u ’au contraire, pendant la moujfon de l ’O ueft, lorfqu'on veut entrer
dans le détroit, i l f a u t , de préférence, aller chercher la tête de Sumatra
¿ f Pulo-Ronde ; que la fo rce des cour ans ejl f i confidérable, qu’un
Vaijfeau que le calme prendrait en fartant du détroit, p a r exemple à la
vue de P u lo -P e r a , que ce Vaijfeau, d is - je , J i les calmes durent, e f porté
fans rejfources à l ’autre côté du détroit, fu r Pulo-Ronde ou vers Achèm,
c'eft-a-dire, de 6 o à y o lieues dans le Sud-oueft: les cour ans l ajoutent-ils,
pendant les mois de M a r s & d ’A v r il, vont avec une fo rc e étonnante de l ’île
de Ceylan, le long de la- côte de l ’In d e , jufque dans le fo n d du G o lfe
de Bengale, refluent le long de la côte de l ’E f t ou prefqu’île de M a la c c a ,
pourfuivent leur cours vers Sumatra, m e partie entre dans le détroit ; mais
ils fon t beaucoup p lu s fo r t s le long de la côte de Sumatra que fu r la côte
de la prefqu’ île de Ma la cca .
C ’eft fur ces remarques que tous les Vaifleaux de Macao fe
règlent pour fortir du canal de M a la c ca , & ils abrèg ent'confidé-
rablement leurs voyages ; leurs raifons me paroiflènt très-bonnes ,
car fi les terres de Malacca & de Sumatra éprouvent chacune de
leur côté des brifes de terre & du la r g e , ces brifes fe font en fens
contraire, c ’e ft-à-dire , de la partie du S u d , le lo n g de la prefqu’île
de M a la c ca , & de la partie du N o rd le long de la côte de Sumatra :
en conféquen ce, on doit trouv er, vers le m ilieu, entre les deux
terres, un point où il ne fe faflè fentir aucun vent fixe & confiant ;
on doit y trouver à la place , fur-tout en M a r s , A v r i l , Septembre
& O i lo b r e , des calmes & des elpèces de remoux, pareils à ceux que
l ’on rencontre le lon g de la côte de Guinée. .
E n conféquence de ce que je viens de vous dire , nous ne fumes
pas, en quittant P u lo -P in an g , attaquer & ranger P u lo -P e ra , comme
le confeille l ’inftruéliôn françoife ; nous portantes au Nord-oueft &
Nord-oueft-quart-nord, pour doubler Pu lo -Lad a.
L e 13 à midi, nous en étions à quarante-deux milles à l ’O u e f t ,
& nous obfervames 6 degrés y minutes de latitude ; nous primes
notre point de. départ de là.
Nous retrouvâmes ici la mouflon , qui nous conduiiit bon frais
aux îles Nicobar, V o ic i en deux mots notre route :