
4 0 4 H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e . '
tribua cette vidroire à la pieté du roi Ofoüald. Car
pour fc préparer au combat, il planta une c ro ix , 8i
fit crier par toute l ’armée : Mettons-nous à genoux,
& prions Dieu tous enfemble , qu’il nous défende
contre ce fuperbe ennemi, puifqu’il connoît la jufti-
ce de cette guerre. C e lieu fut depuis nommé le
champ celefte : il s’y fit plufieurs miracles ; 8c l’on
coupoit de petits brins de cette c ro ix , que l’on
mettoit dans l’eau, pour guérir les hommes ou les
beftiaux..
Sitôt que le roi Ofoüald fut établi dans fon
royaume, il fongea à rendre Chrétien tout fon
peuple ; 8c pour cet e ffe t, il envoya aux anciens
des Ecoifois -, c’eft-à- dire des Irlandois, chez lef-
quels il avoit reçu le baptême, demandant un évêque
pour inftruire les Anglois fes fujets. On lui envo
y a d’abord un homme auftere, qui ayant prêché
quelque tems fans f ru it , revint en fon païs,
8c dit dans l ’aifemblée des anciens, qu’il n’avoit pu
rien faire , parce qu’on l ’avoit envoyé à des barbares
d’un efprit dur 8c indomptable. O n tint con-
feil là-demis, avec un grand défir de procurer le
falut à cette nation. U n des affiftans nommé A ï -
dan , dit au prêtre qui avoit été envoyé : Il me
femble , mon frere , que vous avez été plus dur
qu’il ne falloir à ce ^peuple groffier ; 8c que vous
n ’avez pas commence fuivant la doétrine de l’A p ô tre,
par leur donner le lait d’une inftruétion douce,
jufques à ce qu’ils fuifent capables de préceptes plus
parfaits. Tous les affiftans tournèrent les yeux fur
A ïd a n , 8c après avoir bien examiné fes paroles, ils
L i v r e t r e n t é - h u i t i e ’ m e . 4 0 ;
fefolurent de l’envoyer , pour l ’inftru&ion de ces
peuples comme excellent en d iferetion, qui eft la
mere des vertus.
Ces Ecoifois, à qui le roi Ofoüald s’adreifa, M
étoient les moines de l’Iile de H i, & du monaftere que.
fondé par faint C o lom b ou Colomban l’ancien , sap. Hv
.dans le fiecle précédent. Segene prêtre en étoit XXIV-"-
alors .abbé, 8c ce fut lui qui envoya iaint A ïd an ni. c.
au roi Ofoiiald avec quelques autres moines, après
l ’avoir fait ordonner évêque. Il obtint du roi pour ç. a
fon fiege épifcopal Lindisfarne peninfule , que le
flux de la mer reduifoit en ifle deux fois le jour.
On la nomma depuis l ’ifle fainte, & elle eft à quatre
mille de V a rv ic en Ecoffe. Le faint évêque
commença donc à prêcher & établir cette nouvelle
églife : mais comme il ne fçavoit pas bien l’A n g
lo is , le r o i , qui dans le lon g fejour de fon exil,
avoit appris parfaitement la langue des Irlandois ,
lui fervoit fouvent d’interprete, avec fes capitaines
8c fes officiers : ce qui donnoit au peuple un agréable
fpeéàacle. Depuis ce tems plufieurs Irlandois
venoient de jour en jour prêcher la fo i avec un
grand z e le , dans les provinces de l’obéiffance du
roi Ofoüald ; & ceux qui étoient prêtres adminif-
troient le baptême. O n bâtiifoit des églifes en di^
vers lieux -, 8c le roi donnoit libéralement des terres,
pour fonder des monafteres,où les jeunes A n glois
apprenoient les lettres 8c la difeipline régulière.
Car ces miffionaires Irlandois étoient moines
pour la plûpart auffi bien que faint A ïd an leur évêque.