
i o î . H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e .
d'opprimer les autres. Cet te defcription de Rome ,
ne doit pas furprendre le leébeur inftruit ; s’il fait
réflexion , que depuis trois cens ans elle n’étoit
plus le féjour des empereurs. Diocletien demeuroit
à Nicomedie : Conf tandn s’établit à Bizance : les
empereurs d’Qccident demeuroient en lllyrie ou
en Gaule; & s’ils étoient en Italie , ils faifoient leur
féjour à Milan ou àRayenne : qui fut aufli la refi-
dence des rois Go t s , 6c enfuite des exarques. Ainf i
comme la cour 6c le centre des affaires n'étoic plus
à R om e , ton la quitta infenfiblement ; fes palais
inhabitez tombèrent en ruine; 6c elle alla toujours
dépendant jufques à être réduite à cette affreufe
defolation, que faint Jean avoir prédite dans l’Apo-
calypfe. Saint Grégoire ajoute : Ce que nous di-
fons de Rome , nous apprenons qu’il eft arrivé
dans toutes les villes du monde. Quelques lieux
ont été ruinez par la famine , par le g la iv e , par les
tremblemens de ter re, 6c par d’autres calamitez.
Méprifons donc de tout nôtre coeur ce monde , du
moins quand il périt: 6c finiflons avec lui les défirs
qui nous y attachent. Il étoit effedivement perfua-
dé,que la fin du monde étoit proche, & enregardoit
comme les préliminaires tant d’incurfions de barbares,
tant de guerres & de calamitez publiquesjdont
fon fiecle étoit affligé II en parle en toute occafion, 6c
ne répété rien plus fouvent dans tous fesdifcours 6c
toute»fes lettres, que la venue du juge terrible, 6c la
-rigueur de fon jugement, il paroit pénétré de cette
crainte de-là vient que fon ftile ne refpire qu’humilité
,comp ond. ion , 6i larmes de penitence.
L i v r e T r e n t e - C i n q j j i e ’m e . 103
Il ne fit que dix homelies fur la derniere partie
d’Ezechiel , 6c n’en expliqua qu’un chapitre ; après
quoi il finit ainfi : Perfonne ne doit trouver mauvais
, fi je cefle après ce difcours. Vous v o y e z tous
comme nos afflidions font augmentées, le glaive
nous environne de toutes parts : les uns reviennent
ayant les mains coupées: nous apprenons que les autres
font p r i s , 6c les autres tuez. Quand on ne peut
plus v iv r e , comment peut-on expliquer les myfte-
res de l’écriture ? Que refte-t-il d o n c , linon de rendre
grâces avec larmes à celui qui nous frappe pour
nos pechez ? Ces vingt-deux homelies fur Ez e chie l ,
furent huit ans après recueillies en deux livres , comme
les homelies lur les évangiles; 6c Saint Grégoire
les envoya à l ’évêque Mar ien, qui les lui avoit demandées.
Saint Grégoire voyant Rome ainfi preflee , fit
faire au roi Agilulfe des propofitions de paix, qu’il
écoûta ; & pour les faire agréer à l ’exarque , Saint
Grégoire écrivit ainfi au fcolaftique Severe , qui
étoit de fon confeil : Sçachez que le roi Agilulfe ne
refufe pas de faire une paix générale , pourvu que
l ’exarque lui faffejuftice deplufieurs infradions du
traité précédent, dont il fe plaint. Vous fçavez combien
la paix nous eft neceifaire : agiifez donc fui-
vant vôtre prudence ordinaire, pour obliger l'exarque
à y confentir promptement. Autrement le roi
promet de faire fa paix particulière avec ndffci mais
nous favons queplufieurs autres lieux feront perdus
infailliblement. L’empereur apparemment prévenu
par 1 exarque, qui n aimoit pas Saint Grégoire, n’ap-
A n. 595.
Tr&faGo
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Plaintes de
faint Grégoire
a l’empereur»-
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