nant cela nous aurions un plus facile accès auprès des
Brames.
Nous nous préfentames donc à la porte, M. de Wiilems
& moi, demandâmes à entrer & â monter, dans la tour ; les
Brames commencèrent par nous refufer, iis finirent cependant
par fe laiffer fléchir: on nous ouvrit. Nous entrâmes &
avançâmes dans la cour ou enceinte, eicortés par iept a huit
Brames.
J’avois alors des domefîicjues Parias ; eu x, trouvant la
porte ouverte, voulurent profiter de l’occafion ; ils fe glif-
sèrent dans la cour : mais il s’éleva bientôt une grande
rumeur qui me fit regarder derrière moi, ne foupçonnant
-pas ce que ce pouvoit être ; je vis qu on youloit chafîèr mes
domeftiques; & comme ils ne vouloient pas fortir, leur
réfiilance occafionnoit ie mouvement que je voyois : lorfque
je fus ce dont il étoit queftion, je voulus faire entendre aux
Brames que mes domeftiques metoientabfolument néeeffaires
pour nous aider ; qu’en conféquence., je les priois de permettre
qu’ils entralfent & nous accompagnaffent; il ne fut
pas poflïble de les perfuader: ils répondirent que les Parias,
félon leur lo i, ne pouvoient pas même entrer dans l’enceinte
des pagodes; qu’ils nous ferviroient eux-mêmes & nous
aideraient comme ils pourraient : ii fallut me rendre, & dire
à mes domeftiques de Ibrtir. Les Brames nous en fervirent,
ils nous apportèrent des échelles , nous aidèrent à monter
par-tout où nous voulûmes ; nous tenoient eux-mêmes les
échelles, nos écritoires & notre papier, nous aidoient à placer
nos inftrumens; nous, n’eumes befoin, pour tout cela , que
d’ufer de quelques fignes : avant de fortir, nous nous promenâmes
dans la cour, & jetâmes un coup-d’oeil par-tout.
Devant la porte de la pagode, nous vîmes un vafte portique
à voûte piate , foutenue par des colonnes de 25 pieds
environ de hauteur, le tout en pierre de taille de Gingy ;
ce portique étoit rempli de toutes fortes défigurés d’hommes,
de chevaux, dans des attitudes fingulières : nous demandâmes
à entrer dans l’intérieur de la pagode, on nous refufa; nous
nous y étions attendus. En tout cela, j’admirai le flegme de
ces Brames ; iis nous regardoient avec un air indifférent, fans
que je remarquaffe fin- leur vifage le moindre air de;curiofité
fur ce que nous faifions.
La pyramide de cette pagode ,n’.eft pas fi élevée ni fi
décorée d’ornemens que celle de Viinour ; c’eft que, comme je
l’ai dit dans l’article fur la religion, le Patron de cette pagode
n’eft pas fi élevé en dignité que celui de la pagode de
Viinour; car chez les Indiens, la hauteur des tours des
pagodes fuit toujours le rang de la divinité à laquelle elle eft
dédiée.
Nous ne nous donnâmes pas la peine de mefiirer actuellement
la hauteur de cette pagode, les Brames nous affinèrent
qu’elle avoit 68 à 70 pieds d’élévation; cela s’accorda affez
avec notre eftime ; car après nous être contentés de mefurer
la bafe principale , c’eft-à-dire le portail, nous jugeâmes qu’il
avoit 18 à 20 pieds de hauteur; au-deilùs du portail s’élève
la pyramide compoiee de cinq corps ou cinq étages de 8 pieds
environ chacun, & le faîte ou ie comble qui peut en avoir
,15 ou 16.
La bafe que nous meiùrames a 33 pieds ; c’eft la largeur
du portail ou de l’entrée, où eft une belle porte ou ouverture
de 7 pieds de largeur.