L ’embouchure de la rivière d’Ariancoupam eft fermée
pendant une grande partie de i’année, par les fàbies que Ia
mer y apporte; alors il fe forme une digue for laquelle on
paife. Dans la faifon des pluies, la bouche s’ouvre & ia
mer entre dans la rivière ; on peut malgré cela la paffer très-
fouvent, fur-tout quand la mer eft baffe; les Indiens, qui
connoiffent ces momens, vous en avertiflènt. On eft fort
à ion aile dans fon palanquin; les Indiens font quelquefois
obligés de mettre les bambous fur leur tête, dans la crainte
que le palanquin ne plonge dans l’eau & qu’on ne foit
mouillé ; il ne faut pas pour cela appréhender la moindre
chofe ; lorfque la rivière eft trop haute, on le fert de
eatimarons; ils font très-commodes & on ne rilque rien.
Le catimarón eft compofé de trois groffes poutres de 15
à 20 pieds de longueur, plus où moins, liées & attachées
enfemble dans le fens de four longueur, & fo touchant
immédiatement ; après cela on four donne un peu de creux
en-deffus, ce qu’il en faut feulement pour les empêcher de
paroître de niveau ; par un bout on les façonne & on leur
fait une efpèce de bec; deux Indiens fe mettent, l ’un à un
bout & l’autre à l’autre bout, avec chacun une pagaye, &
ils vont fouvent à deux lieues au large avec ce frêle bâtiment
: ils ont toujours les piëds dans l’eau.
Les eatimarons font d’un très-grand uiàge 1e long de ces
côtes ; ces bâtimens n’ont pas befoin de port, & font toujours
en état; quand les IndierTs font de retour, ils halent au plein
four catimarón, & lorfqu’ils Veulent fortir, ils l’ont bientôt
lancé à l’eau. Les eatimarons fervent à la pêche, à porter
des nouvelles aux Vailîeaux qui palîent au large, & à en
recevoir d’eux: les lettres qu’on expédie ainfi, les Indiens
les enveloppent dans le morceau de toile qui leur fert à
cacher une partie du corps ; ils s’en font alors une ceinture
dans laquelle eft la lettre, qui par ce moyen ne peut pas fe
perdre. Quand la brife fouffle un peu fort & que la lame
déferle, ces gens font continuellement mouillés, & lorfqu’ils
ont paffé la journée à la mer, ils reviennent le corps couvert
de grains de fel marin , que la chaleur du Spleil a formés.
Les Indiens qui vont for les eatimarons, lavent tous très-
bien nâger & plonger; par cette raifon, les perfonnes qui
paffent la barre de Pondichéry, ou toute autre barre, le
long de la côte, fe font quelquefois accompagner par deux
ou trois eatimarons, qui voltigent autour de la chelingue,
& qui, en cas qu’il arrivât quelqu accident, font à portée
de vous fecourir & de vous fauver.
C eft un Ipeélacle fort amufent de voir ces gens dans la
barre, fur leur catimarón ; ils voltigent d’une lame for l’autre,
en font très-fouvent couverts à dilparoître, mais ils lavent
fi bien fe tenir, que rarement ils font enlevés de leur
catimarón. Pour le catimarón, il n’eft jamais renverlé & il
ne peut pas l’être.
Barre, en teimes de Marine, eft une foite de bancs de
fable & quelquefois de rochers, qui embarralfent l’entrée des
rivières & des ports, & défendent l’abord des côtes. On
ne peut palîér les barres qui font à l’entrée des rivières,
que lorfque la marée eft haute, 011 par les intervalles,
coupures ou canaux que peuvent lailfer entr’eux ces bancs:
Ces canaux s’appellent paffes ; les barres qui défendent
1 abord des côtes ne fe peuvent franchir qu’au moyen de
bateaux faits exprès.
Y y y ij