par exemple, pourraient en favoir davantage: mais ce n’eft
pas dans ces provinces qu’il faut aller pour voir la Gentilité
dans fon lultre, parce que ce beau & magnifique pays a
beaucoup fouffert depuis l’invafion des Tartares. C ’eft bien
dommage qu’un peuple fi doux & fi tranquille foit opprimé
par cette Nation ambitieufe & barbare.
Pour voir donc la Gentilité dans tout fon luftre, il faudrait
aller dans le Tanjaour. C e Royaume, dont le Souverain eft
de la tribu des Brames, eft une elpèce de jardin que fertilité
le Colram, fuperbe fleuve qui prend fa fource dans la chaîne
des Gates.
Les Mogols qui fe font focceiîivement emparés de l’Inde,
8c le font gémir fous le poids de leur tyrannie, n’ont point
encore pénétré dans le Tanjaour.
Le Roi ou Raja du Tanjaour, de cafle Brame, eft fiir le
trône par focceifion, vraifemblabiement dès les commen-
cemens de l’arrivée des Brames’ dans cette partie de l’Inde,
car il y a bien de l’apparence que les Brames ont peu-à-
peu uforpé la Souveraineté dans l’Inde. J’ai déjà dit que cette
elpèce de Tribu a jpiii dans tous les temps de la plus grande
confidération dans le pays;, confidération que lui a attirée là
grande & profonde politique généralement pour toutes les
affaires. Par-là, ils font infenfiblement devenus les miniftres
& les confeils des Princes Indiens, & même des Gouverneurs
ou Nahads Mogols ; & cela a été de tout temps. Néarque,,
cité par Strabon, dit que les Bracmanes demeuraient dans
les villes, qu’ils foivoient les Rois, qu’ils leur fervoient de
confeils, &c.
Il feroit fortinté reffant de lavoir l’époque à laquelle les
Brames, après être venus à bout de faire renverfer le culte
de Baouth 8c de faire recevoir leur religion par le roi de
Tanjaour, fe feront, après cela, par rufes & par leur politique,
emparés du trône pour y mettre un Roi pris de leur
Tribu; car il eft très-vraifemblable que c’eft aulfi l’époque
de la chute du commerce des Chinois à cette côte. Le nouveau
Roi, comme Brame, confervant une haine de religion
contre les reftes de Baouth, aura enfin chalîë les Chinois de
Negapatnam, terrein faifant partie de fon domaine.
Quoi qu’il en fo it, il eft certain que cette partie de l’Inde
n’a eu aucune part aux révolutions & au malheur des guerres
occafionné par l’ambition des Tartares. Ce feroit donc dans
cette partie de l’Inde que les Voyageurs philofophes trouveraient
à fatisfaire leur curiofité, plus que par tout le refte de
l’Inde opprimée par les Mogols.
Outre la tyrannie du Gouvernement Mogol, les diffentions.
continuelles qui régnent entre les Princes de cette Nation
qui font prelque toujours en guerre les uns contre les autres,
font que l’Inde a un. germe de guerre inteftine qui s’allume
de temps en temps dans quelque province, qui mine &
ruine infenfiblement le pays, & depuis que les Européens
s’y font mêlés, ils n'ont fait qu’en accélérer la ruine, comme
je l’ai déjà dit.
Il me refte à parler de deux a êtes extérieurs de piété
que les Indiens exercent par le même principe de religion
qui les anime en tout : ce font les Chauderies & les derniers
devoirs qu’ils rendent aux morts.
Les Chauderies, dans l’Inde , me paroiiîent répondre aux.
Caravanferas de Perfe, c’eft-à-dire, que les Chauderies font
des elpèces d’hôtellerie ou de retraites établies pour i’ufage